L'art du lobbyiste est parfois de savoir se réfugier dans le silence et l'apparente indifférence, même face à ce qu'il redoute le plus. Ainsi Amazon, qui craint forcément de voir adoptée la proposition de loi qui l'obligerait à faire payer les frais de port des livres commandés sur Internet, s'est montré d'une étonnante discrétion en ne réagissant jamais, même lorsqu'il était durement (et parfois injustement) attaqué par les députés à l'Assemblée Nationale, lors des travaux préparatoires.
Car c'est un peu le piège du prisonnier pour Amazon. S'il s'exprime pour batailler contre la proposition de loi, il donne raison à ceux qui lui reprochent de vouloir protéger ses intérêts au détriment des libraires indépendants, et qui prétendent que la gratuité des frais de port est une concurrence déloyale qui permet à Amazon de remporter des parts de marché. S'il ne dit rien, il prend le risque de ne pas susciter l'émotion et donc l'opposition que mériterait un texte qui aura pour principal effet de sanctionner les consommateurs.
Dans sa communication à pas de chat, alors que le texte sera en discussion ce jeudi 3 octobre à l'Assemblée, Amazon a donc fait le choix de feindre un regard détaché sur la proposition de loi UMP. Et de rappeler quelques évidences.
Si la proposition est adoptée, "cela aura un impact mineur sur Amazon mais en revanche, cela pénalisera les consommateurs et menacera la diversité culturelle en France", prévient sobrement Romain Voog, le président d'Amazon France, interrogé par Le Figaro. Pour lui, le texte irait "avant tout à l'encontre de l'intérêt des consommateurs, en renchérissant de facto le prix des livres achetés sur Internet par rapport à ceux achetés en magasins", alors que "de nombreux consommateurs habitent loin de toute librairie et apprécient de pouvoir acheter leurs livres en ligne". De plus, qu'on le veuille ou non, Amazon propose une offre sans équivalent dans son étendue.
Amazon peut d'autant plus se permettre cette discrétion que le texte UMP n'a que très peu de chances d'être adopté par la majorité socialiste, comme le veut la tradition française. En revanche, le Gouvernement prépare lui aussi son propre projet de loi visant à encadrer la gratuité des frais de port sur Internet. S'il arrive à se frayer un chemin dans le calendrier parlementaire très serré, le projet de loi d'Aurélie Filippetti pourrait susciter une réaction plus importante du géant américain.
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