Chaque été a ses applications pour ados au succès radical : il y a des filons qui sont ensuite durables, comme Snapchat, et d’autres nettement moins, comme Prisma ou Famous (qui s’en souvient ? c’était l’an passé).
En 2017, c’est une appli saoudienne qui fait sensation : Sarahah se classe première dans le classement de l’App Store depuis la fin juillet dans les pays anglophones et trace sa route en France. Pourtant, il est probable que vous n’en ayez jamais entendu parler si vous n’êtes pas rompu au monde des ados, à Snapchat ou à la tech arabe.
Anonymat et franchise
Dans les faits, Sarahah est une messagerie anonyme à-la-Ask.fm, dans laquelle l’anonymat est donc asymétrique : celui qui envoie le message est inconnu, celui qui le reçoit est ciblé par le destinataire. Au départ, son créateur, Zain al Abidin Tawfiq, imaginait surtout son site comme un moyen de rompre la glace dans les entreprises et permettre aux supérieurs de savoir ce que pensent leurs employés d’eux, sans que ces derniers n’avancent à découvert.
Le nom du logiciel Sarahah est par ailleurs inspiré de cette philosophie. Nous sommes alors en novembre 2016 et le site de Al Abidin Tawfiq n’est pas tout à fait un hit. Mais le Saoudien persévère, il élargit la cible de son site à toute personne ayant envie d’écrire anonymement à un proche.
Il invite ses amis à participer. Dès lors, commence l’effet Sarahah : libéré par l’outil discret et rapide, on deviendrait plus honnête… ou moins bienveillant. Néanmoins, bienveillant ou non, l’anonymat plaît, séduit et taquine.
Propulsée par un influenceur dans les pays arabophones, Sarahah « se partage comme un virus » à travers le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord selon les mots de son créateur. D’abord au Liban, puis en Tunisie, le hit finit par atteindre l’Égypte. Lorsque l’application arrive sur les rives du Nil, elle compte déjà 3 millions d’utilisateurs. Une vraie tâche d’huile.
Pour Al Abidin Tawfiq, le succès de son application dans le monde arabe serait très lié aux sociétés arabophones. Il explique à Mashable : « Dans notre société, nous sommes très connectés avec nos familles et nos amis, et nous sommes très honnêtes. Nous exprimons nos sentiments avec franchise ». D’où le besoin d’une application pour étendre cette honnêteté au monde numérique, peu importe la position sociale de l’internaute.
Tâche d’huile
Enfin, en juin 2017, le Saoudien comprend qu’il a désormais entre les mains une pépite tech qui pourrait durer — ou non. En premier lieu, il est rejoint dans son projet pour développer une application iOS. Celle-ci est mise en ligne le 13 juin.
Puis tout va s’accélérer à cause d’une mise à jour de Snapchat, pourtant aucunement liée à Sarahah. L’application des millennials a en effet ouvert son interface aux liens externes en juillet. Là, les ados vont se ruer pour partager le lien de leur profil Sarahah dans leurs stories, invitant leurs amis à laisser un mot anonyme à leur propos.
La viralité devient alors sans précédent lorsque Sarahah se lie à Snapchat : en moins d’une semaine, l’application passe du top 1 500 de l’App Store à la première position des téléchargements en 10 jours.
Maintenant que le service est devenu un tube de l’été à la sauce tech pour les ados, le modèle semble déjà se fissurer.
L’anonymat inquiète les parents et les investisseurs. L’échec de Yik Yak, un autre réseau social très direct, a désormais vacciné la tech lorsqu’il s’agit de « libérer la parole » par ce biais. Sous le feu des critiques en Tunisie mais également dans les pays anglophones (et francophones) Sarahah a encore beaucoup de travail avant de pérenniser son business.
Al Abidin Tawfiq tente déjà de déminer le terrain : il assure aux médias occidentaux qu’il va envisager des futurs filtres contre la vulgarité et les messages à caractères sexuels — les deux vraies stars de Sarahah selon bien des témoignages.
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