Août 2017, Tony Estanguet, coprésident du comité de candidature Paris 2024 lance un pavé dans la mare : les Jeux Olympiques français pourraient accueillir des épreuves d’eSport — soit, des compétitions de jeux vidéo. 2024, c’est dans 7 ans et il aura fallu que quelques heures pour que les premiers débats soient lancés, avec une éternelle question à l’épicentre du séisme de l’indignation : « Les jeux vidéo peuvent-ils être un sport ? » (qui se classe juste après « Les jeux vidéo sont-ils de l’art ? » sur l’échelle des débats).
Sur Twitter, nous avons demandé à notre communauté son avis sur la question, en offrant un choix binaire : pour ou contre les matchs de Starcraft 2, League of Legends ou FIFA au beau milieu du saut à la perche et du 100m ? Nous nous attendions à un biais évident de notre lectorat qui est probablement un poil plus techy que la moyenne, mais sur les 322 premiers votes, le score est extrêmement serré : 48 % se disent pour et 52 % s’affirment contre.
Pour cette partie du lectorat qui se dit « Contre », les arguments tournent souvent autour de l’effort physique. Les Jeux Olympiques sont alors pensés comme le réceptacle du dépassement du corps et les disciplines de l’esprit n’y ont pas leur place. Et en effet, l’histoire des JO leur donnerait raison : aucune discipline qui demande une activité mentale seule n’a été au programme des Jeux Olympiques passés ou présents. On trouve seulement dans les sports « reconnus par le CIO » des jeux comme le bridge ou les échecs — mais qui ne sont pas au programme des Jeux Olympiques. Le jeu de Go n’y figure pas.
Mais déjà dans cette liste de sports « physiques », on pourrait trouver des exceptions : le tir à l’arc n’est-il pas un jeu d’adresse ? La voile n’est-elle pas une technique, une maîtrise parfaite de l’outil bateau ? L’équitation n’est-elle pas un mélange d’adresse et de technique ? Et puis il faut dire que les critères du CIO ne prêtent pas main-forte aux détracteurs de la candidature eSport à l’état de sport olympique, résumés ainsi par Wikipédia :
- les caractéristiques techniques (nombre d’épreuves, infrastructures nécessaires, coûts opérationnels, etc.),
- l’histoire du sport (création de la fédération, participations aux Jeux, etc.),
- l’universalité (nombre de pratiquants, de fédérations actives, répartition par continent, etc.),
- la popularité (vente de billets, couverture télévisée, sites internet, sponsors, etc.),
- l’image (égalité des sexes, transparence, équité, attrait, impact sur l’environnement, lutte contre le dopage, etc.),
- le développement futur de la fédération (ses finances, ses axes de développements, etc.)
Aucun de ces critères ne serait une barrière à l’eSport qui a ses ligues, ses championnats, ses structures professionnelles, son histoire (Starcraft a par exemple 20 ans…), ses centaines de milliers de fans, une image qui se construit, mais qui attire globalement (okay, pas tout le temps) et un futur qui semble promis à un avenir radieux (et plein de thunes).
Mais encore faut-il, pour prétendre à l’éligibilité au statut de sport olympique, être un sport. Et c’est là que les camps se forment.
Le sport est un ensemble d’exercices physiques ou mentaux se pratiquant sous forme de jeux individuels ou collectifs pouvant donner lieu à des compétitions. Le sport est un phénomène quasi universel dans le temps et dans l’espace humain.
- Le bon vieux Larousse donne du sport une définition plus stricte, réservée à l’activité physique :
- Le CNRTL est entre les deux. Pour lui, le sport définit l’activité physique, mais on peut lui adjoindre un adjectif pour qualifier d’autres types de sport. Sport automobile. Sport équestre. Alors pourquoi pas Sport électronique ?
- On remercie enfin le gouvernement qui commence par définir le sport comme « toutes formes d’activités sportives » avant de pencher côté effort physique.
Bref, il y a très probablement autant d’arguments d’un côté que de l’autre. Tous se défendent (allez dire à un ou une pro-gamer que son entraînement n’est pas physique) et tous se valent. Ce qui est sûr, c’est que l’eSport à Paris en 2024 serait un symbole d’ouverture et de modernisation pour l’institution, dont les infrastructures demanderaient clairement moins d’investissement que le moindre stade olympique. On vous souhaite de passer de bons dîners en famille jusqu’en 2024 et n’oubliez pas : comme sur Internet, si vous commencez à avoir tort, soyez de mauvaise foi.
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