Des documents déposés en soutien d’une plainte contre la MPAA font état d’un contrat passé entre le lobby du cinéma et un hacker pour espionner TorrentSpy et d’autres organisations liées au P2P.

L’affaire avait déjà été soulevée en mai dernier, lorsque la société éditrice du site TorrentSpy a annoncé avoir déposé avec trois employés une plainte contre la MPAA (Motion Picture Association of America). Ils reprochent à l’Association hollywoodienne d’avoir offert 15.000 dollars à un ancien collaborateur de la société pour obtenir de manière frauduleuse des informations confidentielles.

Jeudi, les documents à l’appui de la plainte ont été déposés au tribunal d’instance du district central de Californie, à Los Angeles. « J’ai contacté [la MPAA] et je leur ai proposé de leur fournir des informations à propos de Justin Bunnel et de Torrentspy« , peut-on lire dans une déclaration signée de la main d’un certain Robert Anderson, le hacker présumé employé par la MPAA. Justin Bunnell, fondateur de Torrentspy, avait travaillé avec le canadien Anderson avant que les deux ne se quittent, fâchés, en avril 2005.

Selon Valence Media, la société éditrice du moteur de recherche BitTorrent, dès le 10 juin 2005 des représentants de la MPAA ont rencontré Robert Anderson à Vancouver, sur la côte ouest du Canada. L’ancien collaborateur de Bunnell voulait se venger, et la MPAA aurait saisi l’occasion. Les documents fournis au tribunal attestent que Dean Garfield, le directeur juridique de l’Association, aurait ce jour-là proposé 15.000 $ à Anderson pour obtenir des e-mails privés, et des informations technologiques ou financières. Ils ont signé un contrat, versé au dossier, qui spécifie néanmoins que les informations devaient être obtenues de façon légale.

L’arroseur arrosé ?

Cependant c’est en détournant le serveur d’e-mails de la société qu’Anderson a pu fournir à la MPAA des documents hautement confidentiels. L’homme recevait copie de tout ce qui entrait ou sortait du serveur. C’est ainsi qu’il a pu fournir au lobby du cinéma des e-mails privés de la société, avec notamment les identifiants privés de TorrentSpy, un fichier Excel avec les recettes et dépenses de la société, un index de l’architecture des fichiers, des captures d’écran du système de recherche propriétaire, et même une facture privée d’un des cadres de la société. Pour l’avocat de Valence Media, la MPAA ne pouvait ignorer le caractère illégal de cette collecte d’informations, et le bout de papier signé avec Anderson ne peut servir d’alibi à l’association des studios de cinéma. Par ailleurs Anderson affirme que la MPAA lui aurait, à l’oral, indiquer qu’ils se fichaient des moyens employés.

Pour obtenir les données trouvées par Anderson, ou pour tenter d’étouffer l’affaire, la MPAA et l’éditeur de Torrentspy auraient négocié pendant 10 jours, apprend-t-on à la lecture des pièces. Mais les discussions n’ont pas abouti, indique l’avocate Ira Rothken. Les raisons qui ont poussé Robert Anderson à se dénoncer ne sont pas très claires, mais il pourrait s’agir soit d’un violent remors… soit d’un délicat ameçon auquel la MPAA aurait volontiers mordu. Si Valence Media portait plainte contre lui, Anderson pourrait risquer de lourdes amendes et une peine d’emprisonnement.

De plus, l’affaire pourrait connaître quelques dangereux développements pour la MPAA. D’après la copie anonymisée du contrat versé au dossier, une clause prévoyait qu’Anderson trouve également des informations sur d’autres entreprises et organisations liées au peer-to-peer, comme The Pirate Bay, eXeem ou Mininova.

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