Les pompiers de Paris accumulent chaque jour plus de 5 millions de données brutes recueillies lors de leurs interventions, qu'ils utilisent pour réaliser des modèles prédictifs. Mais ils souhaitent pouvoir mieux exploiter ces données en les croisant avec d'autres sources, notamment issues de l'Open Data.

L'analyse prédictive est un aspect méconnu du travail des pompiers et il est pourtant d'une importance vitale, au sens strict du mot. Etre capable d'évaluer les probabilités qu'un accident se déroule dans un secteur donné à une heure donnée permet aux secours de se mettre en alerte et d'adapter leur organisation pour intervenir au plus vite dans le cas où l'événement redouté se produit. Il s'agit aussi de modéliser des scénarios pour savoir, par avance, où et comment réagir en cas d'inondation, d'incendie, ou d'explosion, afin d'être le plus efficace possible au moment de l'intervention.

A cet égard, les Pompiers de Paris ont rejoint le projet Democrite (DEmonstrateur d’un MOteur de Couverture des RIsques sur un TErritoire) financé par l'Agence nationale de la recherche, qui vise à compiler un maximum de données pour proposer des outils prédictifs d'analyse et de couverture des risques. Y participent également le Centre Européen de Recherche sur le Risque, le droit des Accidents Collectifs et des Catastrophes (CERDACC) et le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), aux côtés de laboratoires de recherche (Mines d'Alès, Inria, CNRS), et de sociétés privées (IPSIS, SYSTEL).

"Ces outils visent à cartographier les probabilités d’occurrence des risques ainsi que les vulnérabilités intrinsèques (conséquences potentielles d’un évènement non souhaité)", explique l'Agence nationale de la recherche. "Utilisables en planification froide comme en temps de crise, ils serviront à mettre en adéquation la réponse de secours (en nature, nombre, positionnement… des moyens) avec la couverture des risques retenue, quantifiée et validée par l’autorité".

4000 données brutes par heure d'intervention

Dans un premier temps, le projet traite les risques d'incendie et d'explosion, qui sont liés, et il est prévu de l'étendre par la suite aux inondations ou encore aux propagations d'épidémies.

De leur côté, les Pompiers ont énormément de données à leur disposition. "Pour donner un ordre d’idée, une heure d’intervention chez nous, c’est 4000 données brutes : de la géolocalisation, du bilan médical, du rapport d’opération… Or on fait 1300 interventions par jour, d’une heure chacune en moyenne, 365 jours par an, depuis 30 ans… Donc aujourd’hui, on est riche de 48 milliards de données très bien archivées, catégorisées mais encore insuffisamment exploitées", explique à RSLN le lieutenant-colonel Jean-Philippe Pagniez, l'adjoint chef du bureau d'études prospectives de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris.

D'ores et déjà, les pompiers utilisent leurs données pour optimiser leur organisation. "La contrainte forte pour nous c’est d’abord la gestion  de nos moyens en temps réel. On fait un demi-million d’interventions par an avec 140 ambulances qui traitent 85% de notre activité. On anticipe avec des courbes statistiques sur la saisonnalité (faut-il plus de moyens en été qu’en hiver ?), la variabilité (est-ce que l’activité opérationnelle est la même toute la journée ?), puis on détermine les moyens à mettre en place grâce à un système de gestion opérationnel". L'historique permet aussi de comprendre qu'il y a une crise, si par exemple le nombre d'appels est anormalement élevé.

Mais les Pompiers souhaitent pouvoir ajouter à ces données d'autres informations qui proviennent d'autres sources, comme la météo, la circulation routière, et le recensement des populations. Autant de facteurs de risques qui doivent entrer en compte dans les modèles prédictifs.

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