Ce jeudi 19 octobre, Ubuntu, la distribution GNU/Linux de Canonical, célébrait un double événement : son 13e anniversaire mais aussi la fin d’une crise qui a touché la division grand public de la firme.
Alors qu’Ubuntu était créée par Mark Shuttleworth il y a plus d’une décennie avec l’ambition claire de s’adresser au grand public, ce treizième anniversaire s’avérait triste à cause d’une année difficile marquée par des licenciements. L’abandon définitif et brutal des technologies Unity et Ubuntu Phone signait en effet le virage d’une entreprise auparavant utopiste, qui se montre désormais à la recherche de revenus solides.
17.10 : l’heure est au bilan
L’anniversaire est également le rendez-vous d’une nouvelle version de la distribution la plus populaire du monde, la 17.10, qui a ainsi rejoint les serveurs de téléchargement du monde entier. Mais là encore, l’ambiance n’était pas à la fête.
Artful Aardvark, comme l’appellent ses créateurs, est la première version de la distribution sans Unity, sans les technologies laborieusement développées par Canonical. Le grand du libre est en effet revenu à la maison Gnome après son escapade tonitruante : exit les équipes de designers, exit le rêve de toucher des centaines de millions de consommateurs, désormais, Ubuntu est un produit quasi secondaire dans le nouveau Canonical.
Certains défendent déjà, pour des raisons technologiques et communautaires, la réconciliation de l’entreprise et de la communauté Gnome, historiquement plus liée à Red Hat. Néanmoins, il est difficile de ne pas y voir une défaite de la stratégie de Canonical élaborée depuis dix ans. À ce titre Artful Aardvark est la première version d’une nouvelle Ubuntu dans une communauté où l’enthousiasme semble avoir déserté.
Dans sa déclaration à la presse pour la sortie de la version 17.10, M. Shuttleworth ne fait en outre pas de mystère : « Avec les dernières fonctionnalités de Linux, [Ubuntu 17.10] fournit une image de ce que sera la prochaine version majeure [ 18.04 LTS] et une nouvelle génération de fonctionnalités pour l’IA, les applications encapsulées dans les container et pour l’edge computing » prophétise le fondateur de la distribution en citant uniquement des technologies adressées aux professionnels. À l’instar de l’année écoulée, la firme insiste sur ses nouveaux métiers, rémunérateurs, délaissant les anciens discours sur les expériences utilisateurs ou même l’adoption par le grand public des technologies libres.
Feuille blanche
La communauté devra en outre être conciliante avec cette version qui tire un trait sur des logiciels parfois développés depuis plus de cinq ans chez Canonical. Les habitués voient disparaître le HUD, le menu global, notify-osd, et bien sûr Unity, son dock et son menu de démarrage.
À la place, la version 17.10 embarque une version légèrement personnalisée du Gnome Shell mais ressemblera beaucoup aux nombreuses autres distributions adoptant Gnome. Un dock a été ajouté — comme les utilisateurs l’avaient plébiscité en ligne — mais le changement visuel est évident.
Plus marquant mais également très symbolique : le serveur graphique Wayland est utilisé par défaut dans Ubuntu. Ce serveur qui doit remplacer le croûlant X.org était à l’origine d’un conflit entre les communautés puisque Canonical avait tranché en créant son propre projet : Mir. Ce dernier a été abandonné avec l’Ubuntu Phone, et le retour dans le rang de la firme s’inscrit dans cette décision de ne plus s’investir outre mesure sur les débats d’expérience utilisateur.
En somme, recentré sur des créneaux qu’elle juge plus rémunérateurs que ne le sera jamais Linux pour le grand public, Canonical a traduit dans sa distribution sa nouvelle orientation. Si ce virage peut rassurer une communauté fragilisée par des années de conflits, il est également une défaite définitive pour une société qui pensait changer le monde du PC.
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