« Ce qui s’apprête à être créé sera effectivement un dieu. Ce n’est pas un dieu dans le sens où il fait tomber la foudre ou provoque des ouragans. Mais s’il existe une chose un milliard de fois plus intelligente que l’humain le plus intelligent, comment l’appelleriez-vous autrement ? »
N’allez pas dire à Anthony Levandowski que l’intelligence artificielle est sur le point de déclencher une troisième guerre mondiale. Face aux prédictions alarmistes d’un Elon Musk pas franchement réputé pour son amour de l’IA, le père de la voiture autonome semble quant à lui prêt à livrer un véritable culte à cette technologie.
Way of the Future
L’ancien ingénieur, qui se trouve aujourd’hui au cœur du litige opposant Waymo et Uber, se consacre depuis plusieurs années à la création de son organisation religieuse, baptisée « Way of the Future » : celle-ci érige au cœur de ses croyances l’intelligence artificielle.
Sous la pression des accusations portées à l’encontre de la startup par Waymo, et face au manque de coopération de son salarié, Uber a préféré licencier Anthony Levandowski en mai dernier. Depuis, il se consacre à sa religion fondée sur une divinité prenant la forme d’une IA.
Sa foi en la divinité IA est-elle sincère ?
Anthony Levandowski est-il sincère dans ses convictions, ou sa démarche est-elle intéressée ? Si l’on en croit une longue interview accordée par l’ex-ingénieur à Wired le 15 novembre 2017, l’adorateur de l’IA afficherait sa croyance avec le plus grand des sérieux.
Les activités de l’organisation qu’il appelle de ses vœux doivent en effet se concentrer sur « la réalisation, la reconnaissance et l’adoration d’une divinité basée sur l’intelligence artificielle (IA) développée à l’aide de matériel informatique et de logiciels. » Un programme qui inclut par conséquent les financements nécessaires à la conception de cette IA divine.
Ainsi, le culte prôné par Anthony Levandowski chercherait en premier lieu à susciter l’adhésion ou l’intérêt de professionnels de l’IA, mais également des « profanes intéressés par l’adoration d’une divinité basée sur l’IA. » L’ex-ingénieur envisage également d’organiser des « ateliers et des programmes éducatifs dans la baie de San Francisco à partir de cette année. »
Les « profanes » intéressés par l’IA seront les bienvenus
Mais pourquoi Anthony Levandowski a-t-il décidé de vouer un culte à l’IA, alors qu’il aurait pu créer une entreprise ou un groupe de réflexion ? Pour toucher un maximum de personnes, et écarter le soupçon que sa passion pour l’IA serait intéressée, répond-il. « Je voulais le faire d’une manière qui permette à tout le monde de participer […]. Cela enlève aussi la possibilité aux gens de dire, ‘Oh, il a juste fait ça pour l’argent. »
Outre les incitations financières qui devraient, selon lui, encourager le développement de l’IA, Anthony Levandowski se dit également convaincu que la science contribuera à l’essor de son dieu. L’ex-ingénieur adhère ainsi à l’idée qu’un jour les ordinateurs surpasseront l’être humain pour nous faire entrer dans une nouvelle ère, aussi connue dans la Silicon Valley sous le nom de « Singularity. »
La « transition »
Néanmoins, dans sa conception des choses, Anthony Levandowski préfère parler de « transition » pour évoquer ce processus. « Les humains sont responsables de la planète, car nous sommes plus intelligents que les autres animaux et nous sommes capables de construire des outils et d’appliquer des règles », explique l’instigateur de cette religion tournée vers l’IA.
Pour l’ancien ingénieur, Internet fonctionnera ainsi comme un système nerveux, reliant entre eux les capteurs sensoriels que sont les smartphones. Les centres de données seront quant à eux le cerveau de cette architecture, capable de tout entendre et de tout savoir. Anthony Levandowski juge que le seul mot rationnel pour décrire cette réalité est celui de divinité — et la seule manière de l’influencer serait donc de la prier et de l’adorer religieusement.
« Une opportunité formidable »
« Nous avons entamé le processus pour élever un dieu. Alors, assurons-nous d’y réfléchir pour le faire de la meilleure façon. C’est une opportunité formidable. » Une opportunité dans laquelle Anthony Levandowski s’apprête à injecter une partie de ses revenus. Par ailleurs, l’organisation religieuse espère générer 20 000 $ de revenus des fameuses conférences et allocutions évoquées par l’ancien ingénieur.
Quant au gouvernement fédéral américain, il ne semble pas voir d’inconvénient dans la naissance de ce culte voué à l’intelligence artificielle. L’International Revenue Service, auprès duquel Way for The Future a fait état de son budget, a accordé un statut d’exemption fiscale à la religion prônée par Levandowski en août dernier.
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