Dans un article qui ne fera pas la joie de Pascal Nègre, le magazine Fortune s’interroge sur l’avenir des maisons de disques au moment où un nombre croissant d’artistes comprennent que l’importance des labels chute avec Internet. Mais les majors sont-elles pour autant vouées à mourir ?

« Qui a besoin des maisons de disques ?« . C’est la question posée cette semaine par le magazine Fortune. Devin Leonard raconte dans un article passionnant comment l’agence artistique The Firm dirigée par Jeff Kwatinetz s’est arrangée pour permettre au rappeur Ice Cube de vendre 500.000 albums en ne laissant à EMI que des frais de distribution et des droits d’édition à l’étranger. L’artiste qui avait déjà une réputation établie dans le monde du Hip Hop a financé lui-même la création de son dernier album et il touche désormais l’essentiel des revenus issus des sonneries et des licences. Le journaliste rapporte que Universal Music était prêt à signer l’accord avant de réaliser à la dernière minute qu’en cas de succès c’était le signal aux autres artistes en vogue qu’ils n’ont plus besoin de signer des contrats où l’ensemble des droits sur les albums leur sont cédés. Le label de Vivendi a rejeté la proposition, mais EMI l’a acceptée.

Leonard raconte encore comment grâce à Internet le leader de Radiohead, Thom Yorke, a pu arriver second au classement Billboard en signant pourtant avec une maison de disques indépendante pour son album solo « The Eraser ». La promo du disque s’est faite essentiellement grâce à la première page d’iTunes, qui n’exige pas d’être signé chez une major pour y figurer.

Les artistes veulent reprendre en main leurs affaires et construire eux-mêmes leur carrière (à l’aide de leur agent), en ne laissant aux maisons de disques que le rôle de distribution et de marketing. The Firm veut revenir au temps des maisons de disques à succès des années 1960, où le manager s’occupait non seulement de produire les disques et de les promouvoir, mais aussi d’assurer le succès des tournées, de vendre des produits dérivés et les licences des chansons. « Les groupes qui ont le plus duré ont été créés à cette époque« , se souvient Jeff Kwatinetz. « Ce sont les groupes qui vendent encore des places de concert, qui vendent encore des disques, que ces soient les Eagles, Pink Floyd, ou même Chicago« .

Pour Kwatinetz, les majors « sont tellement concentrées sur leurs objectifs trimestriels de ventes d’albums qu’ils ne peuvent plus construire une carrière à long terme pour leurs artistes« . The Firm, qui avait monté l’accord entre EMI et Korn, veut ainsi permettre aux artistes de développer leurs affaires autrement que par la simple vente de disques.

« Ils sont dans une spirale mortelle« , pressent Jeff Kwanitetz. « Les maisons de disques seront bientôt exterminées. Mais le business de la musique, le business de créer de la musique, ne le sera pas – parce que les gens aiment la musique.

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