Les conditions générales d’utilisation que les services vous demandent d’approuver sans réserve au moment de l’inscription sont certainement les documents les moins lus d’Internet. À tort d’ailleurs, parce que ces textes organisent la renonciation de vos droits afin de pouvoir collecter et traiter vos données, tout en déterminant ce que vous avez le droit de faire et ce qu’il vous est refusé.
Le désintérêt du public pour le contenu des CGU se comprend aisément : ce sont des contrats à la lecture interminable, qui regorgent d’un langage juridique difficilement accessible pour le tout-venant. Or, il arrive parfois que certaines découvertes dans ces documents, à l’occasion de leur lecture attentive — en particulier quand ils sont mis à jour –, provoquent des controverses.
Il y a quelques années, Instagram et Snapchat ont ainsi été pris dans la tourmente à cause de modifications dans les conditions générales qui ne sont pas passées auprès de leur communauté. Si certaines controverses conduisent parfois les plateformes mises en cause à faire marche arrière, le fait est que les réactions surviennent en général a posteriori et soulignent à chaque fois l’ignorance des internautes sur les CGU.
C’est pour cette raison qu’il existe diverses initiatives visant à rendre ces textes plus accessibles et plus compréhensibles, afin de savoir quelles sont les dispositions que l’on accepte. Polisis est de celles-là : il s’agit d’un système d’intelligence artificielle conçu par des scientifiques des universités du Michigan, du Wisconsin et de l’école polytechnique fédérale de Lausanne pour… résumer les CGU.
Accessible via un navigateur web mais aussi disponible sous la forme d’une extension pour Mozilla Firefox et Google Chrome, l’outil permet d’aller chercher un contrat, par exemple celui de Google, et de savoir quelles sont les catégories d’information sur lesquelles une collecte s’opère, pour quelles raisons celle-ci a lieu et quelles sont les options qui sont éventuellement données à l’internaute.
Le site renseigne aussi, via un menu horizontal, d’autres informations : y a-t-il un partage avec des tiers ? De quelle façon la sécurité des données est évoquée ? Qu’en est-il de la rétention des données ? Y a-t-il des dispositions pour certaines catégories du public ? Quels sont les choix laissés à l’internaute ? Est-il possible d’éditer ses propres données ? Quelle est la nature des modifications aux CGU ?
L’outil dispose aussi d’un agent conversationnel qui vise à répondre à des questions plus spécifiques mais selon Wired, qui s’est chargé de le tester, son fonctionnement n’est pas encore à un niveau suffisamment satisfaisant : des questions ont été mal interprétées, estime le magazine, et certaines réponses mériteraient d’être simplifiées, plutôt que de citer des blocs de texte tirés des CGU.
Il n’en demeure pas moins que l’initiative reste pertinente et apporte une réponse, bien qu’imparfaite, au problème du désintérêt du public pour les CGU. Bien sûr, le programme a certaines limites et il ne traite pas chaque portion des documents, mais seulement celles qui sont les plus intéressantes et les plus significatives pour éclairer l’internaute.
Trop long ; pas lu
Ce projet rappelle une initiative qui existe depuis plusieurs années déjà, Terms of Service;Didn’t Read. Il s’agit d’un site web, dont le nom ToS;DR est une référence à l’expression « Too Long;Didn’t Read » (TL;DR, c’est-à-dire « trop long ; pas lu »), qui est parfois lâchée par l’internaute renonçant à lire un texte trop long ou par une personne qui le résume en quelques lignes.
Sur ToS;DR, il est possible voir d’un rapide coup d’œil la qualité des conditions générales d’utilisation du point de vue de l’intérêt des internautes. En effet, les sites examinés se voient attribuer une note générale allant de A (très bien) à E (très mauvais) et, à chaque fois, une liste des principaux points positifs ou négatifs à retenir. Le site indique toutefois avoir des informations obsolètes et entend les actualiser bientôt.
Parmi les sites évalués, on retrouve les ténors du web, comme Facebook, Google, Yahoo, Wikipédia, Twitter, Flickr, Skype, SoundCloud, GitHub, Instagram, Twitpic, Delicious, 500px, Steam, DuckDuckGo, LinkedIn, Microsoft, MySpace, Netflix, Amazon, Apple ou Dropbox. À noter que si certains sites n’ont pas reçu de note globale, certaines de leurs dispositions restent évaluées au cas par cas.
Il y a quelques années, des parlementaires californiens avaient même envisagé d’obliger par la loi les entreprises à simplifier et raccourcir drastiquement ces documents, avec une limite à cent mots. Ce projet audacieux n’a toutefois, à notre connaissance, pas débouché sur une adoption de la mesure. Mais l’idée, si elle n’a plus été vraiment évoquée depuis, pourrait un jour revenir sur le devant de la scène.
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