Il y a quelques jours, Numerama rapportait les conclusion d'un rapport de l'ONU, qui fait du chiffrement des données un droit de l'homme, en vertu du droit des individus au respect de leur vie privée, laquelle est parfois indispensable à la jouissance de la liberté d'expression. Il est des cas où l'on ne sent libre de s'exprimer que lorsque l'on sait que l'on ne pourra pas être identifié. Il en est de même pour la liberté de correspondance ; on ne sent parfois libre de communiquer avec un correspondant que lorsque l'on a la conviction que les échanges ne seront pas interceptés et lus par des tiers.
Mais il est un autre aspect passé plus inaperçu du rapport, qui va totalement à contre-courant des exigences des Etats de mettre la priorité sur la sécurité en donnant aux enquêteurs les moyens d'enquêter. Le Rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection de la liberté d'opinion et d'expression, David Kaye, demande en effet que les internautes et les utilisateurs de services de téléphonie mobile puissent se connecter au réseau de façon anonyme, sans avoir à livrer leur véritable identité.
"L'interdiction de l'anonymat en ligne interfère avec le droit à la liberté d'expression", condamne David Kaye, qui remarque que "beaucoup d'États l'interdisent indépendamment de tout intérêt spécifique pour le gouvernement". S'il parle d'abord de situations dans lesquelles les législations imposent aux sites internet de recueillir l'identité réelle d'internautes qui publient des contenus sur internet, le Rapporteur spécial de l'ONU évoque aussi la question de l'anonymat de la connexion aux réseaux, qu'il s'agisse de devoir fournir une carte d'identité pour utiliser un ordinateur dans un cybercafé, ou de communiquer son nom et son adresse pour avoir un accès à internet ou un forfait mobile.
L'ANONYMAT EST UN DROIT, MÊME EN FRANCE
"Les gouvernements exigent souvent des enregistrements de cartes SIM" avec l'identité réelle, alors que "de telles politiques minent l'anonymat, particulièrement pour ceux qui accèdent à internet uniquement à travers la technologie mobile".
"L'enregistrement obligatoire de la carte SIM pourrait fournir aux gouvernements la capacité de surveiller des individus et des journalistes bien au delà de l'intérêt légitime d'un gouvernement".
En France, le code des postes et communications électronique impose aux opérateurs de conserver "les informations permettant d'identifier l'utilisateur", ce qui est compris (à tort ?) comme une obligation implicite de s'assurer de l'identité réelle d'un client avant de l'autoriser à se connecter à un réseau de télécommunications. Le principe est vécu comme une évidence telle qu'il sous-tend la loi Hadopi, qui permet de condamner pénalement le titulaire de l'accès à internet utilisé pour pirater, qui aurait fait preuve de négligence caractérisée dans la mise en oeuvre des moyens de sécurisation. Mais rien n'oblige formellement les opérateurs à recueillir l'identité réelle de l'internet.
S'ils le font pour pouvoir facturer les clients, la question se pose s'agissant des cartes SIM prépayées et autres accès sans fil gratuits. Il semble que c'est par excès de zèle que les opérateurs prennent copie de cartes d'identité ou autres passeports.
La CNIL le rappelle d'ailleurs dans sa fiche pratique concernant les cybercafés et autres hot-spots Wi-Fi : "Le cybercafé en question n’est pas obligé de relever et de conserver l’identité de ses clients pour fournir une connexion (ex : accès wifi ouvert). Il doit uniquement conserver les données techniques de connexion. En revanche, s’il fait le choix de procéder à l’identification préalable des utilisateurs, en leur faisant remplir une fiche d’inscription par exemple, il a l’obligation de conserver ces données pendant un an".
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