Jusqu'à présent hostile à la concentration dans le secteur des télécoms, Emmanuel Macron tempère sa position. S'il reste perplexe à l'idée d'un retour à trois opérateurs en France, qui aurait selon lui un effet négatif sur l'investissement et l'emploi, le ministre s'est montré moins intransigeant que par le passé.

C'est un changement de ton discret, mais un changement de ton quand même. Alors qu'il affichait il y a encore quelques semaines son hostilité à l'idée d'une consolidation du marché des télécoms en France, Emmanuel Macron a finalement changé de discours à la suite de l'annonce surprise de SFR-Numericable, qui propose de croquer Bouygues Télécom pour plus de10 milliards d'euros.

Placé devant le fait accompli, le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique maintient toutefois ses réserves sur l'intérêt d'un retour à trois opérateurs dans la téléphonie mobile. "Il faut qu’on m’explique ce que ça apporte à l’investissement, ce que ça apporte à l’emploi, ce que ça apporte au consommateur français".

Estimant avoir "à ce stade […] plutôt un doute" sur la pertinence d'une opération de cette nature, qui sera par ailleurs très largement financée par de l'endettement supplémentaire, Emmanuel Macron est néanmoins prêt à entendre les arguments avancés par Patrick Drahi, le PDG du consortium luxembourgeois Altice, qui est actionnaire majoritaire dans SFR-Numericable.

Les doutes du ministre gravitent essentiellement autour de deux sujets : l'investissement et l'emploi.

Concernant l'investissement dans les réseaux, qui est considéré comme une "priorité" par le gouvernement, Emmanuel Macron attend qu'on lui fasse la démonstration que l'absorption de Bouygues Télécom aura des répercussions favorables.

Car pour l'instant, les efforts de SFR-Numericable dans ce domaine sont plutôt limités, ce qui ne plaide évidemment pas en faveur d'une concentration accrue dans les télécoms. "J'ai regardé ce qu'a donné le deal SFR-Numericable, on a plutôt pris du retard en termes d'investissement, je préfère d'abord qu'on stabilise une opération qu'on a menée il y a 18 mois et qu’on regarde ce qu'elle donne".

Quant à l'emploi, Emmanuel Macron craint que des destructions de poste au prétexte de la synergie entre les différentes entités du futur géant des télécoms. " On sait ce que ça veut dire des synergies, soit on fera moins d’investissements, soit on va détruire des emplois […], soit on va remonter les prix parce qu’on sera à trois et pas à quatre et qu’il y aura moins de concurrence".

Le rapprochement entre SFR, Numericable et Bouygues Télécom ne fait pas forcément les affaires de l'État, au moins à court terme. En effet, celui-ci survient au moment où des enchères vont bientôt avoir lieu pour attribuer des blocs de fréquences 700 MHz, Avec un candidat en moins et un autre lourdement endetté, le niveau des enchères pourrait être moins élevé que prévu.

Reste à savoir si ce grand mouvement parviendra à franchir l'obstacle de l'autorité de la concurrence, qui n'est pas du tout favorable à la concentration dans le secteur des télécoms.

( photo : CC BY LeWeb )

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