Asus n’a jamais cessé d’être une référence sur le marché du jeu vidéo PC. Des cartes graphiques aux cartes mères en passant par des ordinateurs portables ou des écrans qui font l’unanimité (et qui équipent assez majoritairement la rédaction), la gamme ROG est synonyme d’extrême qualité.
Le 4 juin, Asus a profité de l’événement taïwanais du Computex pour dévoiler la première déclinaison de sa stratégie gagnante sur un format mobile. Sous vos applaudissements, voici le ROG Phone :
- Écran : 6 pouces AMOLED Full HD+ 90 Hz (2160 x 1080 pixels)
- SoC : Snapdragon 845 à 2,96 GHz
- RAM : 8 Go LPDDR4
- Stockage : 128 ou 512 Go
- Batterie : 4 000 mAh (Quick Charge 4.0)
- Système d’exploitation : Android 8.1 Oreo
- Connectique : USB C 3.1, prise jack, Wi-Fi 802.11 n/ac/ad, Bluetooth 5.0
Pourquoi c’est top
Sur le papier, on se retrouve donc avec un smartphone dopé aux hormones, puissant comme il faut et dont l’écran 90 Hz pourrait faire rêver les joueuses et les joueurs autant que les iPad Pro et Razer Phone l’ont fait par le passé.
À cela, Asus ajoute pléthore d’accessoires compatibles avec l’engin : un dock qui lui permet de se connecter à un écran, un clavier et une souris pour se transformer en simili-PC, un deuxième écran avec batterie supplémentaire pour transformer l’appareil en console portable qui ressemble à une Nintendo 3DS ou une Shield et un module de refroidissement actif qui permet des sessions de jeux prolongées sans surchauffe — les plus avertis auront noté que le processeur est overclocké, un Snapdragon 845 de Qualcomm tournant normalement à 2,8 GHz.
Les premières prises en main évoquent un smartphone très agréable à utiliser, dont les bords ont été transformés en gâchettes, ce qui permet un accès plaisant à des fonctionnalités de tir, notamment dans les FPS / TPS. Le rafraîchissement à 90 Hz de l’écran est appréciable pour la fluidité de l’ensemble et les accessoires semblent avoir été bien intégrés au smartphone.
Aucun doute, le ROG Phone touche une niche d’utilisateurs sous Android, mais tente de la caresser dans le sens du poil sans commettre la moindre erreur. Disponible en fin d’année, le ROG Phone saura sans aucun doute trouver le pied de quelques sapins — à un prix non communiqué, comme celui des accessoires.
Pourquoi cela pourrait être un flop
Et pourtant, stratégiquement, on ne peut s’empêcher de voir qu’Asus répète les erreurs de tous ceux qui se sont essayés à ces modèles ultra-niche. Tout d’abord, évoquons le smartphone en lui-même : une sortie pour la fin d’année, c’est l’assurance que la course à la performance aura rattrapé le modèle d’ici là. Les prochains iPhone seront sortis, le prochain Galaxy Note aura repoussé la puissance côté appareils mainstream et peut-être que d’autres constructeurs, comme Razer, auront eu le temps de s’aligner. Annoncer un produit si tôt par rapport à sa commercialisation est une erreur à laquelle, malheureusement, nous habitue Asus année après année.
Ensuite, il y a l’écosystème. Aucun constructeur n’a réussi à créer suffisamment d’engouement auprès du grand public pour vendre un smartphone en kit. S’essayer à ce concept en ne ciblant qu’une niche semble être un pari commercial osé. L’écosystème Android, non unifié, n’est pas des plus aidant : vous achetez un smartphone haut de gamme qui va être suivi quelques années tout au plus, avec des accessoires hors de prix qui seront probablement incompatibles avec les générations suivantes. On est très loin de l’univers Apple, pour lequel un constructeur tiers peut engager des ressources et connaître immédiatement son retour sur investissement possible, avec des millions d’appareils compatibles déjà dans les mains des utilisateurs.
Côté fonctionnalités en plus, il faudra aussi un travail des développeurs afin qu’ils prennent en charge les différents boutons non standard ou les accessoires. Un Nintendo conçoit ses jeux pour 3DS avec deux écrans en tête dès les premières minutes de développement. Pourquoi un développeur de jeu vidéo mobile prendrait-il le temps de développer une version ROG Phone de son titre sans savoir combien de joueurs seront dessus ? Quid également des avantages que fournirait un tel matériel, par exemple sur un jeu populaire comme Fortnite qui pourrait afficher des informations que d’autres joueurs ne verraient pas ?
Enfin, si l’idée du smartphone convertible en PC est bonne et fait de plus en plus de chemin, portée aussi bien par des géants que par des outsiders, on a du mal à voir quel public elle toucherait dans le jeu vidéo. A-t-on vraiment envie de connecter un smartphone à un écran de 27 pouces pour jouer à un clone F2P d’un jeu disponible sur PC ou console, dont les contrôles n’ont en plus pas été pensés pour ça ? C’est oublier que la plateforme compte beaucoup dans les choix de gameplay et qu’on ne joue pas de la même manière sur un écran tactile, avec un pad ou un duo clavier/souris en mains. Tout le monde se souvient de la Ouya, qui espérait que le grand public aimerait jouer à Angry Birds avec une manette.
Du cloud gaming ou rien
À la limite, un partenariat avec un acteur comme Shadow pourrait donner de la pertinence à l’ensemble, proposant du cloud gaming de jeux PC sur un appareil portable faisant office de réceptacle idoine.
Malgré toutes les bonnes intentions, on a du mal à voir comment ce ROG Phone pourrait trouver une place sur le secteur des smartphones haut de gamme contemporains — aux côtés, par exemple, des excellents Zenfone. Un constat valable pour tous les appareils en kit un peu trop en décalage par rapport aux réalités du marché qu’ils ambitionnent de conquérir.
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