Facebook est accusé d’avoir mis en place un système de ciblage publicitaire qui permet de ne pas montrer ses offres d’emplois à certaines catégories de population, comme les femmes, ou les personnes de couleur.

Facebook participe-t-il à discriminer les femmes et les minorités dans le monde du travail ? C’est en tout cas ce qu’affirme l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU). Dans un article publié le 18 septembre sur son site, l’association qui a porté plainte, explique que les techniques de ciblage publicitaire développées par le réseau social accentuent ces inégalités, puisqu’elles permettent de ne proposer des offres d’emplois qu’à des catégories bien définies de la population.

Une « forme de discrimination archaïque »

Sur Facebook comme sur d’autres plateformes, les annonceurs peuvent choisir à qui ils veulent adresser leurs publicités. Ils ont ainsi le droit par exemple d’en sélectionner le sexe, l’âge, la langue, ou les centres d’intérêt.

Grâce à ces critères, regrette l’ACLU, les entreprises proposant des offres d’emplois peuvent aisément exclure des catégories d’utilisateurs, et faire en sorte qu’elles n’entendent pas parler de leur annonce.

Voici les critères que peuvent utiliser les annonceurs pour leur ciblage publicitaire. // Source : Capture d'écran / Numerama

Voici les critères que peuvent utiliser les annonceurs pour leur ciblage publicitaire.

Source : Capture d'écran / Numerama

« Nous ne pouvons pas laisser cette forme de discrimination archaïque se poursuivre, écrit l’association. C’est pourquoi mardi, l’ACLU, [le syndicat de travailleurs] Communications Workers of America et [l’entreprise de défense des travailleurs] Outten & Golden LLP ont déposé une plainte contre Facebook et dix entreprises qui ciblaient avec leurs offres d’emplois des domaines principalement masculins [et] jeunes, excluant toutes les femmes et personnes non-binaires, ainsi que les utilisateurs hommes plus âgés.»

Sur Internet, la loi contre les discriminations est la même

Les plaignants estiment que ces sélections sont contraires à la loi, qui interdit toute discrimination basée sur le genre ou l’âge au travail.

A cette discrimination « explicite » s’ajoute par ailleurs une autre fonctionnalité jugée problématique. Elle s’appelle « Lookalike targeting » (audiences similaires en français), et permet aux entreprises de cibler des clients potentiels qui ont des caractéristiques communes avec leurs clients déjà identifiés.

« Pour comprendre pourquoi cela pose problème dans un contexte d’emploi, détaille l’association, considérons une entreprise avec des employés tous blancs, qui décide de recruter et d’embaucher uniquement des candidats qui ressemblent aux employés actuels. Une telle stratégie perpétuerait pleinement l’exclusion de travailleurs de couleurs.»

L’ACLU regrette finalement que les règles qui valent aux États-Unis ne semblent pas être aussi strictes lorsqu’il s’agit d’une plateforme en ligne ou des annonces postées sur un journal papier par exemple.

Les efforts de Facebook jugés insuffisants par l’ACLU

La responsabilité de Facebook pourra-t-elle être engagée ? Ce sera à la justice d’en décider, mais l’association américaine semble confiante. Si les plateformes d’hébergement de contenus ne sont pas responsables (sauf en cas de signalement) des contenus illicites qu’elles accueillent, l’ACLU estime que Facebook a cette cette fois fait « bien plus » que simplement héberger, et qu’elle a été l’un des acteurs de cette discrimination.

Elle dit avoir alerté Facebook à plusieurs reprises ces dernières années, avec un succès mitigé. Le réseau social de Mark Zuckerberg a bien pris récemment des mesures en matière de lutte contre les discriminations.

Le réseau social a récemment pris des mesures en matière de lutte contre les discriminations.

Celle qui assure dans son règlement proscrire la discrimination effectuée grâce à ses outils a par exemple interdit le ciblage par mots-clés de personnes antisémites en septembre 2017, et suspendu à la fin de cette même année le ciblage par origine ethnique.

Cela n’empêche pas des annonceurs d’utiliser des techniques moins directes. Par exemple, au lieu de cibler des personnes d’origine amérindienne, ils vont cibler celles qui aiment des pages qui laissent penser qu’ils le sont…

Le ciblage publicitaire reste un pilier du modèle économique de Facebook. L’entreprise tire la grande majorité de ses revenus des annonces, soit 97 % de son chiffre d’affaire.

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