« Nous savons combien la protection de votre vie privée est importante pour vous », déclare Diya Jolly, vice-présidente produit, sur la scène de la conférence annuelle de Google le 9 octobre 2018. Derrière elle se trouve le nouveau produit de la firme américaine, le Google Home Hub, une enceinte connectée reliée à une petite tablette tactile — ou un cadre photo connecté, au choix.
Mais ce n’est pas un produit classique : à la place de l’orifice où se logerait traditionnellement une caméra, il n’y a rien. La nouvelle enceinte tactile de Google n’a pas de webcam. Et c’est une grande différence avec les autres appareils similaires sur le marché.
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La perte de confiance des utilisateurs
L’argument de Google est, pour le moins, efficace : s’il n’y a pas de webcam, on ne peut pas vous filmer à votre insu. Logique, mais radicale, cette décision est très parlante sur la perte de confiance des utilisateurs vis-à-vis des géants américains des nouvelles technologies, et la méfiance envers les nouveaux objets connectés du quotidien, qui pousse désormais l’industrie à modifier ses propres produits.
La veille de la présentation Google, c’est Facebook qui dévoilait le 8 octobre 2018 son propre appareil connecté à écran tactile appelé Portal et destiné à la visioconférence. Mais tout a été fait pour limiter la crainte des utilisateurs : l’objet a été affublé d’un petit cache en cuir spécifiquement conçu pour oblitérer le champ de la caméra lorsque vous ne l’utilisez pas. Plus radical que tous ses concurrents (et moins digne de confiance également), Facebook a même poussé la privacy à un degré supplémentaire : le bouton qui couple la webcam et le micro déconnecte physiquement ces composants du reste du circuit, ce qui les rend inaccessibles… même pour un éventuel pirate.
Encore plus parlant : l’enceinte Portal de Facebook ne permettra même pas de se connecter à Facebook. Elle fonctionnera uniquement via Messenger et Portal — preuve que le scandale Cambridge Analytica et la collecte de données sans l’accord de millions d’utilisateurs a durablement marqué les esprits. « Le Portal est une nouvelle tablette élégante avec un écran qui rend vos conversations avec votre famille et vos amis très belles. Il a juste un problème : il a été fabriqué par Mark Zuckerberg », décrit ainsi le Washington Post.
De la peur collective d’être espionnés
S’il n’y a, à ce jour, jamais eu de scandale concernant l’espionnage par webcam, c’est une peur inscrite dans l’inconscient collectif depuis des années, notamment parce qu’elle a été beaucoup utilisée dans la fiction. Dans un récent épisode de Black Mirror saison 3 intitulé Tais toi et danse, un jeune homme se fait par exemple manipuler par des hackers qui ont enregistré le flux de sa webcam lorsqu’il se masturbait devant son ordinateur.
Depuis leur apparition en 2014, les enceintes connectées audio comme le HomePod d’Apple, l’Echo d’Amazon ou le Google Home sont elles aussi soupçonnées par le grand public d’être en capacité de les écouter à leur insu. Et ce, même si le micro n’est pas actif avant la prononciation de la phrase de passe et qu’elles disposent d’un bouton rouge « mute » qui garantit que le micro est complètement désactivé.
Google s’assure que ses clients n’auront pas peur
Mais il faut pour cela faire confiance aux multinationales. Car même si celles-ci n’ont aucun intérêt à permettre le moindre piratage venant de l’extérieur ou à espionner directement les utilisateurs, elles ont elles-mêmes eu recours à d’autres pratiques, notamment publicitaires, qui ont fragilisé leur relation avec les utilisateurs. En retirant toute caméra de son Home Hub, Google s’assure donc que ses clients n’auront pas peur — mais aussi qu’ils n’hésiteront pas à intégrer cette tablette-enceinte au plus près de leur intimité, par exemple sur une table de chevet.
À l’inverse, un Amazon Echo Show ou un Echo Spot (disponible en France) disposent d’une caméra frontale qui pourrait facilement devenir source de paranoïa une fois l’objet déposé sur votre table de nuit, avec une vision impeccable sur votre lit. Pour les plus méfiants, il restera toujours les petits bouts de post-it.
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