Il y a quelques mois, nous avons vu avec étonnement Samsung se lancer sur le marché du cinéma professionnel. Déjà très présent sur le marché grand public avec ses téléviseurs répartis dans une large gamme, le constructeur coréen est prêt à faire comprendre aux exploitants qu’il serait temps de remplacer les vieillissants vidéoprojecteurs numériques. Pas avec un autre vidéoprojecteur flambant neuf, mais plutôt avec un écran LED immense baptisé Onyx.
Samsung ne répond pas seulement à la problématique, bien connue des propriétaires de rétroprojecteurs, du renouvellement. Sa solution offrirait surtout un rendu bien meilleur.
Nous nous sommes donc rendus chez Éclair, premier laboratoire européen à accueillir un Onyx, pour apprécier les qualités de ce produit ambitieux et qui semble déjà toucher sa cible, à en croire Samsung. Le géant de la tech tient néanmoins à faire montre de prudence : il se doute bien qu’il n’équipera pas tous les cinémas du jour au lendemain. Dans un premier temps, ses écrans prendront place dans des salles premium.
L’Onyx n’est pas un téléviseur agrandi
On pourrait croire naïvement que Samsung a pris son meilleur téléviseur — à savoir un QLED — et l’a agrandi jusqu’à atteindre des diagonales de 228 pouces (2K), 455 pouces (4K) ou 607 pouces (4K). Le Onyx est un écran pensé pour s’adapter de A à Z aux normes et aux exigences du cinéma. Il se base sur une technologie éprouvée, à savoir le LED SMD, déjà à l’œuvre sur les panneaux lumineux que l’on peut trouver par exemple à Time Square. Elle a la particularité d’être auto-émissive, ce qui signifie que les pixels peuvent s’éteindre complétement comme avec l’OLED. Traduction : il n’y a pas de rétroéclairage. Par conséquent, les noirs sont vraiment noirs. Elle dispose par ailleurs d’une luminance bien supérieure à la vidéoprojection (500 candelas pour le Onyx, contre 48).
Bizarrement, Samsung n’a pas fait appel à la technologie parente MicroLED, présentée avec The Wall au CES 2018 et qu’il commercialise depuis septembre. La justification est technique : sur de telles diagonales, le MicroLED atteindrait des résolutions inouïes, bien supérieures à la 4K et donc inadaptées. Il y a aussi une question de coût : déjà plus cher qu’un vidéoprojecteur, le Onyx le serait bien davantage dans cette configuration.
« Notre écran fera revenir les gens »
Soulignons d’abord un point important, surtout aux yeux des puristes : non, le Onyx ne trahit pas l’expérience cinématographique. On aurait pu s’attendre à une image comme on la trouve à la maison : volontairement tape-à-l’œil et brillante. Là c’est finalement avec une sobriété très bienvenue que s’exprime l’écran de Samsung. Ainsi, l’aspect granuleux n’est pas effacé et on retrouve ces saccades tant chéries des réalisateurs. Ce respect, qui constitue la première approche, était essentiel.
Du coté des apports, le Onyx est effectivement une rupture avec ce que nous connaissons aujourd’hui. Quand on va au cinéma, on s’est inconsciemment habitués à apprécier un rendu moins joli que chez soi. Un constat lié à une évolution technologique sans précédent sur le marché des téléviseurs, qui délivrent de bien plus belles images que les vidéoprojecteurs vieillissants (sauf dans certaines salles premium). Avec le Onyx, finis les noirs grisés et les blancs jaunis ou bleutés. Effectivement, sur les extraits que nous avons visionnés, les noirs étaient d’une profondeur incroyable, les couleurs s’exprimaient bien mieux et les contrastes respiraient. L’évolution est notable et la dynamique générale en ressort grandie, quitte à éblouir celles et ceux qui ne seraient pas encore habitués au HDR.
Fini les noirs grisés ou les blancs jaunis
Tous ces bienfaits ne sont pas inhibés par les désagréments que l’on pourrait craindre d’un écran. On s’est volontairement mis sur un côté pour mettre à mal l’angle de vision et apercevoir des dérives quand on n’est pas dans l’axe. Raté. Et quand on a cherché des petits défauts, on a juste entraperçu un léger — mais vraiment léger — blooming* sur une séquence bien particulière : un cosmonaute à la tenue très blanche sur un fond spatial très noir. Il n’est pas certain que le grand public sera aussi pointilleux. En revanche, il devrait apprécier ce spectacle retrouvé, nécessitant néanmoins que les contenus soient retravaillés en post-production pour que le Onyx exprime tout son potentiel.
La partie sonore, quant à elle, est assurée par Harman, qui fait appel à la marque JBL et à un jeu de projection sonore pour pallier le défaut structurel de l’Onyx : contrairement à une toile de projection, il ne laisse pas passer le son. Sur ce critère, Samsung devrait peut-être s’inspirer de l’Acoustic Surface des téléviseurs OLED Sony.
« Notre écran ne fera pas venir les gens [ce sont les films NDLR], mais les fera revenir », nous explique Thomas Kayata, Key Account Manager pour le département LED Display chez Samsung.
*Blooming : phénomène se matérialisant par un halo désagréable autour d’une source lumineuse sur un fond très sombre (exemple : des sous-titres blancs sur une bande noire)
De nouveaux usages
L’installation d’un Onyx, dont la durée de vie devrait être supérieure à 10 ans, n’aura rien de sorcier. Il est composé de cabinets à assembler, remplaçables en quelques minutes en cas de souci technique. Mieux, il devrait permettre aux exploitants de repenser différemment leurs salles, qui n’auront plus besoin d’une cabine de projection ou de prévoir une configuration des places en gradins. Ils pourront en outre organiser d’autres types de projection, s’éloigner du Septième Art pour toucher d’autres domaines. Le Onyx, contrairement à un vidéprojecteur, n’a pas besoin d’être plongé dans le noir complet pour produire une belle image : ainsi, des retranscriptions eSport ou des spectacles nécessitant des éclairages sont envisageables.
Avec un peu de chance, le Onyx permettra de dépasser certaines contraintes dans la production des films, où les caméras captent tout, mais dont les choix artistiques sont parfois dictés par les limites de la vidéoprojection (notamment du côté de la luminosité). Samsung estime même que les chefs opérateurs auront l’occasion de revoir leur manière de travailler certains plans, en particuliers ceux qui sont dans la pénombre. Sur l’écran, les détails ne s’y noieraient plus.
Malgré nos premières réticences (on s’attendait à voir une simple télé agrandie), nos quelques minutes en face d’un Onyx nous ont rassurés sur ses capacités. Il restera à voir dans quelle mesure et à quel rythme les cinémas voudront remplacer la vidéoprojection. On attendra enfin de voir le prix, un élément sur lequel Samsung n’a pas d’influence. À première vue, une séance Onyx ne devrait pas coûter plus cher qu’une place normale. Elle n’offrira pas un surplus d’expérience comme l’IMAX ou la 4DX, simplement une restitution plus fidèle.
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