Au revoir M. Renaud Donnedieu de Vabres. Critiqué de toutes parts, aussi bien par le public que par les professionnels, le ministre de la Culture devrait selon toutes vraisemblances céder son bureau de la rue de Valois à Christine Albanel, une héritière de la Chiraquie. Pas sûr qu’elle fasse davantage l’unanimité.

Ainsi donc s’en va Renaud Donnedieu de Vabres, alors qu’il répétait encore il y a quelques semaines qu’il souhaitait rempiler pour un nouveau mandat. Qui s’étonnera de cette éviction ? Nous avons beaucoup eu l’occasion de le répéter depuis sa nomination, Renaud Donnedieu de Vabres était un ministre nul, voire incompétent. Ca n’est pas nous le disons (même si…), mais Jean-Louis Debré, ou même les cadres de l’industrie culturelle qu’il a pourtant servi avec fidélité et aveuglement.

Pour ne parler que du sujet qui nous concerne, les médias numériques et le droit d’auteur, Renaud Donnedieu de Vabres laisse derrière lui un bilan plus que mauvais. Avec sa loi sur les droits d’auteurs et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI), la situation juridique est encore plus floue qu’auparavant. Parce que sa loi n’a rien affirmé mais a tenté de concilier l’inconciliable, on ne sait plus s’il existe ou non un droit à la copie privée et quelles sont ses limites. On ne sait pas pas quels sont les droits et les devoirs en matière d’interopérabilité. On ne sait plus s’il est légal ou non en France d’éditer un logiciel de P2P sans imposer de filtres. On ne sait pas quelles sont les sanctions qui seront appliquées en cas de téléchargement et de mises à dispositions d’œuvres sur Internet. On ne sait même plus très bien s’il est légal pour une plate-forme de VOD de s’affranchir d’une chronologie des médias qu’il n’a pas réussi à renouveler. Nous pourrions ainsi multiplier les exemples d’insécurités juridiques qui ont été aggravées ou créées de toute pièce sous l’ère DDV.

Il laisse derrière lui un champ de ruine législatif et un climat de quasi guerre civile entre le public et les professionnels de la culture. Au point que ces derniers doivent désormais ramer eux-mêmes pour renouer le dialogue, tant le ministre n’a pas su jouer son rôle de médiateur, de filtre.

C’est dans ce climat que Christine Albanel devrait entrer en fonction rue de Valois, si les rumeurs sur sa nomination devaient se confirmer vendredi. « Ce qui constitue au moins une bonne nouvelle car cela signifierait le départ de Renaud Donnedieu de Vabres, l’un des plus mauvais ministres à ce poste, l’un des plus sectaires aussi, auteur d’une chasse aux sorcières d’un autre temps », commente La Tribune de l’Art.

A bientôt 52 ans, Mme Albanel n’est pourtant pas la mieux reçue dans le domaine culturel. Agrégée de lettres modernes, Christine Albanel est une amie de longue date de Nicolas Sarkozy, mais a été la « plume » de Jacques Chirac dans toutes ses fonctions politiques de premier plan (premier ministre, maire de Paris, Président de la République) y compris lorsque le nouveau président de la République l’avait trahi pour rejoindre Baladur. Elle a été parachutée à la tête du Château de Versailles en 2003, ce qui avait beaucoup énervé, et énerve encore. Ni scientifique ni conservatrice, elle avait ainsi ravi la place d’éminents spécialistes et soulevé jalousies et inquiétudes.

Un article à charge de la Tribune de l’Art démontre comment la gestion de Christine Albanel a renforcé la tendance à faire du domaine des Rois de France un parc d’attraction, quitte à tromper l’Histoire ou, pire, à contribuer à une détérioriation toujours plus importante de certains lieux et de certaines œuvres. En novembre, elle avait même osé organisé un show du couturier Christian Lacroix… à l’intérieur de la Chapelle de Versailles. Soulevant la colère de l’évêque des lieux, mais aussi du maire, de l’ancien maire, de la population…. Vu l’opposition générale, il y aurait certainement « des manifestations et peut-être des échauffourées, chose peu souhaitable dans un lieu aussi précieux que le château », avaient prévenu les élus locaux. Pas grave, répondait Mme Lebanel : « le château est assuré ». Tout un esprit.

Toutefois, note avec espoir le magazine en ligne, « on peut souhaiter qu’elle se montre plus ouverte à la critique que son prédécesseur ». « Il reste à espérer que sa nouvelle fonction (si elle est confirmée) la transcende », ajoutent-ils.

En attendant de pouvoir juger sur pièce, ça n’est semble-t-il pas une amoureuse des arts et des lettres qui s’installera demain au ministère de la Culture, mais une femme habituée à manier la culture par les chiffres et le spectaculaire. Au moins, on aura évité la fusion du ministère de la culture avec le ministère de l’industrie. Pour combien de temps encore ?

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