La presse se fait l’écho depuis hier de l’annonce par Google de l’arrivée prochaine de YouTube en Français. Est-ce un si grand évènement pour un site de partage vidéo déjà extrêmement populaire dans l’hexagone ? Oui et non…

Logo YouTubeSelon les Echos, Eric Shmidt pourrait annoncer le 19 juin prochain, lors de sa prochaine visite en France, la localisation de YouTube. Pour faire face à la concurrence locale de DailyMotion (26 % de parts de marché en France contre 23 % pour YouTube) et au succès de son rival et partenaire MySpace, YouTube devrait être ainsi traduit en Français. En soit, c’est un non évènement. Il semblait d’ailleurs assez étrange à première vue qu’un site de l’importance de YouTube, avec Google en soutien financier et logistique, ne soit pas disponible dans la langue de Francis Lalanne.

Mais il y a deux raisons pour expliquer la lenteur et la prudence avec laquelle le géant de Mountain View met ses équipes de traduction au travail sur YouTube.

Il y a d’abord une raison pratique, qui est la disponibilité de contenus français. Alors que Dailymotion a évidemment attiré beaucoup de contenus francophones, YouTube reste une communauté très polyglotte avec une forte prédominance de contenus anglophones. Pour un lancement français, il faut donc commencer par valoriser les contenus dans la langue de l’utilisateur. Ca passe aussi par des accords locaux de partage de revenus avec des producteurs de contenus, à l’image des partenariats signés aux Etats-Unis avec Warner, la NBA, la BBC, etc. France Télévisions aurait ainsi donné son accord pour des contenus de France 4, tandis que Canal +, TF1 et M6 seraient en négociation. Sachant que TF1 et DailyMotion sont dans des relations étroites de partenariat (notamment par WAT, qui est géré par DM), les négociations doivent être assez tendues. M6 est quant à elle en relation avec Kewego, qui gère le site Wideo.fr.

La deuxième raison, qui est beaucoup plus officieuse mais liée à la première, est juridique. Traduire un site n’est pas sans conséquence sur le plan juridique, puisque les tribunaux s’accordent maintenant à définir un faisceau d’indices pour déterminer si un site peut ou non être placé sous la compétence juridictionnelle d’un pays en cas d’action judiciaire. La localisation dans une langue est un critère très fort pour qu’un juge se donne compétence. Le fait de traduire en français est en effet un signe que le site vise des Français, et qu’il exerce donc sur le territoire français, sous les lois françaises (même virtuellement). C’est d’ailleurs ce raisonnement qui nous a poussé à dire dès 2004 que AllofMP3 est bien légal en Russie pour les Russes, mais qu’il n’est pas légal en France pour les Français lorsque l’éditeur propose une traduction.
Or pour un site comme YouTube, qui héberge par dizaines de milliers des vidéos sans autorisation, la compétence juridictionnelle de la France n’est pas un détail. Surtout au « pays du droit d’auteur ». Nombre de producteurs de contenus en France n’attendent probablement que cela pour déposer plainte à Paris.

C’est sans doute pour cela que la France servira de cobaye aux localisations, avant que la traduction ne s’étende d’abord à l’Allemagne puis au reste de l’Europe.

Confirmation le 19 juin, peut-être.

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