Les droits de douane appliqués par les États-Unis sur les biens importés de Chine sont devenus insoutenables pour Google, ou sont en passe de l’être. Le 15 juin, un nouveau taux à 25 %, contre 10 % aujourd’hui, entrera en vigueur. Aussi la firme de Mountain View a-t-elle pris la décision de déplacer sa production des produits Nest dans d’autres pays pour échapper à ces coûts supplémentaires.
Fondée en 2010 et rachetée par Google en 2014, Nest est une société spécialisée dans les appareils connectés : elle vend des caméras, des thermostats, des sonnettes ou encore des détecteurs de fumée.
Jusqu’à présent, Google avait deux possibilités : soit absorber ce surcoût pour éviter un renchérissement des prix, soit le répercuter sur le prix de vente (ou, éventuellement, un mélange des deux). Mais les marges de manœuvre qui existaient lorsque le taux était encore relativement raisonnable disparaissent complètement quand celui-ci atteint un quart de la valeur du produit.
Dès lors, la guerre commerciale que se livrent les États-Unis et la Chine est susceptible de rebattre les cartes de la mondialisation si elle persiste. Certes, les grands équilibres n’ont pas encore connu de bouleversement radical, mais force est de constater que la place de la Chine comme « atelier du monde » s’effrite : avec des droits de douane excessifs, l’heure est à l’exode pour un nombre croissant d’entreprises.
Google, donc, est en train de déplacer la production de ses appareils connectés vendus sous la marque Nest, rapporte Bloomberg. En tout cas, celle qui est destinée au marché américain. Dans ce processus, deux pays tirent leur épingle du jeu : Taïwan et la Malaisie. Ce sont leurs chaînes industrielles qui alimenteront les États-Unis à l’avenir. Le malheur des uns fait le bonheur des autres.
Ce n’est pas la première décision de ce type que prend Google. Dans le domaine des cartes mères, la firme de Mountain View s’est aussi tournée vers Taïwan. Il n’est toutefois pas impossible que d’autres motivations aient pu jouer, comme la polémique née à la suite de l’article très controversé suggérant que les autorités chinoises ont investi certaines usines pour y placer de prétendues micro-puces espionnes.
L’industrie s’adapte bon gré mal gré
Quoiqu’il en soit, Google n’est pas un cas isolé : la société Super Micro est aussi en train de réorganiser sa production pour ne plus compter sur l’Empire du Milieu. Comme Google, les rumeurs de sabotage des cartes mères et les droits de douane insoutenables annoncés par les USA apparaissent comme les deux principales motivations justifiant de quitter le pays, même si l’existence de ces micro-puces n’a jamais été vérifiée.
D’autres sociétés sont engagées dans cette voie : c’est le cas de GoPro, le spécialiste des caméras sportives. Les produits destinés aux USA sont maintenant produits au Mexique. De son côté, Foxconn a dit être prêt à déplacer la production de l’iPhone hors de Chine si c’était nécessaire. Foxconn est le principal sous-traitant de l’industrie tech : cette firme taïwanaise est à la tête de vastes centres d’assemblage.
Si la Chine perd quelques activités de production industrielle, les États-Unis n’en tirent donc pour l’instant aucun avantage. Ce ne sont en effet pas les USA qui sont choisis par les entreprises pour relocaliser s’ils le sont, c’est de manière très marginale : les sociétés font sans grande surprise le choix de pays où la main d’œuvre coûte très peu cher et est corvéable à souhait.
Cette relocalisation industrielle aux USA constitue pourtant l’un des grands projets de Donald Trump. En septembre 2018, le président des États-Unis invitait Apple à fabriquer aux USA si elle n’est pas contente de la taxe sur les produits chinois. Deux mois plus tard, il estimait que les gens peuvent payer leur iPhone 10 % plus cher. Et 25 % plus cher ? Rien n’est moins sûr.
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