En Espagne, la Liga s’est vu infliger une amende de 250 000 euros pour avoir utilisé sans prévenir le smartphone des fans de foot comme mouchard. La Liga utilisait son application officielle comme mouchard pour repérer les matchs diffusés sans autorisation dans les bars.

En matière de lutte anti-piratage, la fin justifie-t-elle les moyens ? Pas aux yeux de l’Agence espagnole de protection des données personnelles (AEPD), l’équivalent de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en France. Si la neutralisation des contenus diffusés illégalement constitue un objectif légitime pour les titulaires de droits, elle ne peut pas se faire au mépris de la loi.

C’est ce que vient de constater à ses dépens la Liga, le plus important championnat de football en Espagne. Mercredi 12 juin, l’AEPD l’a sanctionné par une amende de 250 000 euros pour s’être servi de son application officielle comme d’un mouchard afin de détecter les retransmissions illégales des matchs dans les bars. La Liga cherchait à savoir quels bars étaient fautifs pour ensuite prendre des mesures.

Pour cela, l’application se servait de plusieurs composants du smartphone, grâce aux permissions qu’elle réclamait à l’utilisateur au moment de l’installation : ainsi, le signal GPS était utilisé pour déterminer si le propriétaire se trouvait dans un bar au moment d’un match de la Liga, tandis que le micro était activé pour entendre l’environnement et tenter de repérer des indices d’une diffusion footballistique.

L’emploi d’un seul micro suffit-il à capter le son d’une TV dans un lieu public bondé et certainement très animé ? Pas toujours. Plusieurs micros, par contre, peuvent changer la donne. Et justement, les smartphones sont aujourd’hui démocratisés, parfois posés sur la table, et l’application en question est massivement utilisée : elle a des millions d’utilisateurs en Espagne, selon El Diaro.

C’est cette fonctionnalité, qui n’a pas été renseignée d’emblée aux utilisateurs, couplée à son utilisation à grande échelle, qui a conduit l’AEPD à condamner la Liga — même si le montant de l’amende peut apparaître relativement modeste par rapport à la nature du problème et au nombre de personnes touchées (50 000, selon AJ+) — parce que cette écoute secrète est une violation de la vie privée.

Un second round judiciaire se profile

L’affaire ne devrait toutefois pas en rester là. D’après El Pais, si la Liga cessera l’emploi de cette fonctionnalité le 30 juin, c’est-à-dire à la fin de la saison, donc sans se presser, un volet judiciaire va maintenant s’ouvrir puisque un recours sur la décision de l’AEPD a été enclenché. L’AEPD « n’a pas fait les efforts nécessaires pour comprendre comment la technologie fonctionne », selon la Liga.

Selon le championnat de football espagnol, son application respecte la loi ainsi que les guides et directives de l’AEPD, sans oublier le RGPD. En particulier, sur la question du consentement, la Liga juge qu’elle demande à deux reprises l’accès au micro et au GPS, tout en précisant qu’il n’y a aucune conservation d’enregistrement sonore. Libre ensuite à l’internaute d’accepter ou de refuser.

L’AEPD « n’a pas fait les efforts nécessaires pour comprendre comment la technologie fonctionne »

Quant aux fichiers sonores provisoirement captés pour déterminer si un match est diffusé frauduleusement dans un bar qui n’a pas les droits de diffusion, la Liga estime que les éventuelles captations de discussion autour du micro du smartphone sont inexploitables. Une empreinte sonore ne contenant que 0,75 % de l’information est générée, ce qui veut dire que les 99,25 % restants passent à la trappe.

Cela rendrait donc techniquement impossible d’interpréter ou d’enregistrer la voix humaine ou les conversations. Cette même empreinte est ensuite transformée en un code alphanumérique (hachage) qui ne serait pas réversible au son original, continue la Liga. S’appuyant sur le rapport d’un rapport d’expert allant dans son sens, cette technologie ne permettrait donc pas de connaître le contenu d’une conversation ou d’en identifier les participants.

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