La calculatrice ne figurait pas dans la liste modèle des fournitures scolaires du ministère de l’Éducation nationale pour la rentrée 2019. Pourtant, c’est un objet quasiment indispensable : dès l’entrée en seconde, il faut investir dans une nouvelle calculatrice. Pour l’achat d’un modèle de référence, comme la TI 82 Advanced ou la Casio Graph 35+E, il faut compter presque 50 euros. Une calculatrice scientifique se distingue des calculatrices traditionnelles par l’ajout de plusieurs options (notation scientifique ou tracé de graphiques, par exemple).
Les applications mobiles peuvent-elles changer la donne ? Une simple recherche dans un magasin d’applications comme l’App Store d’Apple permet de voir qu’il existe une poignée d’applications qui se présentent comme de véritables calculatrices scientifiques, qui seraient tout à fait complètes. La majorité d’entre elles sont gratuites. Mais que valent-elles vraiment ? Les lycéens pourraient-ils s’en servir comme d’une machine traditionnelle pour faire leurs devoirs de maths ?
La majorité de ces apps n’ont « aucun intérêt »
Calculator #, ACalc, Calc Pro, Panecal, Calculatrice+… Pas facile de s’y retrouver entre toutes ces applications gratuites. Franck Duffaud, professeur de mathématiques au Lycée Victor Duruy à Paris, les a testées pour la rédaction de Numerama. Son verdict est clair : la plupart de ces interfaces ne sont pas vraiment à la hauteur. Parmi cette sélection, il n’en retient qu’une seule qui présente quelques points intéressants. « Calculator# permet de faire du calcul formel, du développement factorisé, nous explique le professeur de mathématiques. Elle donne delta, elle permet de voir la solution sous forme de fraction, elle ne donne pas de radicaux. Le développement est assez simple. »
Quant aux autres applications de cette liste, Franck Duffaud ajoute qu’elles sont loin d’égaler les calculatrices scientifiques recommandées en classe. « Les autres apps n’ont aucun intérêt. Soit elles ont de la publicité [ndlr : c’est le cas de ACalc qui diffuse une publicité de quelques secondes après l’ouverture de l’app, dès que l’on clique sur un bouton, et de Panecal qui intègre une bannière de pub au-dessus de la calculatrice], soit elles n’apportent rien de plus que celles qui sont déjà de base dans les smartphones », indique le professeur.
NumWorks et son app gratuite : un concurrent sérieux à Casio et TI ?
Franck Duffaud nous explique que les élèves de son lycée utilisent depuis peu de temps une nouvelle calculatrice, déclinée en application mobile gratuite sur smartphone (ce que Casio et Texas Instruments, les leaders du marché, ne proposent pas en complément de leurs machines) : NumWorks. La société a lancé cette nouvelle calculatrice il y a deux ans. « La plupart des applications de calculatrices scientifiques sont dépassées par la nouvelle calculatrice de la société NumWorks », affirme l’enseignant, qui a l’habitude d’utiliser un émulateur proposé gratuitement par NumWorks lorsqu’il fait cours.
Pour comprendre quelle est la promesse de cette calculatrice, nous avons contacté Romain Goyet, ingénieur et fondateur de NumWorks. « Je suis parti d’un constat simple, raconte l’entrepreneur à Numerama. Pour apprendre les mathématiques à partir de la seconde, on donne aux élèves un objet des années 80 qui fait peur. Il n’est pas à la portée des élèves. Ils ont du mal à apprivoiser cet objet qui n’est pas mis au goût du jour. »
La calculatrice de NumWorks a plusieurs avantages. La société met particulièrement en avant l’intégration du langage Python, qui fait partie du programme dès la seconde, depuis la rentrée 2018. « Nous avons été les premiers à proposer une calculatrice qui permet de programmer en Python », affirme Romain Goyet (Casio et TI se sont alignés par la suite). Franck Duffaud nous indique également que la calculatrice de NumWorks permet « de faire des suites imbriquées, ce que les autres ne font pas ». L’app est mise à jour régulièrement, tous les 2 mois environ, ce qui permet d’intégrer de nouvelles fonctionnalités ou d’améliorer les existantes.
Pour l’achat du boîtier de la calculatrice graphique, il faut compter 80 euros (soit 30 euros de plus que les deux calculatrices de références de chez Casio et TI citées au début de cet article). L’application mobile est gratuite, sur iOS et Android. « L’application reprend toutes les fonctionnalités de la calculatrice physique », poursuit Romain Goyet. On aurait pu s’attendre, dès lors, à ce que l’application rencontre un franc succès, puisqu’elle permet de disposer d’une calculatrice scientifique gratuite, tandis que les ventes du boîtier physique n’auraient pas suivi cette tendance. Mais ce n’est pas le cas. Pour le créateur de NumWorks, les deux éléments fonctionnent plutôt de façon complémentaire.
Calculatrice ou pas, le smartphone reste proscrit en examen
Plusieurs limites des apps de calculatrices scientifiques, dont celle de NumWorks, permettent de comprendre pourquoi ces outils ne prennent pas le pas sur les machines utilisées en classe, selon Romain Goyet. « La calculatrice physique reste importante pour plusieurs raisons. D’abord, parce qu’il est recommandé d’avoir un environnement sans distractions pour l’élève. Ensuite, il est plus aisé d’utiliser une machine avec de véritables touches. Le tactile n’est pas très pratique pour taper des chiffres, il n’y a pas de correcteur automatique pour le calcul ! », énumère l’entrepreneur.
Mais le principal obstacle reste la possibilité de tricher, si la calculatrice est utilisée sur un smartphone. « En classe, le téléphone est autorisé ponctuellement, mais il faut avoir son boîtier en examen », nous confirme le professeur de mathématiques Franck Duffaud. « Il faut pouvoir garantir les conditions d’un examen sans triche, ce qui n’est pas possible avec l’app sur le smartphone, renchérit Romain Goyet. L’app est plutôt là pour dépanner, elle peut aussi permettre de tester la calculatrice avant de l’acheter. »
Pour l’instant, les applications de calculatrices scientifiques semblent difficilement pouvoir remplacer les machines classiques dans les classes au lycée. La plupart des applications gratuites ne sont pas à la hauteur de cette promesse. Et quand l’une d’elles se détache du lot, elle se heurte à l’interdiction du smartphone en classe, tout particulièrement en examen. Quant au matériel requis en classe, le boîtier physique à acheter séparément dans le cas de NumWorks reste finalement onéreux, si on le compare aux historiques Casio et TI qui ont déjà eu le temps de se forger une solide réputation auprès des enseignants, des parents et des lycéens. Mais le constat de l’entreprise est juste : donner une touche d’accessibilité à l’austérité des mathématiques peut faire la différence.
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