Quelles sont les responsabilités dans l’accident fatal survenu en mars 2018, quand une voiture autonome opérée par Uber, en cours d’expérimentation sur la voie publique, a heurté une passante qui traversait la route de nuit, en dehors d’un passage piéton ? Le leader mondial de la réservation de voitures avec chauffeur (VTC) est-il le seul en cause dans ce drame ?
Les faits semblent plus complexes. L’entreprise de mise en contact entre des passagers et des conducteurs a bien eu un rôle prépondérant dans la collision, mais il apparaît que plusieurs autres facteurs extérieurs ont pesé dans la balance. C’est la conclusion à laquelle est parvenue le Conseil national de la sécurité des transports (NTSB) à la suite de ses investigations, qui ont fait l’objet d’une synthèse le 19 novembre.
Le NTSB partage les responsabilités entre Uber, l’Arizona (État dans lequel les faits se sont produits) et la victime.
Responsabilités multiples
Ainsi, le NTSB souligne dans son rapport que l’autorité locale des transports a fourni une « supervision insuffisante au sujet des tests de véhicules autonomes », tandis que la victime, qui traversait en dehors d’une zone autorisée, avait des facultés amoindries : « Les tests toxicologiques effectués dans le sang de la piétonne ont révélé la présence de drogues pouvant altérer la perception et le jugement ».
L’autorité fédérale considère que la supervision insuffisante de l’Arizona et la situation de la piétonne ont « contribué à l’accident ». Une régulation plus ferme aurait-elle pu permettre d’éviter ce drame ? La supposition est impossible à vérifier. Toujours est-il que le NTSB a formulé six recommandations, adressées aussi bien aux autorités de l’Arizona, qu’à Uber et à diverses autres instances de transport.
La victime et l’Arizona ont « contribué à l’accident »
Mais l’existence de causes extérieures au crash ne saurait masquer les propres fautes du géant du VTC. Le NTSB rappelle dans son rapport que la « cause probable de l’accident […] était le fait que la conductrice du véhicule n’a pas surveillé l’environnement de conduite et le fonctionnement du système automatisé de conduite parce que sa vue était accaparée pendant tout le trajet par son smartphone personnel ».
En principe, chaque véhicule expérimental qu’Uber met sur la voie publique pour tester la conduite autonome est supervisé par un conducteur de sécurité. Celui-ci se trouve derrière le volant et doit être en mesure de reprendre la main à tout moment s’il estime qu’il y a un évènement que le système ne saura pas gérer. Cela suppose donc d’être entièrement dévolu à cette tâche.
Enfin, le NTSB pointe les insuffisances techniques des dispositifs de conduite autonome lors de l’accident. Le système de bord « n’a jamais classé la personne défunte dans la catégorie piétonne, ni anticipé son chemin », alors même que les capteurs l’ont vue 5,6 secondes avant l’impact. Tout au long de cette séquence, le système a eu la victime dans son radar, sans toutefois parvenir à bien la classifier.
D’autres problèmes ont été rappelés, comme le fait que les systèmes d’avertissement de collision à l’avant et le freinage d’urgence automatique étaient désactivés. Enfin, le NTSB considère qu’Uber a eu des lacunes en matière de culture du risque, causée par des procédures inadéquates d’évaluation des risques de sécurité et une mauvaise supervision des conducteurs de sécurité.
[floating-quote float= »right »]La faute de l’employée et les erreurs de la voiture restent les causes principales du crash[/quote]
« Si les responsables d’Uber avaient bien la possibilité de contrôler rétroactivement l’attitude des conducteurs de véhicules, ils le faisaient rarement. L’inefficacité de la surveillance exercée par l’entreprise a été exacerbée par sa décision de retirer un deuxième opérateur du véhicule pendant les essais du système de conduite automatisé », écrit le NTSB. Or, ce deuxième opérateur pouvait contrôler le pilote.
À la suite de l’accident mortel, Uber a suspendu plusieurs mois ses expérimentations dans la conduite autonome. Celles-ci n’ont repris qu’au mois de décembre dernier, d’abord en Pennsylvanie, avant d’être progressivement étendues à d’autres États. Le leader des VTC avait déjà relancé ses activités dans ce domaine dès cet été, mais en « mode manuel », c’est-à-dire avec un chauffeur à la manœuvre.
Reste maintenant une question : si l’un de ces facteurs était retiré de l’équation, le drame aurait-il pu être évité ? C’est se livrer à une certaine spéculation. Toutefois, le NTSB évoque un cas de figure qui aurait pu éviter un sort funeste à la victime ou, du moins, atténuer les effets de l’accident : si la conductrice avait été attentive, elle aurait eu assez de temps pour réagir.
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