Dans les mois à venir, lorsque vous ferez l’acquisition d’un nouvel appareil électrique ou électronique, vous pourrez vous appuyer sur un nouveau critère de sélection : l’indice de réparabilité. Le gouvernement profite de son projet de loi contre le gaspillage et pour l’économie circulaire pour imposer cet indicateur, qui sera censé exprimer le niveau de difficulté auquel il faut s’attendre pour réparer tel ou tel équipement.
Le texte, actuellement discuté en commission développement durable de l’Assemblée nationale (il sera examiné à partir du 9 décembre en séance), reste peu bavard sur les modalités d’application de ce fameux indice de réparabilité. Il renvoie à un futur décret la liste des produits concernés, ainsi que les critères et le mode de calcul retenus pour l’établissement de l’indice.
Des contours précisés
Cela étant, l’article en question ainsi que les amendements adoptés par les députés livrent quelques indications sur la portée du dispositif. Ainsi, il concerne les producteurs et les importateurs, mais aussi les distributeurs et les places de marché, afin d’anticiper les « potentielles évolutions des modes de distribution ». Bien sûr, cela concerne aussi bien les magasins que les sites de vente opérant en France.
Cet indice doit être fourni « sans frais » à la clientèle, « au moment de l’acte d’achat » (il faut qu’il soit visible et accessible avant, pour disposer d’une information la plus complète possible). Sa forme peut être un étiquetage, un affichage, un marquage « ou par tout autre procédé approprié ». Il faut aussi indiquer « les paramètres ayant permis d’établir l’indice de réparabilité du produit ».
Par ailleurs, les députés souhaitent aussi mettre les réparateurs dans la boucle. Ainsi, un amendement a été approuvé pour que soit communiqué l’indice « à toute personne qui en fait la demande ». Il est expliqué que les réparateurs professionnels indépendants sont un rouage-clé, car 60 % des actes de réparation sont de leur fait. Il faut donc qu’ils puissent avoir accès à ces indices et les communiquer en conséquence.
C’est pour cela qu’un autre amendement a été adopté (un autre, identique, également). Celui-ci vise à obliger les entreprises concernées « mettre ces données à disposition du public par voie électronique, dans un format aisément réutilisable et exploitable ». Un accès qui profiterait aux réparateurs comme au public, tout en offrant la possibilité de produire des statiques et ainsi dégager des tendances, des enseignements.
Enfin, un dernier amendement adopté en commission demande que « les critères servant à l’élaboration de l’indice de réparabilité incluent obligatoirement le prix des pièces détachées [les plus importantes, NDLR] nécessaires au bon fonctionnement du produit et, chaque fois que cela est pertinent, la présence d’un compteur d’usage visible par le consommateur ».
Un projet lancé en 2018
Le projet d’indice de réparabilité a été annoncé mi-2018 par Brune Poirson, la secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, au moment où la Fnac a lancé son propre indice de réparabilité pour les PC portables. Brune Poirson a expliqué qu’il s’agit de répondre à une demande du public, car, selon elle, trois quarts des clients veulent des informations sur la durée de vie des produits.
Ce plan rappelle ce que fait déjà le site anglophone iFixit. Spécialisé dans le démontage des appareils, et plus particulièrement des smartphones, il attribue une note sur 10 (la Fnac, elle, note sur 100) pour décrire la facilité générale de la manipulation. Par ailleurs, il produit des guides de réparation pour le grand public et propose même de vendre des outils pour réaliser les bons gestes.
En 2018, le gouvernement a précisé que cet indice prendrait la forme d’une note sur 10 (comme iFixit, donc) et sera basé sur dix critères. Une autre piste qui aurait pu être tout aussi envisagée est celle d’une échelle semblable à celle qui sert au diagnostic de performance énergétique, avec une note allant de A à G. Le décret d’application devrait être l’occasion de préciser le dispositif.
La logique derrière cet article de loi est d’encourager à privilégier la réparabilité d’un produit plutôt que de passer directement à l’achat d’un nouvel appareil. Cela étant, il peut y avoir certaines limites à cette philosophie : un particulier n’est peut-être pas forcément outillé correctement pour faire les réparations lui-même, et il peut risquer de faire sauter sa garantie ou abîmer davantage son appareil.
Une démarche avec des limites
Dans le cas d’un iPhone, l’appareil n’est pas facilement démontable par un particulier et sa réparation peut être hors de portée du premier venu. En revanche, il est complètement pris en charge par un Apple Store, car ils ont le matériel pour et la formation qui va avec. Dès lors, le produit n’est pas en soi irréparable, mais pourra l’être pour un usager et son jeu de tournevis.
À cela s’ajoutent d’autres arguments dont il faut tenir compte et qui peuvent être tout aussi audibles : la réparabilité du particulier trouve rapidement ses limites à l’heure où les pièces sont de plus en plus complexes, miniatures ou imbriquées. Sans parler du risque d’acheter les mauvais composants ou d’esquinter sa machine pendant l’intervention. Bref, même avec un bon indice, pas sûr que cela soit à la portée de tout le monde.
Bien sûr, l’indice de réparabilité n’est qu’un indicateur parmi d’autres et il est tout à fait concevable de ne pas en tenir compte. Il n’oblige en aucune façon à faire la réparation soi-même. D’ailleurs, sur une fiche produit, il y a plein d’informations qui n’ont aucun intérêt pour tel ou tel client. Mais cela pose une autre question : plutôt que l’indice de réparabilité, ne faut-il pas plutôt évaluer les réparateurs eux-mêmes ?
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