Aux États-Unis, la balle qui a tué le président John Fitzgerald Kennedy en 1963 est soigneusement conservée dans les Archives Nationales. Ce n’est pas vraiment l’artéfact historique le plus joyeux, mais il a une importance mémorielle cruciale pour les Américains. Quelques jours après le 56e anniversaire de la mort de JFK, le National Institute of Standards and Technology a annoncé sur son site, le 5 décembre 2019, la création de répliques numériques de cette balle.
Cet artéfact métallique n’est pas en très bon état. Il est même particulièrement fragile. La balle est brisée en plusieurs fragments. Réaliser un scan numérique est motivé à la fois par l’idée d’un devoir de mémoire et par l’objectif d’en étudier soigneusement les moindres détails. Les archives nationales diffuseront la modélisation 3D début 2020 dans leur catalogue en ligne, au sein de la partie dédiée à l’assassinat de JFK. Cette section contient déjà plus de 5 millions de pages rassemblant des documents, des photographies, des vidéos et des objets. Une version virtuelle de cette balle était très demandée par le public, selon le communiqué. Les intéressés pourront bientôt observer en ligne la balle sous toutes ses coutures, tandis que « l’originale restera préservée en toute sécurité dans sa chambre forte à la température et à l’humidité contrôlées ».
Un puzzle 3D « ultra complexe »
L’équipe balistique du National Institute of Standards and Technology NIST a été chargée du projet. Il s’agit d’une agence gouvernementale contrôlée directement par la chambre des représentants, à travers le comité des sciences, de l’espace et des technologies. Le NIST a employé une technique avancée de microscopie électronique à variation focale. Après avoir posé délicatement un fragment de la balle dans une poche en silicone, sur le microscope, et à l’aide d’une pince ou de gants, l’appareil capture une image de chaque point de l’objet à différentes distances focales.
« En se déplaçant autour de l’objet, la lentille a construit une carte 3D de sa surface à l’échelle microscopique , comme un satellite qui cartographie une chaîne de montagnes », détaille le NIST. La résolution du microscope est de l’ordre de 4 micromètres à l’horizontale et 0,5 micromètre à la verticale, soit moins d’un dixième d’un cheveu humain. Les moindres rayures, les moindres déformations ont pu être enregistrées en relief.
Ce processus d’une infime précision a demandé énormément de temps aux scientifiques, si bien que le chef du projet, Thomas Brian Renegar, indique qu’il pourrait presque dessiner certaines facettes de la balle de mémoire. Le microscope prenait les photos, mais les scientifiques devaient tourner les fragments eux-mêmes. Ensuite, pour chaque image obtenue (et il y en avait beaucoup !), il fallait la remplacer au bon endroit sur le squelette de la modélisation. « C’était comme résoudre un puzzle 3D ultra complexe », fait remarquer Renegar.
Le résultat est, selon le NIST, à la hauteur du travail accompli. L’objet modélisé offre une vision inédite de l’objet dans toute sa complexité. Il sera possible, en ligne, de zoomer sur la surface de l’objet pour y déceler des détails qui ne seraient normalement pas visibles à l’oeil humain, si ce n’est pour y voir des reliefs qui ne pourraient même pas être sentis en touchant le fragment. La modélisation de la balle ayant tué JFK est un cas très spécifique, mais cela prouve que les technologies 3D révolutionnent progressivement le domaine culturel. Ces avancées sont déterminantes pour préserver et rendre plus accessibles des objets importants pour la mémoire collective, dans l’histoire récente, ancienne, préhistorique ou paléontologique.
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