Quand Apple a dévoilé son iPad en 2010, la tablette tactile était un monde à inventer. Aux ordinateurs peu puissants et pénibles à utiliser appelés Netbooks, l’entreprise opposait un grand écran multimédia qui s’est rapidement imposé comme la tablette de référence. Par ses qualités, mais aussi par son prix plancher qui permettait d’entrer dans l’univers onéreux d’Apple sans dépenser une somme colossale. Problème : dès le départ, le concept était trop bon.
Il aura fallu quasiment 10 ans à Apple pour réinventer véritablement l’iPad, l’approchant de plus en plus d’un ordinateur. En 2020, une toute petite mise à jour logicielle entérine cette transformation : l’iPad a désormais un pointeur logiciel et est compatible avec des souris et des trackpads. Cette évolution logicielle est soulignée par la véritable nouveauté des dernières annonces d’Apple, un clavier Magic Keyboard complet, transformant la tablette en petit iMac.
De quoi enfin convaincre que l’iPad est comme un ordinateur ? Presque.
L’iPad Pro de 2020 est disponible à partir de 899 € en version 11 pouces.
L’iPad est un ordinateur à 99 % et à 120 %
Quand nous avons reçu le nouvel iPad Pro en test, notre premier réflexe a été de brancher un Magic Trackpad 2 dessus pour tester le pointeur de la souris. Car au fond, en elle-même, cette nouvelle tablette Pro n’est pas une évolution majeure : les caractéristiques sont un poil augmentées et elle dispose de deux appareils photo et d’un LIDAR à l’arrière. On est clairement sur un perfectionnement de l’excellent modèle qui équipait Face ID plutôt que sur une nouvelle version de la tablette d’Apple.
Mais le nouvel iPadOS (13.4) qu’elle embarque et la possibilité d’utiliser un pointeur changent tout. Les vidéos d’Apple sur le sujet n’étaient pas mensongères : avoir une souris sur un iPad change l’expérience de la tablette. Posée sur un bureau, avec un trackpad et sa couverture Smart Keyboard Folio (le Magic Keyboard ne sera disponible qu’en mai 2020), l’iPad Pro donne la sensation d’un ordinateur. Travailler sur un immense écran 12,9 pouces rafraîchi à 120 Hz, parfaitement éclairé et calibré grâce à TrueTone qui adapte la colorimétrie à l’ambiance lumineuse, est un plaisir instantané.
Le pointeur est exactement ce à quoi on s’attendait : un mix entre les gestes tactiles du trackpad d’un Mac et les interactions d’iPadOS. Glisser les doigts pour revenir au bureau, cliquer, sélectionner, ouvrir le multitâches… on prend nos repères en un clin d’œil. Dans les applications, les menus sont parfaitement adaptés à cette navigation hybride : le curseur se transforme en bouton quand vous avez l’intention de cliquer. Vous déplacez le pointeur vers l’icône de votre choix et il se fond dans cette icône pour vous indiquer que c’est elle que vous avez sélectionnée. Apple résout ainsi les soucis potentiels d’une interface tactile qui ne serait pas pensée pour un contrôleur autre que les doigts.
Si bien qu’en 2020, cet iPad Pro, mais également toute la gamme iPad compatible avec iPadOS 13.4, devient cet ordinateur puissant, tournant sous un système d’exploitation hybride. Et on ne peut que reconnaître qu’il est désormais capable de faire toutes les tâches d’un grand nombre de professions. Si votre idée d’un ordinateur est une machine qui vous sert à écrire, prendre des notes, planifier des rendez-vous, faire des réunions à distance, éditer des documents de tous types (images, vidéos, sons, etc.), enregistrer des conversations au dictaphone, prendre des photos de grande qualité (par exemple pour remplacer un scanner) et peut être mobile quand on en a besoin, alors l’iPad Pro ne sera jamais mis en défaut. En plus de vous servir à jouer et à vous détendre le soir venu, grâce à son écran et ses excellentes enceintes.
Et on peut aller plus loin : je m’étais étonné en 2018 qu’un artisan vitrier vienne chez moi uniquement avec son iPad Pro de l’époque. Mais en réalité, la démonstration tombait sous le sens : il prenait des photos avec Notes et éditait les mesures des fenêtres avec le stylet de l’iPad en temps réel. Avant même de quitter l’appartement que je louais, il avait envoyé la liste de matériel nécessaire à son atelier qui pouvait passer commande. Une efficacité redoutable pour un métier très loin du tertiaire et de la bureautique. En 2018, cet artisan utilisait un mètre laser pour ses mesures. Aujourd’hui, avec son LiDAR, l’iPad suffirait.
Car cette addition qui semble de prime abord dédiée à du divertissement ou de l’éducation (jeux en réalité augmentée, quelques expériences rigolotes, démonstrations pédagogiques, etc.) s’avère être particulièrement efficace pour les mesures. Le LiDAR crée un « masque de points » autour des objets en envoyant des faisceaux lumineux et en captant leur rebond. En temps réel, il sait donc modéliser en 3D, avec précision, une pièce et les meubles qu’elle contient — c’est la technologie utilisée par la plupart des voitures autonomes pour détecter les obstacles.
En pratique, il semblerait qu’on puisse lui faire confiance : le banc de nos clichés a été mesuré à une précision au cm. Le fait qu’il reconnaisse les bords d’un objet permet également de tracer des contours bien plus facilement qu’avant. Est-ce que l’on utilisera cette fonctionnalité au quotidien ? Pour des travaux, de l’ameublement ou du bricolage, assurément.
Vous pourriez être les 1 %
Il aurait été confortable d’écrire dans ce paragraphe que tout ce test a été réalisé et édité à l’iPad Pro. Mais cela aurait été faux.
La première question de Maxime Claudel, journaliste tech et auto pour Numerama qui rêve d’abandonner son ordinateur pour un iPad depuis de nombreuses générations a été peu ou prou : « alors, ça marche le back office ? » Notre tableau de bord de rédaction est basé sur Wordpress, technologie d’édition de sites web, particulièrement modifiée. C’est une interface entièrement web qui est très facile d’accès, mais qui a quand même une allure professionnelle, avec ses fonctions, ses petits boutons, ses dizaines de widgets, etc. L’iPad Pro, dans la configuration clavier et trackpad, s’en sort à merveille. Au feeling, seule la touche « échap » manque sur le clavier, quand on va machinalement la taper pour fermer une popup d’une application et qu’elle ne se trouve pas à l’endroit où elle devrait être. L’outil est complet et accessible et ce qui était pénible avec de gros doigts devient aisé avec un pointeur.
J’avais presque terminé la rédaction d’un article quand le drame s’est produit. Antidote.
Antidote, correcteur automatique de référence, est l’outil qui nous permet d’enlever la plupart des fautes qui ont échappé à la relecture humaine. Malgré ses nombreuses qualités, il s’agit d’un vieux logiciel, lourd, sur une interface datée qui « prend le contrôle » d’un champ texte et applique les corrections en temps réel. Compatible macOS et Windows. On peut donc écrire, ajouter et retoucher des photos, créer des liens hypertextes, faire des images de Une, dérusher une interview, sélectionner nos méthodes de mises en page, mais on bute sur un outil absolument essentiel qui ne s’est pas modernisé.
C’est peut-être le sentiment qu’auront quelques professions qui ont cherché à tester l’iPad comme machine principale : dans leur quotidien, l’iPad, Pro ou non, ne pourra pas exécuter l’un de leurs logiciels. Alors certes, les éditeurs de ces logiciels pourraient songer à des solutions plus modernes. Du côté d’Antidote, la version mobile est un dictionnaire, pas un correcteur. Mais l’avenir de l’informatique n’est pas tout tracé : entre Apple qui pousse pour un système mobile « tout appli », Microsoft qui reste très logiciel et Google qui cherche à ce que tout se passe sur le web autour de webapps, il est difficile aujourd’hui d’investir. Alors ces éditeurs attendent.
iPadOS est un dommage collatéral de cette guerre du logiciel, de l’app et de la webapp, notamment professionnels — car les logiciels professionnels sont encore plus sensibles que les logiciels grand public. Leur déploiement coûte de leur argent et leur utilisation en rapporte. S’il existe le moindre maillon de votre chaîne de production que l’iPad ne peut pas exécuter, cela ne pourra pas être votre ordinateur de travail.
On ne peut en revanche le nier : depuis la sortie de l’iPad Pro, la situation a très clairement évolué. L’iPad en tant que tablette de productivité peut s’adresser à la grande majorité des gens et fera, dans la plupart des cas, bien plus qu’un ordinateur — même le fait de faire des scans avec l’appareil photo est un gain de temps colossal. Pour des métiers manuels, créatifs ou artistiques ou de l’artisanat, l’iPad Pro est le chaînon manquant idéal entre leur smartphone et leur ordinateur de bureau. Sans parler des étudiantes et étudiants, qui, avec un iPad Air ou iPad peu onéreux, ont une machine incroyable pour les cours et le divertissement.
À la marge de tous ces métiers, d’irréductibles travailleurs et travailleuses ne pourront se permettre le switch vers le tout tablette.
Prix et disponibilité
L’iPad Pro est disponible dès le 25 mars 2020, en version 11 et 12,9 pouces, avec ou sans modem 4G.
Nous nous excusons pour la qualité des clichés de ce test : la rédaction de Numerama est en confinement et notre photographe ne s’est évidemment pas déplacée pour faire les clichés. Nous ne sommes pas non plus sortis de notre lieu de résidence comme nous le faisons d’habitude pour tester les appareils photo des produits.
Le verdict
Apple iPad Pro (2020)
Voir la ficheOn a aimé
- Excellente sur tout
- Les nouveaux accessoires et iPadOS 13.4
- Les mesures au LiDAR, précises
On a moins aimé
- Pas de changement radical
- Pas encore un ordinateur
- On veut une touche Échap
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