Pour lutter contre la désinformation sur le coronavirus, YouTube a pris une série de décisions permettant de mieux valoriser les contenus venant de sources de confiance. Une stratégie payante.

La pandémie de coronavirus est aussi une rude épreuve pour les plateformes d’accès à l’information et les médias. D’une part, ils doivent faire comprendre que la science n’est pas immuable et qu’une avancée scientifique, surtout sur un sujet aussi travaillé, peut contredire une précédente mise en garde ou recommandation. D’autre part, il faut, plus que de mesure, lutter contre la désinformation pure et dure — les conspirations autour de la 5G, de Bill Gates, du virus créé en laboratoire, mais aussi les remèdes miracles ou la minimisation de la dangerosité de l’épidémie sont autant de sujets qui se répandent sur le web.

Recommander des contenus vérifiés a un impact

Une plateforme en particulier était attendue au tournant : YouTube, qui a depuis quelques années été pris d’assaut par les conspirations en tout genre, côtoyant la désinformation quotidienne. Il était commun de dire que toute vidéo sur YouTube menait, par le mécanisme de recommandation, à une théorie du complot. Refusant toujours d’être l’arbitre de la vérité, YouTube a tout de même pris des dispositions pour contrer la désinformation sur sa plateforme. En mars 2020, elle a annoncé avoir divisé par deux le nombre de vidéos complotistes recommandées dans sa poursuite de lecture — un chiffre important, dans la mesure où près de 75 % du temps de visionnage quotidien vient des recommandations YouTube.

Le nombre de vidéos vues de sources jugées fiables a augmenté de 75 % au cours du premier trimestre 2020

Pour le coronavirus, c’est tout un dispositif d’urgence qui a été mis en place. La recherche sur le mot clef renvoie par exemple à des résultats issus de médias de confiance et un message donne un accès direct aux informations des agences de santé nationales. Message que l’on retrouve sous toutes les vidéos liées au virus. En plus de cela, un hub d’actualités lié au coronavirus a été créé et apparaît directement sur la page d’accueil de YouTube. Si le classement des vidéos qui y figurent est algorithmique, les sources des vidéos ont été pré-approuvées par YouTube (ndlr, Numerama y figure).

D’après YouTube qui a partagé ces informations lors d’un point presse auquel nous avons assisté, le nombre de vidéos vues de sources jugées fiables a augmenté de 75 % au cours du premier trimestre 2020 dans le monde, 55 % en France. C’est un signe manifeste que la proactivité de YouTube pour contrer la désinformation fonctionne. Et, en creux, l’invalidation des discours tenus parfois par l’entreprise autour de la liberté d’expression : certes, YouTube ne veut pas être le gardien de la vérité, mais l’inaction montre à quel point le mensonge a pu se diffuser. L’exemple d’encadrement de la pandémie montre que quelques ajustements suffisent pour promouvoir et diffuser des contenus vérifiés.

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Et comme la science, YouTube doit avancer et agir vite. Comme mètre étalon, la plateforme a choisi l’OMS, qui a été jugée suffisamment fiable et avec des connaissances et recommandations universellement partagées.

L’OMS comme mètre étalon

Une position qui n’a pas valu que des éloges : que faire des vidéos qui critiquent une recommandation de l’OMS, par exemple sur la base de particularités régionales ? L’Inde par exemple, a choisi un confinement strict comme le recommande l’OMS, mais l’ONG  Programme Alimentaire Mondial a mis en garde contre les risques de famines pouvant faire, eux aussi, des millions de morts dans le pays. Mais on comprend que YouTube devait trancher et choisir une ligne directrice la plus universelle possible : à défaut de mieux, celle de l’OMS est une bonne référence.

Ce choix a permis à YouTube de justifier le retrait de milliers de vidéos qui concernent des informations trompeuses ou dangereuses sur le coronavirus. Au début de la pandémie, il s’agissait de contenus qui cherchaient à affirmer que la distanciation sociale promue par l’OMS était une intox qui ne briserait pas les chaînes de contamination. Plus récemment, ce sont les vidéos mêlant le coronavirus à la 5G ou proposant des traitements miracles.

Cette approche n’est évidemment pas infaillible. À la suite de notre vidéo sur les symptômes du coronavirus, mise en avant par YouTube dans son hub, nous avons pu trouver en lecture automatique un entretien du professeur Joyeux, radié de l’ordre des médecins pour ses pratiques et ses théories, mené par un think tank, un exposé sur le jeûne ou une enquête de France 24 sur le « malaria business », sous-titré « les laboratoires contre la médecine naturelle » Ce ne sont pas des vidéos qui propagent de la désinformation sur le coronavirus, mais ces trois recommandations forment un état d’esprit mêlant dénonciation des laboratoires, médecine douce et pratiques médicales condamnées.

Les cas particuliers sont toujours les plus difficiles à modérer pour la plateforme et il est évident qu’elle n’a aucune légitimité pour décider de ne pas suggérer l’enquête d’un média français reconnu. Un contre-exemple qui montre que, dans l’ensemble, sur le coronavirus, YouTube a pris des décisions mesurées, entre lutte contre la désinformation et liberté d’expression.

Une première version de cet article confondait une banque et un think tank (CERA, pour la Caisse d’Épargne Rhône Alpes et Comprendre Échanger Réfléchir Anticiper).

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