Avec TraceTogether, première application respectueuse de la vie privée pour freiner la progression de l’épidémie de coronavirus déployée dans le monde, Singapour a été scrutée. D’abord érigé en exemple, le pays a ensuite été le symbole d’un échec : l’application, conçue sans accès au Bluetooth en arrière-plan et de fait peu utilisée, n’a pas empêché le confinement de la population.
Cette population que l’on dit volontiers technophile aurait servi de bon exemple pour promouvoir une application maison, open source, proposée sur la base du volontariat et n’utilisant pas le protocole Apple/Google qui est le seul à garantir le bon fonctionnement d’une app et que la France refuse pour l’instant pour StopCovid. Cela n’a pas été le cas.
Du Bluetooth au QR Code
Mais Singapour n’a pas pour autant fermé la porte aux solutions numériques. En lieu et place de l’application TraceTogether, basée sur le Bluetooth, la même agence a déployé une nouvelle solution nommée cette fois SafeEntry. Plutôt que de tracer précisément les rencontres des Singapouriens, elle prend le problème à l’envers : savoir en général où ils ont été. Pour cela, l’application SafeEntry n’utilise pas de géolocalisation, mais s’appuie sur un scan de code QR.
La clef du fonctionnement de ce système repose, comme avec le contact tracing par Bluetooth, sur l’adoption. SafeEntry est donc obligatoire pour toutes les entreprises et les lieux privés où du public peut entrer (comme un centre commercial). Le gouvernement a également vivement recommandé aux lieux qui ne sont pas obligés d’afficher des codes QR à scanner d’en installer tout de même — les gares et stations de transport en commun par exemple, et même les parcs, comme le note The Register.
Pour rentrer dans un lieu qui propose un QR Code, un visiteur est obligé de le scanner ou de laisser son smartphone être scanné. Le processus va collecter les noms, numéro d’identité et numéro de téléphone du citoyen, ainsi que le temps qu’il a passé dans le lieu. Ce qui signifie qu’il faut aussi scanner le code pour sortir d’un lieu, pour éviter de donner de fausses informations au système. Tous les bâtiments publics ont adopté ces « checkpoints SafeEntry » depuis le 23 avril et l’obligation pour les entreprises et les centres commerciaux sera effective le 12 mai.
Facultatif, mais obligatoire
Dans ce pays en avance sur les moyens technologiques de tracer l’épidémie pour mieux la contrôler, la balance n’est donc pas seulement technologique, mais aussi idéologique. Le Bluetooth sans les outils qui lui permettent de fonctionner correctement a laissé sa place aux codes QR, en attendant de trouver une solution — le gouvernement singapourien affirme travailler avec Google et Apple pour rendre l’application plus efficace. Mais le volontariat a aussi été abandonné au profit de l’obligation. Ce faisant, le ministère de la Santé local contraint sans contraindre : certes, un citoyen peut se déplacer librement sans application, mais il ne peut pas faire grand-chose à moins d’être scanné.
Une décision qui fait écho à celle de l’Inde : l’application Aarogya Setu, qui était présentée comme facultative, est devenue rapidement obligatoire pour certaines entreprises. Cette application indienne va plus loin que du Bluetooth, en utilisant la géolocalisation par GPS, d’après le Financial Times.
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