C’est l’une des figures majeures de l’informatique, mais dont la notoriété n’a jamais dépassé le cercle des initiés. Frances Elizabeth Allen s’en est allée le 4 août 2020, à l’âge de 88 ans.
Née le 4 août 1932, cette Américaine qui a fait toute sa carrière chez IBM a pourtant profondément marqué sa discipline. À défaut de la reconnaissance du public, elle sera néanmoins célébrée par ses pairs en 2006 avec la réception du Prix Turing. Elle a d’ailleurs été la première femme à recevoir un tel honneur. Depuis, seules deux autres femmes ont reçu également ce prix : Barbara Liskov en 2008 puis Shafi Goldwasser en 2012.
Le Prix Turing, qui est remis depuis 1966 et a été baptisé ainsi en reconnaissance des apports considérables du Britannique Alan Turing aux sciences informatiques, est perçu comme l’équivalent du prix Nobel. C’est sans nul doute la distinction la plus prestigieuse et la plus convoitée. L’Association for Computing Machinery (ACM), qui remet la récompense, a d’ailleurs qualifié sa contribution « d’impact énorme ». C’est dire.
Mais quelle a été la contribution de Frances Allen, justement ? Principalement dans le domaine des compilateurs et du calcul parallèle. Pour qui n’est pas familier avec le jargon informatique, un compilateur est un programme qui fait de la compilation, c’est-à-dire qui transforme des instructions écrites dans un langage informatique en un programme qui est exécuté par une machine. En clair, cela le fait fonctionner.
Plusieurs personnes qui ont travaillé sur les compilateurs ont d’ailleurs reçu au fil des ans le Prix Turing. C’est le cas d’Alan Perlis en 1966, John Cocke en 1987 ou bien Peter Naur en 2005. Dans le cas de Frances Allen, ce sont les optimisations qu’elle a apportées qui ont été saluées. Celles-ci « ont jeté les bases des compilateurs modernes d’optimisation et de l’exécution automatique en parallèle », écrit l’ACM.
Le calcul parallèle fait lui référence tout simplement à la faculté qu’a un système à effectuer des tâches de façon simultanée, ce qui permet de gagner du temps au lieu d’exécuter les tâches l’une après l’autre. Selon IBM, ses travaux sur la parallélisation automatique « sont toujours à la pointe de la recherche sur les compilateurs ». Enfin, Frances Allen a été décisive dans l’optimisation du code et des algorithmes.
Frances Allen ne se voyait pas travailler pour IBM toute sa vie
Comme le raconte IBM dans une page lui rendant hommage, Frances Allen aurait pu ne jamais être une scientifique. C’est presque par accident qu’elle s’est retrouvée là, car « elle ne s’imaginait pas travailler dans la programmation ». Elle ne se voyait pas non plus rester très longtemps chez IBM, juste le temps de rembourser les dettes qu’elle avait contractées en tant qu’étudiante pour financer sa scolarité.
L’histoire en aura décidé autrement. Entrée en 1957 comme programmeuse chez IBM, pour notamment enseigner aux nouveaux employés les bases du Fortran, qui est l’un des plus anciens langages informatiques, elle quittera le groupe en… 2002, à la fin de sa carrière. Une carrière qui connaîtra un sommet en 1989, lorsqu’elle sera intronisée IBM Fellow — ce sera d’ailleurs aussi la première femme à l’être.
Le statut d’IBM Fellow vise à honorer les hommes et les femmes ayant eu un apport majeur au sein de l’entreprise. Frances Allen a aussi été « fellow » au sein de l’Association for Computing Machinery et de l’Institut des ingénieurs électriciens et électroniciens (IEEE), et membre de l’Académie nationale d’ingénierie, et de l’Académie américaine des arts et des sciences.
Diverses autres distinctions sont venues agrémenter sa carrière. Mais depuis 2020, son nom est même devenu synonyme de récompense, puisqu’il est associé à une médaille que décerne l’IEEE à toute personne « pour les travaux innovants en informatique ayant un impact durable sur d’autres domaines de l’ingénierie, de la technologie ou de la science ». C’est en fin d’année que les candidats à la médaille seront connus.
+ rapide, + pratique, + exclusif
Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.
Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Vous voulez tout savoir sur la mobilité de demain, des voitures électriques aux VAE ? Abonnez-vous dès maintenant à notre newsletter Watt Else !