C’est à partir de l’automne 2019 que la fondation Mozilla, qui chapeaute la conception du navigateur web Firefox, s’est investie d’une bien surprenante mission : exposer les limites des algorithmes de recommandation de YouTube, auxquels il est reproché de mettre en avant des vidéos préjudiciables — comme des conspirations autour de la pandémie de coronavirus ou de la désinformation politique.
Cette campagne contre le fonctionnement des recommandations de la plateforme de vidéos s’est d’abord traduite par la collecte de témoignages d’internautes, dont une trentaine a été publiée quelques mois plus tard. Aujourd’hui, Mozilla souhaite crowd sourcer ce travail, en faisant appel à l’aide des internautes pour l’aider à documenter le dysfonctionnement du service de Google.
Car le problème est manifeste en témoignent ces deux reportages du New York Times, l’un sur la façon dont YouTube a participé au durcissement de la population du Brésil, l’autre sur la radicalisation d’un Américain. D’autres exemples existent : une association entre le 11 septembre et l’incendie de Notre-Dame, la défiance contre les vaccins, les partisans de la théorie de la terre plate ou du complotisme touchant les enfants.
Une extension pour Chrome et Firefox
Pour cela, l’idée d’une extension pour navigateur web a été retenue. RegretsReporter, c’est son nom, est disponible sur Firefox et Google Chrome depuis ce 17 septembre.
L’idée est d’industrialiser la collecte de signalements, en la rendant également plus simple et en la faisant passer à une autre échelle, si assez d’internautes jouent le jeu. Cela sera sans doute insuffisant pour percer les secrets de l’algorithme de YouTube, mais la répétition des témoignages peut conduire YouTube à se mobiliser davantage pour corriger le tir, même si le groupe affirme déjà faire beaucoup en la matière.
Ainsi, fait remarquer Mozilla, YouTube a déclaré à plusieurs reprises que ses efforts en la matière ont permis de réduire de 70 % les recommandations nuisibles, en se servant par exemple de Wikipédia. Un score qui est très impressionnant, mais la fondation observe qu’il n’y a aucun moyen de vérifier ces affirmations. En outre, cela ne permet pas non plus de comprendre où YouTube a encore du travail à faire.
Que deviennent les données collectées ?
De fait du fonctionnement même de l’extension, il y aura un transfert de données entre le navigateur — sur lequel est installé RegretsReporter — et les serveurs de Mozilla, puisque le but du jeu est de permettre à la fondation d’amasser de l’information. Il est précisé que des données comme ce que vous cherchez dans la barre de recherche et ce que vous visionnez ne sont pas transmises — sauf si vous donnez votre accord.
« Les données collectées par Mozilla sont liées à un identifiant d’utilisateur généré de manière aléatoire, et non au compte YouTube. Seul Mozilla aura accès aux données brutes, et lorsque nous partagerons les résultats, nous les divulguerons de façon à minimiser le risque que les usagers soient identifiés. L’extension ne recueille rien quand vous naviguez en navigation privée », ajoute la fondation.
Dans le cadre de ce travail, Mozilla espère pouvoir répondre à quelques interrogations : quels types de contenus recommandés orientent ensuite vers des contenus racistes, violents ou complotistes ? Y a-t-il des schémas identifiables sur la fréquence ou la sévérité des contenus préjudiciables ? Ou d’autres qui conduisent à recommander des vidéos répréhensibles ?
À terme, Mozilla entend rendre publiques les informations et les conclusions qu’elle tirera de cette initiative. Elle souhaite que ces éléments puissent aussi servir à des journalistes, des universitaires, des parlementaires et même des ingénieurs chez Google pour rendre les recommandations de YouTube plus pertinentes. Car l’enjeu est de taille : c’est l’un des sites les plus visités au monde.
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