L’union fait la force, dit-on. C’est sur cet adage que plusieurs applications ont décidé d’unir leurs forces pour protester contre les pratiques ayant cours sur mobile, avant tout sur iOS, le système d’exploitation d’Apple pour l’iPhone, mais aussi sur Android, l’O.S. de Google pour le reste du marché des smartphones. Cette alliance des applications, lancée le 24 septembre, s’est baptisée Coalition for App Fairness.
Aujourd’hui, cette coalition rassemble treize membres. Certains jouissent déjà d’une très forte notoriété, à l’image de Spotify, Deezer ou encore Epic Games, le studio derrière le jeu vidéo Fortnite. On trouve aussi Match Group, qui édite Tinder et Meetic, ainsi que Proton Mail, une solution de webmail proposant un très haut niveau de confidentialité. Les autres membres ont une visibilité plus faible.
Trois critiques centrales
S’en prenant spécifiquement à la firme de Cupertino, l’alliance lui reproche de servir de sa mainmise d’iOS « pour se favoriser en contrôlant les produits et les fonctionnalités qui sont à la disposition des consommateurs ». Par exemple, elle impose des fabricants d’équipements « qu’ils limitent les options », ou bien elle force les développeurs « à vendre par l’intermédiaire de son App Store ».
Pire encore, Apple « va même jusqu’à voler les idées des concurrents ». La coalition cite en exemple la mésaventure de l’application BlueMail qui avait été retirée de l’App Store avant d’être réintégrée début 2020. BlueMail estime qu’Apple a enfreint son brevet de 2017 avec sa fonctionnalité « Se connecter avec Apple », qui a été présentée mi-2019, et qui sert à protéger son mail en utilisant une adresse jetable.
La coalition réclame naturellement la fin de ces politiques anticoncurrentielles, mais il y a aussi un enjeu financier : le montant de la commission que prélève Apple sur tous les achats de services ou de contenus numériques via le système de paiement fourni sur iOS. Ce montant s’élève à 30 % de la valeur de la transaction, mais uniquement la première année. Il descend ensuite à 15 % les années suivantes.
Pour illustrer ce cas de figure, Proton Mail a témoigné dans un article dédié expliquant que les « frais excessifs d’Apple ont obligé Proton à augmenter les prix dans l’App Store, rendant ainsi nos applications accessibles à moins d’utilisateurs, et plus coûteuses pour tous les utilisateurs ». Réagissant à une question d’internaute, Proton Mail suggère que cette commission ne devrait pas excéder 5 %.
Le dernier grief que développe la coalition porte sur le manque de liberté qui est laissée aux utilisateurs. Les applications pour iOS ne sont en principe accessibles que via l’App Store, que gère Apple. Impossible d’aller sur une autre plateforme, alors que, sur Windows par exemple, il est possible d’aller chercher un logiciel depuis n’importe quel site, comme le site officiel ou un site auquel on se fie.
Les applications doivent également passer par le système de paiement d’Apple, car tout écart peut être sanctionné d’une exclusion de la plateforme (c’est ce qu’il s’est passé avec Fortnite, lorsque Epic Games a tenté d’inciter sa communauté à régler ses achats ailleurs, et ainsi bénéficier d’une réduction). Ce cadre vise à permettre d’imposer la fameuse taxe d’Apple et ainsi lui garantir une rentrée d’argent, se plaint la coalition.
Au-delà des évidentes considérations financières pour ces applications, les désaccords soulevés par la coalition touchent à une réflexion plus générale autour de la neutralité des terminaux, semblable dans ses principes à la neutralité du net. C’est ce que souligne le président français de l’autorité de régulation des télécommunications, Sébastien Soriano, dans un message.
« Cela fait maintenant deux ans et demi que l’Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep) plaide pour la neutralité des terminaux. Les systèmes d’exploitation sont les nouveaux gardiens de l’Internet. La neutralité du net est de la plus haute importance, mais il est tellement bizarre de ne s’inquiéter que des ‘tuyaux’ (les réseaux) et d’ignorer les ‘robinets’ (les appareils) ».
Le régulateur avait « cartographié différents types de limites à l’ouverture de l’Internet qui ne résultent pas des pratiques des FAI mais des caractéristiques des équipements terminaux ou des décisions des fournisseurs de systèmes d’exploitation ». Cela inclut les smartphones, mais aussi les consoles, les ordinateurs, les téléviseurs, les box Internet ou encore les objets connectés.
Les pratiques d’Apple font l’objet de plusieurs enquêtes de la part de la Commission européenne. Sont dans le collimateur l’App Store, Apple Pay, Apple Music et Apple Books, dont les services sont accusés de pratiques anticoncurrentielles. « C’est Apple qui fixe les règles applicables à la distribution des applications aux utilisateurs d’iPhone et d’iPad », rappelait Bruxelles en déclenchant ses investigations.
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