Si vous avez suivi la conférence d’Apple consacrée au nouvel iPhone 12 et à toutes ses déclinaisons, peut-être avez-vous remarqué une petite différence entre les modèles destinés au marché américain et ceux prévus pour la France, située sur la tranche de chaque smartphone. Il s’agit en fait d’une antenne destinée au mmWave. Les USA y ont droit, mais pas l’Hexagone.
Qu’est-ce que le mmWave ?
Il s’agit simplement d’une autre manière d’écrire « ondes millimétriques » en anglais, et en raccourci, « mm » étant le symbole du millimètre et « wave » voulant dire ici « onde ». En français, cela pourrait donner « OndeMm » ou « MmOnde », mais c’est la formulation « ondes millimétriques » qui s’est imposée. Dans les années à venir, le mmWave est amené à occuper une place centrale dans la 5G.
Qu’est-ce qu’une onde millimétrique ?
Leur nom donne la réponse : ce sont des signaux dont la longueur d’onde est très étroite. L’écart entre deux crêtes est sous le centimètre et descend jusqu’à l’échelle du millimètre. En physique, plus cette distance entre deux points consécutifs (ici, les deux crêtes, qui sont en quelque sorte le « sommet » du signal) est courte, plus l’onde électromagnétique est énergétique.
Les ondes millimétriques, comme toutes les ondes électromagnétiques, utilisent l’unité de fréquence (hertz ou Hz) pour s’exprimer. Dans le monde des télécoms par exemple, la 4G se sert par exemple des fréquences 700 mégahertz (MHz), 800 MHz, 1 800 MHz, 2,1 gigahertz (GHz) et 2,6 GHz. Ces préfixes indiquent que l’on multiplie par un million (méga-) ou par un milliard (giga-) l’unité qui suit.
Dans le cas des ondes millimétriques, les fréquences qui ont été identifiées pour faire de la 5G sont notamment la bande dite 26 GHz (qui irait en fait de 24,25 à 27,5 GHz), mais aussi plusieurs bandes candidates entre 31,8 et 86 GHz. Ces bandes candidates sont toutefois à l’étude et rien n’est vraiment acté. Seule la bande des 26 GHz est sur les rails de la 5G. Et on le voit bien à sa valeur : elle est plus élevée que les autres.
Même la toute première bande de fréquences qui va servir pour la 5G, à savoir la bande 3,5 GHz (qui va précisément de 3,4 à 3,8 GHz) n’est pas aussi énergétique. D’ailleurs, elle n’est pas considérée comme une onde millimétrique, puisque cette appellation concerne toutes les fréquences au-delà de 24 GHz. En dessous, on parle plutôt d’ondes centimétriques, car l’écart entre deux crêtes est plus grand.
Quels iPhone ont accès aux ondes millimétriques ?
Tous les modèles d’iPhone qui ont été présentés par Apple le 13 octobre, c’est-à-dire l’iPhone 12, l’iPhone 12 Mini, l’iPhone 12 Pro et l’iPhone 12 Pro Max. Les précédentes générations ne sont pas concernées. Mais attention ! Ce sont seulement les modèles destinés au marché américain qui y ont droit. En France, les exemplaires qui seront commercialisés ne géreront pas le mmWave.
C’est ce qu’explique Apple dans son communiqué : « aux États-Unis, les modèles prennent en charge les ondes millimétriques, fonctionnant sur des bandes à plus haute fréquence, qui permettent aux iPhone 12 [toute déclinaison, NDLR] d’atteindre des vitesses de 4 Gbit/s, même dans les zones à forte densité de population ». Vous pouvez toujours passer par l’import, mais ça ne vous servira à rien.
Pourquoi une telle différence de traitement entre les USA et la France ?
Apple n’a nullement repris le slogan de Donald Trump, « America First », pour faire plaisir au locataire de la Maison-Blanche. Il s’agit simplement d’un constat : les États-Unis sont un peu plus en avance dans le déploiement de la 5G que la France. Certes, l’Hexagone s’y met, avec un réseau commercial 5G qui doit faire ses premiers pas en décembre 2020. Mais ce réseau fonctionnera en 3,5 GHz, et non pas en 26 GHz.
Ce constat pourrait s’appliquer plus généralement à l’ensemble de l’Europe. Le régulateur des télécoms observe que l’Amérique a lancé la 5G « sur des bandes de fréquences différentes de l’Europe et notamment des bandes de fréquences supérieures à 6 GHz ». En France, il existe certes des plateformes d’expérimentation depuis 2019, mais cela n’a rien à voir avec un réseau commercial 5G.
Comme le faisait savoir cet été le président de l’Autorité de régulation des communications électroniques, Sébastien Soriano, « il n’y a pas de calendrier sur l’attribution des ondes millimétriques pour le moment » en France. La procédure pour la bande 26 GHz ne devrait pas être un sujet avant quelques années. Et même si c’était le cas immédiatement, tout un réseau de 5G en ondes millimétriques resterait à bâtir.
On pourrait arguer qu’Apple aurait pu anticiper l’arrivée de la 5G millimétrique en France en proposant à la clientèle française ce modèle avec l’antenne mmWave dès à présent.
Mais cela se heurte à deux réalités : d’abord, le calendrier pour cette bande des 26 GHz est flou. Ensuite, le fait est que la fréquence de renouvellement des smartphones est courte, de l’ordre de trois ans en moyenne pour un particulier. Dès lors, il n’y avait pas de raison objective d’inclure un composant qui n’aurait eu aucun rôle à jouer. Apple pourra toujours réviser son avis avec l’iPhone 15, 16 ou 17 par exemple.
Cela étant, cela ne veut pas dire que les modèles d’iPhone annoncés le 13 octobre ne vont pas pouvoir faire de la 5G en France. Ils restent quand même compatibles avec la 5G via la bande 3,5 GHz. Seulement, sachez que si vous achetez l’iPhone 12 dès le 23 octobre, l’ultra haut débit mobile ne sera pas accessible en France immédiatement : le réseau n’existe pas encore et il sera très embryonnaire au départ.
Que permettent les ondes millimétriques ?
Comme l‘explique le régulateur des télécoms, la bande 26 GHz « possède des propriétés intrinsèquement différentes des autres bandes de fréquences, inférieures à 6 GHz, utilisées par les opérateurs mobiles ». Essentiellement, ces fréquences vont offrir des débits en 5G très largement supérieurs à la bande 3,5 GHz, l’autre gamme de fréquences en 5G.
L’Agence nationale des fréquences abonde : ces bandes millimétrique « vont permettre d’atteindre des débits beaucoup plus importants ». La bande 26 GHz sera même « la clé du très haut débit de ‘la fibre sans fil’ que promet la 5G ». D’une certaine façon, la bande des 26 GHz va fournir de la « vraie 5G ». Mais alors, pourquoi diable la France s’est-elle lancée sur la bande 3,5 GHz, si c’est une « fausse 5G » ?
C’est un peu plus compliqué : s’il est exact que les ondes millimétriques délivrent un bien meilleur débit, parce qu’elles sont plus énergétiques et ont des signaux plus resserrés, elles ont de grands défauts : d’abord, leur portée est courte, beaucoup plus que la 3,5 GHz. En outre, les ondes millimétriques pénètrent mal dans les bâtiments. La bande 3,5 GHz est ici aussi bien meilleure.
C’est pour cela que la France a privilégié la bande 3,5 GHz, car lle offre des performances convenables en débit, en portée et dans les bâtiments, là où la bande 26 GHz brille surtout par le débit. Mais à terme, l’idée serait de mixer plusieurs bandes à la fois, pour profiter de leurs points forts respectifs. Il est aussi prévu de basculer la bande 700 MHz en 5G, qui elle a une portée élevée et est efficace en intérieur.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez-nous sur WhatsApp !