On l’a vu avec Lille et d’autres communes : toutes les municipalités ne paraissent pas désireuses d’accueillir la 5G sur leur territoire. Des appels à un moratoire sur l’ultra haut débit mobile se font entendre, notamment à gauche de l’échiquier politique. Cette technologie fait même l’objet de rumeurs et de théories du complot, et des actes de vandalisme sont aussi observés contre des installations.
Dès lors, le déploiement de la 5G risque-t-il de connaître un nouveau ralentissement, alors que la crise du coronavirus a déjà perturbé le calendrier initialement prévu par l’Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep), les opérateurs et les pouvoirs publics (la date des enchères pour les fréquences a été repoussée de plusieurs mois). Le président de l’Arcep, Sébastien Soriano, n’y croit pas.
Tenir compte de la réalité du terrain
Par contre, le patron du régulateur des télécoms, qui quittera ses fonctions en fin d’année, estime que les opérateurs ont tout intérêt à tenir compte de la réalité du terrain et à ouvrir un dialogue avec les collectivités territoriales. C’est ce que l’intéressé a conseillé sur BFM Business le 2 novembre. Et cela, même si juridiquement les opérateurs n’ont pas du tout besoin de l’avis du maire sur ce sujet.
« À partir du moment où les opérateurs auront dans leurs mains les autorisations des fréquences que l’Arcep va leur donner, ils peuvent déployer le réseau. Ils n’ont pas besoin de l’autorisation du maire », rappelle l’intéressé. Mais il serait sage à ses yeux qu’Orange, SFR, Free Mobile et Bouygues Telecom tiennent compte de ce qui se passe dans telle ou telle localité.
« Ce serait vraiment de bon aloi que les opérateurs ne passent pas en force »
« Il y a plusieurs grandes municipalités, comme Paris, Nantes ou Beauvais, qui ont décidé de faire des concertations locales », note Sébastien Soriano. Des réunions pour discuter de la 5G, mais aussi pour réfléchir à son utilité, imaginer les éventuels services publics qui pourraient naître avec l’ultra haut débit mobile, ou encore sur la façon dont les installations occuperont l’espace public.
« Ce serait vraiment de bon aloi que les opérateurs respectent ces concertations et ne passent pas en force », poursuit-il. Surtout là où les édiles tentent de rapprocher les points de vue parmi les administrés, qui comptent aussi bien des anti que des pro 5G. « Nous les invitons à respecter la démocratie locale et à s’inscrire dans un dialogue avec les territoires ». Et de se montrer convaincants, en somme.
Cette manière de faire va peut-être contrarier les opérateurs eux-mêmes, qui aimeraient bien pouvoir rapidement rentabiliser les achats de ces licences 5G (en tout, ils vont devoir débourser près de 2,8 milliards d’euros, mais ce montant pourra être remboursé sur des années), mais aussi financer la construction des infrastructures. Or, pour vendre des forfaits plus chers, il faut pouvoir les adosser un réseau 5G.
Et quid des refus plus dogmatiques, pouvant venir de Lille — Martine Aubry ayant estimé qu’il était urgent d’attendre en la matière — ou de mairies tenues par des élus écologiques ? Pour Sébastien Soriano, « ça n’est pas du dialogue ». Pour ces communes, il faudra peut-être que les opérateurs fassent l’impasse pour un temps et se concentrent plutôt sur des villes plus accueillantes.
Ces coups de frein locaux ne devraient pas véritablement affecter le déploiement à long terme de la 5G, estime toutefois Sébastien Soriano. « Le déploiement sera progressif. On va commencer par quelques métropoles et on n’aura pas de déploiement vraiment national avant 2022-2023. Ce n’est pas ça qui va changer fondamentalement la carte de France de la 5G », conclut-il.
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