Les données collectées par les appareils sont de véritables mines à informations et les enceintes connectées n’échappent pas à l’intérêt des enquêteurs.

Au tribunal de Ratisbonne, en Allemagne, deux enregistrements d’une enceinte connectée Amazon Echo ont servi de preuve dans un procès pour homicide, rapporte la radio publique bavaroise. Situé dans la chambre de la victime, l’appareil équipé de l’assistant connecté Alexa a permis de confirmer la présence du meurtrier présumé sur les lieux, car sa voix se fait entendre sur les extraits.

D’après le site local, cet appel aux enregistrements d’Amazon comme preuve est une première en Allemagne. La justice a utilisé une procédure prévue dans les textes de loi, qui permet de faire une demande des enregistrements s’ils permettent de débloquer une affaire. Amazon l’a acceptée, et si l’entreprise avait refusé, le procureur aurait dû se tourner vers les entreprises américaines. Des dispositifs juridiques similaires existent en France, et dans bien d’autres pays.

Une enceinte Amazon peut servir à résoudre une enquête. // Source : Capture d'écran YouTube / Amazon

Une enceinte Amazon peut servir à résoudre une enquête.

Source : Capture d'écran YouTube / Amazon

La demande d’enregistrement ne se fait pas n’importe comment

Aux États-Unis, l’appel aux enregistrements des enceintes connectées est devenu monnaie courante depuis la première demande, faite en 2016, comme le souligne Wired. Amazon avait dans un premier temps refusé de fournir les enregistrements, avant de s’exécuter un peu plus tard. En novembre 2019, un autre cas de meurtre en Floride avait fait parler : l’avocat de l’accusé souhaitait faire appel aux enregistrements de deux Amazon Echo pour prouver l’innocence de son client. Généralement, les demandes d’accès aux données vocales visent à appuyer le dossier à charge, et non l’inverse.

Cette remise des enregistrements aux forces de l’ordre est prévue par la loi, et les différentes entreprises avertissent les utilisateurs au sujet de ces dispositifs. Les enquêteurs doivent remplir des documents administratifs, préciser quelles informations ils recherchent, et quelle sera leur utilité dans l’avancement de l’enquête. La justice a le pouvoir de refuser ces demandes si elle les juge injustifiées, de même pour l’entreprise qui possède les données. En Europe, l’équation se complique encore, puisqu’il faut trouver le juste équilibre entre l’aide aux enquêtes et la défense de la vie privée, érigée au rang de valeur européenne par le règlement général sur la protection des données.

Bref, en théorie, ces dispositifs juridiques doivent filtrer les demandes d’accès aux enregistrements pour éviter tout abus.

Les enregistrements ne sont pas utilisés comme vous le pensez

Quand on parle des enregistrements, certains pensent que l’enceinte a capté les bruits du meurtre et les cris de la victime. C’est très rarement le cas. Et pour cause : les seuls enregistrements en possession d’Amazon sont ceux déclenchés par la commande « Alexa ». Si le micro des enceintes est tout le temps activé, il ne fait tourner qu’un algorithme très spécialisé, qui ne fait que chercher le mot déclencheur, ou « wake word » : « Alexa », « Dis Siri », « Hey Google »… Il ne conserve pas le reste des bruits environnants.

En revanche, une fois le mot déclencheur prononcé, l’enceinte commence son enregistrement. Le début de l’enregistrement est indiqué par l’allumage d’un voyant sur l’enceinte, et sa fin par l’extinction du même voyant. Tous les sons captés pendant cette période sont conservés, et peuvent faire l’objet d’une demande de saisi par les forces de l’ordre.

Lorsque les enquêteurs font des demandes d’enregistrements, ils cherchent à en tirer des informations contextuelles plutôt qu’à disséquer le contenu des propos puisqu’il s’agit dans la majorité des cas de commandes comme « allume les lumières » ou « joue ma playlist préférée ». Est-ce que le suspect était dans la pièce à telle heure ? A-t-il mangé avec la victime ? Les enregistrements et leurs métadonnées peuvent permettre de facilement vérifier la version des faits d’un accusé. S’il affirme qu’il n’était pas sur les lieux quelques minutes avant le meurtre, mais que les enquêteurs l’entendent parler en fond sonore de l’enregistrement d’une commande pour éteindre la télévision, ils pourront prouver qu’il était sur les lieux.

Reste que parfois, les enceintes se déclenchent par erreur, et enregistrent des sons à l’insu de leur propriétaire. Elles pourraient donc enregistrer une scène de meurtre… mais ce serait une coïncidence.

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