Le 1er janvier 2021, il n’y aura pas seulement la page du Brexit qui se tournera. C’est aussi à cette date que le plan britannique pour sortir Huawei de ses réseaux télécoms commencera à produire ses premiers effets. En effet, conformément aux nouvelles consignes présentées par Londres le 14 juillet, les opérateurs vont devoir se passer de l’équipementier chinois pour leur matériel 5G.
La décision d’exclure Huawei du chantier de la 5G au Royaume-Uni s’est avérée être un revirement outre-Manche, puisque le pays avait au départ concocté un plan autorisant la société asiatique à contribuer un peu à l’arrivée de l’ultra haut débit mobile. Ce virage à 180 degrés est d’autant plus radical qu’il ne se limite pas à la simple exclusion commerciale : il est aussi question de retirer le matériel déjà en place.
Pour ce deuxième objectif, le calendrier est beaucoup plus étalé : le 10 Downing Street laisse aux opérateurs sept ans pour organiser le retrait de tous les équipements conçus par Huawei de son réseau 5G. Ce délai donne aux opérateurs un calendrier soutenable et à un horizon pas trop lointain pour y parvenir. À la place, le Royaume-Uni devrait se tourner vers des solutions européennes, comme Nokia et Ericsson.
Selon un calendrier mis à disposition en septembre, les grandes étapes britanniques sont les suivantes :
- 31 décembre 2020 : ne pas utiliser d’équipements Huawei dans les réseaux 5G si ces équipements ont été achetés après cette date ;
- 30 septembre 2021 : ne pas installer d’équipements Huawei dans les réseaux 5G après cette date, sauf pour la maintenance directe des équipements Huawei installés avant ;
- 28 janvier 2023 : ne pas utiliser les équipements ou services de Huawei dans le coeur du réseau après cette date ;
- 31 décembre 2027 : ne pas utiliser les équipements ou services de Huawei dans une partie quelconque de son réseau 5G après cette date.
Nouvelle donne avec les sanctions américaines contre Huawei
Dans son communiqué de l’époque, le gouvernement britannique indiquait qu’une nouvelle analyse menée par le centre national de cybersécurité (NCSC) a conduit Londres à revoir sa position. Selon ses services, les sanctions prises par les États-Unis contre Huawei sont en train d’avoir pour effet d’empêcher l’équipementier chinois à avoir « accès à la technologie sur laquelle elle s’appuie actuellement ».
Le NCSC constate que dans ces conditions, Huawei doit « procéder à une reconfiguration majeure de sa chaîne d’approvisionnement », mais les restrictions prises par Washington « rendent impossible de continuer à garantir la sécurité des équipements de Huawei à l’avenir ». Or, impossible de se lancer dans un programme d’infrastructure qui existera sur des dizaines d’années sans visibilité.
D’ici le 1er janvier 2028, les opérateurs britanniques pourront donc continuer à utiliser le matériel Huawei déjà en place, mais à la condition de l’écarter peu à peu. Et dès le 1er janvier 2021, ils n’auront plus le droit d’en installer de nouveaux. Néanmoins, au cours de la fenêtre de sept ans qui sépare les deux échéances, d’autres règles de sécurité continueront à produire leurs effets.
Ainsi, les opérateurs sont déjà dans l’obligation de s’abstenir d’utiliser du matériel Huawei dans le cœur de leur réseau, d’en installer à proximité de sites sensibles (comme des bases militaires, des sites nucléaires ou des lieux de pouvoir) et de dépasser le seuil de 35 % de matériel Huawei sur un même réseau. Cette statique devant donc être amenée à zéro d’ici sept ans.
Si les sanctions américaines sur Huawei ont pesé dans la décision britannique, ce n’est sans doute pas la seule raison. D’autres considérations ont pu jouer : la nécessité de garder une bonne relation avec les USA, mais aussi avec l’Union européenne, dans un contexte de Brexit où le Royaume-Uni ne se retrouve dans aucun grand bloc commercial ou encore les difficultés de faire fructifier ses relations économiques avec la Chine.
À cette liste, il est certainement possible d’ajouter le comportement de Pékin à l’égard de Hong Kong, une ancienne colonie britannique, malgré les accords passés entre les deux parties pour assurer l’autonomie à long terme de la ville, et aussi plus généralement une réalité géopolitique plus froide, dans laquelle les grandes puissances s’espionnent sans vergogne dans le cyberespace.
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