Les plateformes retournent leur veste à 15 jours de la passation de pouvoir entre Donald Trump et Joe Biden.

Plusieurs plateformes ont décidé d’empêcher à Donald Trump d’avoir accès à ses comptes officiels depuis le 6 janvier 2020 et l’invasion du siège du Congrès américain par ses supporters, des centaines de suprémacistes blancs persuadés que leur candidat a gagné l’élection, alors qu’il n’en est rien.

Le président sortant avait frontalement encouragé ses partisans à « se rendre au Capitole » à Washington D.C. pour manifester leur mécontentement. Pire, pendant l’invasion du 6 janvier, Donald Trump a publié une vidéo surréaliste dans laquelle il leur demandait, certes, de « rentrer chez eux », mais leur disait aussi qu’il les « aimait », qu’ils étaient « magnifiques » et qu’il les comprenait.

Depuis la mi-novembre, le président sortant refuse d’admettre la défaite électorale et multiplie les accusations fallacieuses de fraude, fragilisant volontairement toute notion de processus démocratique.

L’invasion du Capitole a causé la mort de plusieurs personnes, dont une femme militante et un policier en service au sein du bâtiment. Ces actes de violence, en plus de l’invasion, ont été utilisés par les plateformes pour justifier un bannissement historique des comptes officiels de Donald Trump.

La liste des plateformes qui ont banni ou restreint Donald Trump

Les sites qui ont pris des mesures plus nuancées

Avant d’en arriver à de pareilles extrémités, Twitter avait choisi de suivre une politique moins radicale : la plateforme avait restreint pendant 12 heures le compte de Donald Trump tant qu’il n’aurait pas supprimé certaines publications qui « incitent à la violence ». Une fois qu’il les a supprimées, le président sortant a ensuite retrouvé les clés de son compte.

C’est pour cette raison que l’on a pu trouver sur Twitter, ce 8 janvier au matin, une vidéo très différente de l’homme politique, qui condamne enfin l’invasion du Capitole. Celle-ci n’a donc pas pu être publiée sur Facebook par son équipe de campagne.

YouTube, qui avait supprimé la vidéo où Donald Trump donnait raison aux suprémacistes qui ont envahi le Capitole, a également laissé cette nouvelle vidéo en ligne. En revanche, la plateforme vidéo qui appartient à Google a assuré qu’elle allait, à compter du 7 janvier, censurer toutes les chaînes qui « publient des vidéos qui partagent des fausses affirmations » concernant les élections américaines.

Les plateformes qui ne modèrent rien

Pendant ce temps, d’autres plateformes en ont profité pour rappeler qu’elles ne modèreraient rien. Odysee, le « Youtube libre » qui attire bon nombre de conspirationnistes, a affirmé qu’il n’y avait aucune raison que les plateformes aient le pouvoir de « censurer le président en exercice, ou n’importe quel chef d’État.»

Ce discours s’appuie sur une illusion de « neutralité » que bon nombre de plateformes ont abandonnée progressivement, depuis des années, à mesure qu’a été mise au jour leur responsabilité dans la propagation d’informations volontairement mensongères et des idées extrémistes, pouvant aller jusqu’à causer des morts.

Le fait est que la majeure partie des plateformes n’a jamais réussi à gérer une situation exceptionnelle, celle d’un chef d’État, démocratiquement élu, qui utilise leurs outils pour propager ses discours extrémistes et encourager la violence et la haine de manière si répétitive et quotidienne. Ces mêmes entreprises sont critiquées depuis des années pour le manque de moyens qu’elles investissent dans la modération, et donc la manière dont elles permettent le partage de contenus illégaux, le cyberharcèlement, l’organisation de « raids » ciblés, la propagation d’informations volontairement mensongères dangereuses.

Les réactions actuelles, aussi diverses qu’impulsives, s’inscrivent dans la continuité d’années d’absence de réflexion sur la place des réseaux sociaux dans les processus démocratiques. Les récents événements permettront-ils une grande remise à plat concrète de la responsabilité et la place des géants du web dans le monde ?

(mise à jour avec la suspension du compte Twitter)

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