Le réseau social Parler, qui sert de refuge aux États-Unis pour tous les conservateurs, radicaux et militants pro-Trump qui accusent les grands sites communautaires (Twitter, Facebook) d’appliquer une modération trop dure à leur encontre, est de nouveau en ligne — non sans quelques difficultés. Un message publié par la plateforme fait état de soucis techniques non précisés, qui empêchent de profiter du service.
La remise en état de Parler, de toute évidence encore fragile, n’est pas le fait d’Amazon, mais d’un autre hébergeur web, Epik. La réputation de cette entreprise est sulfureuse. La société, basée à Seattle, est décrite par Vice comme un « refuge de l’extrême droite », mais aussi un lieu où peuvent exister des contenus extrémistes ainsi que des néo-nazis, des suprémacistes, des complotistes et des négationnistes.
Pendant un temps, Epik a fourni ses services au tristement célèbre 8chan, mais aussi à Gab, qui est un Parler-bis.
« Notre retour est inévitable grâce à un travail acharné et à une persévérance contre toute attente », s’est félicité le 18 janvier le fondateur de Parler, John Matze. « Malgré les menaces et le harcèlement, pas un seul employé de Parler n’a démissionné. Nous devenons plus proches et plus forts en tant qu’équipe ». Dans un autre message, de Parler cette fois, le site promet qu’il sera pleinement opérationnel bientôt.
Amazon estime qu’il n’a pas eu le choix
De son côté, Amazon refuse d’accueillir à nouveau Parler sur son service d’hébergement (Amazon Web Services — AWS) tant que le réseau social ne met pas en place une vraie politique de modération. Selon Ars Technica, qui cite Amazon dans un document transmis à la justice (Parler a attaqué Amazon), l’hébergeur a alerté plus de cent fois Parler de l’existence de contenus violents et dangereux.
« Cette affaire concerne le manque de volonté et l’incapacité démontrés par Parler » de retirer activement des contenus dangereux, écrit ainsi AWS, y compris des messages qui incitent et planifient « le viol, la torture et l’assassinat de fonctionnaires et de citoyens ». La suspension de Parler a été prise « en dernier recours », pour éviter qu’on puisse accéder à ces contenus et en prévision de l’arrivée au pouvoir de Joe Biden, dont la prise de fonction pourrait être perturbée par des jusqu’au-boutistes.
Les insuffisances en matière de modération sur Parler ont aussi le motif sur lequel se sont fondés Google et Apple pour éjecter l’application mobile de Parler. Les deux poids lourds, qui opèrent les deux seuls grands systèmes d’exploitation mobile, et contrôlent par ailleurs les boutiques d’applications associées, pourraient toutefois autoriser son retour si de vrais changements ont lieu. C’est ce qu’a laissé entendre le PDG d’Apple.
Une aide venue de l’Est
Mais le fait qu’Epik soit venu à la rescousse de Parler n’est sans doute pas l’élément qui fera couler le plus d’encre. En effet, il apparaît que tout le trafic du réseau social passe désormais par la Russie, ce qui soulève toutes sortes de questionnements sur l’implication de Moscou, dont l’ombre n’a cessé de planer sur le mandat de Donald Trump, mais aussi sur la capacité des USA à repérer et retrouver d’éventuels insurgés qui s’organiseraient sur Parler en vue de commettre une action sur le sol américain.
https://twitter.com/VickerySec/status/1351227537985318929
Selon les informations obtenues par Reuters, Parler bénéficie d’un appui technique d’une société russe, DDoS-Guard, qui est spécialisée dans la fourniture de services aux sites web — en particulier, elle propose des outils pour se prémunir des attaques par déni de service distribuées (DDOS — distributed denial of service), en absorbant, en déviant ou bien en atténuant un trop grand afflux de connexions.
DDoS-Guard est aussi un prestataire recherché par les sites extrémistes, racistes et complotistes, indique l’agence de presse américaine. 8chan a par exemple fait appel à ses services. Reuters signale aussi que DDoS-Guard est potentiellement proche du pouvoir russe, car il a apporté son aide technique à des sites gouvernementaux — il n’est toutefois pas démontré que cette aide ait été poussée par le Kremlin.
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