En ces temps de pandémie mondiale, le traitement réservé à nos données de santé est un sujet de débat intense. Il n’y a qu’à voir la polémique qui a entouré le Health Data Hub en France pour comprendre à quel point le sujet est inflammable. Et pour cause, ces informations touchent souvent à l’intimité la plus stricte.
Dans ce contexte délicat, Eric Schmidt, l’ancien PDG de Google, a livré sa vision à lui du futur de la médecine. Dans une interview publiée le 11 mai 2021, il explique qu’il aimerait « que les règles de confidentialité soient modifiées pour que le consentement soit donné par défaut pour la recherche médicale. » Une position à l’inverse de ce qui se fait aujourd’hui ou la patientèle doit autoriser le partage de ses données, qui sont privées par défaut.
Futur président d’un organisme de recherche
« Tous les grands systèmes de soins de santé disposent d’une grande quantité d’informations sur leurs patients, et celles-ci sont, comme il se doit, contrôlées par la loi, les avocats, etc. Si vous voulez faire des recherches, vous pouvez le faire sur 50 ou 100 personnes, mais il est très difficile d’obtenir une étude à l’échelle de la population suffisamment importante pour que ces algorithmes puissent vraiment jouer », explique-t-il pour justifier sa position.
En plus d’être l’ancien PDG de l’une des plus grandes firmes du monde, Eric Schmidt va aussi devenir en juin prochain le président du Board Institute, un organisme de recherche médicale de renommée aux États-Unis qui collaborent notamment avec le MIT et des centres hospitaliers universitaires à travers le pays. De quoi donner un autre écho à ses déclarations, qui ont de quoi surprendre, alors que la protection des données personnelles privées est un des acquis que de nombreux organismes et citoyens défendent à tout prix, à fortiori quand il s’agit d’informations médicales.
La peur de voir ces données utilisées à mauvais escient a déjà fait naitre plusieurs controverses. Au moment du débat sur le Dossier Médical Partagé (DMP) en France, certains parlementaires expliquaient que « la centralisation numérique de tous les traitements, de tous les résultats des tests, de toutes les analyses, de toutes les prescriptions de patient est un risque majeur pour la confidentialité des données. » Outre-Atlantique, des abus ont déjà eu lieu. En 2020, une enquête du Wall Street Journal expliquait comment Google avait aspiré les données cliniques de millions de patients. Centraliser et partager des données de santé peut paraitre une bonne idée en théorie (surtout quand il s’agit d’aider la recherche), mais cela représente aussi un risque non négligeable pour la vie privée. Aucun système n’est inviolable et mettre toutes ses données de santé sur Internet c’est aussi accepter qu’elles puissent un jour fuiter.
L’IA plus forte que l’humain
Eric Schmidt a tout de même insisté sur le fait que ce partage par défaut devait se limiter aux domaines de la recherche et ne pas s’étendre à des usages commerciaux. Selon lui, ces masses de données inutilisées aujourd’hui pourraient permettre des avancées notables dans le domaine de la médecine. « La seule façon de le faire c’est de prendre une grande quantité d’expériences, puis d’utiliser l’IA pour rechercher des modèles qui ne sont pas apparents pour vous et moi. Parce que les gens les ont déjà regardés — ils ne les ont pas vus — mais l’ordinateur peut les voir », ajoute-t-il.
Ce n’est pas la première fois que Eric Schmidt s’exprime sur le sujet, en 2019 déjà il exprimait ce point de vue en ajoutant que les données de santé de tout le monde devraient être mises en ligne avec le reste des données cliniques venant des hôpitaux. « Nous aurions une image beaucoup plus complète de ce qui se passe dans un contexte de soins médicaux, ce qui nous permettrait d’améliorer les analyses de données, les prévisions et les soins de santé », expliquait-il alors
En France, le RGPD et le code de la santé publique encadrent le partage des données de santé et exigent un consentement libre et éclairé pour leur traitement.
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