Après Elon Musk, c’est au tour de la Chine de faire vaciller le bitcoin. Le 19 mai 2021, l’agence de presse Reuters a rapporté que le pays avait décidé de resserrer encore un peu plus son interdiction, à toutes les entreprises de paiement et les banques, de fournir des services liés aux transactions en cryptomonnaies.
La Chine était déjà sévère envers les monnaies virtuelles, mais cette fois-ci, ce sont trois fédérations bancaires chinoises de référence qui ont clairement exhorté les autres à ne « pas accepter […] ou utiliser de cryptomonnaies » comme moyen de paiement. Pire, elles affirment que les monnaies virtuelles ne « sont soutenues par aucune valeur réelle ».
Le bitcoin, la plus connue des cryptomonnaies, n’a pas tardé à faire les frais de cette annonce très sèche : son cours a baissé de 15 % en une journée. Désormais, un bitcoin s’échange à 31 000 euros, ce qui n’était pas arrivé depuis le mois de février.
Alors, certes, la monnaie virtuelle est encore bien plus hausse que l’an passé, mais cela représente tout de même une chute de 42 % en un seul mois.
La Chine n’est pas responsable à elle seule de cette dégringolade : il y a aussi la puissance de frappe de Tesla et de son patron Elon Musk, qui n’est pas connu pour avoir sa langue dans sa poche… ou faire dans la demi-mesure. Le 17 mai 2021, il a réussi à faire tomber de 10 points le cours du bitcoin en bourse, simplement avec un tweet.
Tout est lié au fait que Tesla, constructeur automobile spécialisé dans les véhicules électriques, a acheté en janvier 2021 pour 1,5 milliard de dollars de bitcoins, et autorisé dans la foulée le paiement en bitcoins. Cette nouvelle a fait monter le cours de la monnaie virtuelle en flèche — il faut dire qu’il s’agissait d’un très gros investissement, près de 8 % des liquidités totales de l’entreprise américaine.
Cependant, cette popularité n’a été que de courte durée. Le 13 mai 2021, Elon Musk a publié un tweet qui a tout changé : finalement, Tesla considère que le bitcoin est une cryptomonnaie qui pollue beaucoup trop, et décide de ne plus autoriser ses clients à payer avec.
Pourquoi le bitcoin est-il considéré comme polluant ?
Il est vrai que le bitcoin est une monnaie virtuelle qui a un « coût environnemental » énorme. Pour résumer très sommairement : pour qu’un bitcoin soit créé, il faut qu’il soit « miné ». Les personnes qui participent au réseau sur lequel existe le bitcoin (les « mineurs ») doivent en quelque sorte rendre « service » à ce réseau, et donner ce que l’on appelle des « preuves de travail », en résolvant des calculs très compliqués, grâce à des ordinateurs puissants. Lorsqu’il résolvent des calculs, et au bout d’un certain temps, les mineurs reçoivent des bitcoins en échange.
La pertinence de ces calculs n’est toutefois pas toujours prouvée : les mineurs sont encouragés à faire mouliner leurs ordinateurs juste pour montrer qu’ils travaillent. Les ordinateurs et serveurs sont par ailleurs gourmands en électricité, et une grande partie de cette électricité est encore fournie par l’énergie fossile (le charbon). Comme Elon Musk l’a lui-même admis, « la tendance autour des dépenses en énergie [autour du bitcoin] est complètement dingue.»
Tesla va-t-il vendre ses bitcoins ?
Le dernier enjeu est commun à tout ce qui touche à la bourse : c’est un marché qui réagit beaucoup aux annonces et à la confiance. Depuis la fin 2020, le cours des cryptomonnaies est monté en flèche, sans qu’un seul facteur précis en ait été la cause. L’engouement engendre l’engouement et, lorsque l’on voit qu’une monnaie est en train de prendre de la valeur, on est tenté de vouloir investir à notre tour. C’est d’ailleurs ce qu’a fait Tesla : en achetant pour 1,5 milliard de dollars de bitcoin, l’entreprise a fait monter la valeur du bitcoin… et gagné 300 millions de dollars (virtuels) en 24h.
Or aujourd’hui, un grand nombre d’investisseurs s’inquiètent de ce que Tesla compte faire de ses bitcoins. Si l’entreprise venait à tout vendre (même si elle a promis de ne pas le faire), ce serait une catastrophe pour le cours de la monnaie virtuelle, et cela pourrait faire perdre beaucoup d’argent à celles et ceux qui ont des bitcoins. Ironiquement, même si l’entreprise n’a pas encore vendu, la crainte qu’elle agisse en ce sens suffit déjà à faire baisser la valeur de la monnaie virtuelle. Bref, le cours du bitcoin baisse, car tout le monde a peur que le cours du bitcoin baisse.
D’ailleurs, l’effondrement de cette monnaie va bientôt avoir un nouvel effet : de nouveaux acquéreurs qui vont acheter des bitcoins au moment où celui-ci vaudra vraiment moins (on parle du pallier des 30 000 dollars, par exemple), dans l’espoir que le cours remonte par la suite. Et ces achats pourraient ensuite refaire remonter le cours du bitcoin. Bienvenue dans le monde de la bourse.
(Le « dip » est considéré comme un moment charnière, une période difficile, mais provisoire, de laquelle on pourra se sortir avec le temps, et beaucoup de persévérance.)
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