Au tournant des années 2000, il était de bon ton de se retrouver sur MSN Messenger pour discuter avec ses amis et s’envoyer des wizz à la figure. On peuplait également Caramail et ses fameux salons de discussion, thématiques ou non. Les « ASV » fusaient en privé, et, parfois, des propositions graveleuses. Si les ASV ont disparu du vocabulaire de l’internaute, ce n’est pas le cas des suggestions obscènes.
Et Caramail, alors ? Le site a décliné à partir du milieu des années 2000 et la marque a été rachetée en 2009 par l’entreprise allemande GMX. Disparu des écrans radars pendant une quinzaine d’années, le site a connu un rebond en 2016, mais sous la forme d’un service de messagerie proposant du chiffrement de bout en bout. Quant au tchat, il n’a pas grand-chose à voir avec les fameuses salles de clavardage de Caramail.
Même si le nouveau Caramail n’a plus beaucoup de points communs avec l’ancien, le nom est resté — il faut dire qu’il n’y avait pas forcément de raison de l’abandonner : son identité reste forte dans l’esprit des internautes trentenaires, quarantenaires et au-delà qui ont connu cette époque. C’est le marqueur d’une époque, comme les livres d’or (hé oui !), les MP3, eMule, Winamp et les jeux Flash.
Comme souvent dans la tech, il existe une petite histoire plaisante à connaître derrière le nom de Caramail. Peut-être avez-vous d’ailleurs déjà percé son secret. Il faut dire qu’il est un peu évident : une fois qu’on a l’œil dessus, impossible de s’en détacher. En effet, Caramail est un nom qui a été choisi pour jouer avec la sonorité du mot… caramel. Évident, mais encore fallait-il le savoir.
Béchamel, chamelle, hydromel ?
Cette histoire a été racontée par les trois fondateurs, Orianne Garcia, Alexandre Roos et Christophe Schaming, dans le Journal du Net. À l’image de toute startup voulant se lancer, trois problèmes se posaient alors aux partenaires : qu’est-ce qu’on lance ? Quel est notre modèle économique ? Comment nomme-t-on le service ? Pour cette dernière question, c’est un dictionnaire de rimes qui vient à la rescousse
Orianne raconte : « Problème n°1 : notre messagerie révolutionnaire n’a pas de nom. On a beau se creuser la tête, aucune idée géniale. Un soir, au resto, j’exhume de mon sac à main un vieux dictionnaire des rimes. Tous les noms se terminant par -mel pourront faire un jeu de mots avec mail. Mais des mots se terminant par -mel, il n’y en a pas des masses… et ils sont loin d’être sexys. »
Il est vrai que les propositions ne sont pas évidentes à exploiter : béchamel, chamelle ou bien hydromel, cite Orianne. En regardant ce qui est proposé, il semble difficile de vendre un service de messagerie avec ces mots, ou bien avec formel et informel. Quant à Gargamel, n’en parlons pas, à moins de vouloir avoir des problèmes avec les ayants droit de Peyo et l’éditeur Dargaud.
Si Orianne est convaincue par Caramail, Alexandre et Christophe sont timorés : ils jugent que « personne n’osera mettre une adresse @caramail.com sur un CV ». Mais la parade est trouvée : « si on va par là, Hotmail, ça veut dire courrier chaud, c’est pas terrible, non ? Vous avez un meilleur nom ? Franchement, Caramail, c’est pas mal je trouve, moi. C’est féminin, sans aucune connotation technologique, c’est parfait ! »
Ironie de toute cette histoire, le nom de Hotmail, s’il signifie bien courrier chaud, ne visait pas à donner l’impression que l’on peut recevoir à travers lui les courriers les plus grivois de sa région. Ni même de suggérer que Hotmail délivre rapidement aux internautes les dernières missives électroniques, comme si elles sortaient tout juste du four. Il s’agissait juste de faire un clin d’œil au… HTML.
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