Twitter a peut-être un plan pour cacher tous les vieux tweets, y compris ceux que l’on n’assume plus vraiment. L’option consisterait à archiver tous les messages passés après une certaine date. Mais l’option pourrait aussi avoir des répercussions indésirables.

« Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous. » Cette phrase, fréquente dans les feuilletons policiers, pourrait aussi s’appliquer sans peine à Twitter : en effet, il n’est pas rare de voir des internautes exhumer d’anciens messages publiés par d’autres sur le réseau social et les ressortir pour les mettre en difficulté. Ce phénomène, le site communautaire pourrait peut-être y mettre un terme à l’avenir.

Dans son édition du 2 septembre, Bloomberg signale que la plateforme planche sur des fonctionnalités visant à rendre le service plus convivial, en donnant d’autres options de contrôle à ses membres. Certains concepts (est évoquée la possibilité d’enlever des abonnés, de cacher les tweets que l’on aime, de quitter des boucles de conversation) sont clairement pensés à des fins de confidentialité.

Cacher ce tweet que je ne saurais assumer

L’une des réflexions en gestation pourrait toutefois avoir une incidence importante sur le réseau social. Il est envisagé de développer une fonction permettant d’archiver ses propres tweets au bout d’une certaine période de temps — au bout d’un certain nombre de jours, de semaines, de mois ou d’années. Une fois archivés, les messages seraient cachés à la vue des internautes, sauf de celui ou celle qui en est à l’origine.

Ce concept est, d’après Bloomberg, à un stade encore exploratoire et de définition. Il est évoqué des périodes de 30, 60 et 90 jours, mais aussi d’un an. Ces délais ne sont pas définitifs et pourraient être complétés par d’autres et, éventuellement, révisés. Il n’est pas non plus sûr que ce dispositif finisse par voir le jour, et, si c’est le cas, puisse bénéficier à tout le monde.

De fait, une telle option aurait pour effet de faire progressivement tomber dans l’oubli des messages anciens. Les bénéfices d’un masquage des vieilles publications sont évidents : cela évite de faire face au scénario d’un internaute qui entend mettre son interlocuteur face à ses contradictions, en montrant qu’il tenait telle position il y a quelques années et qu’il a un tout autre discours aujourd’hui.

Ce serait une sorte d’extension du droit à l’oubli : éviter de voir réémerger des erreurs, des dérapages, des emportements survenus il y a un certain nombre d’années, ce qui peut avoir parfois des répercussions significatives dans le temps présent.

Les cas d’espèce ne manquent pas : le cinéaste James Gunn avait été viré par Marvel pour de vieux tweets publiés en 2008 et 2009 contenant des blagues sur le viol et la pédophilie. Le chanteur Bilal Hassani avait été critiqué pour des tweets en 2014 — il avait alors 14 ans à l’époque — sur Dieudonné, Israël et les crimes contre l’humanité. Autre exemple : les tweets publiés en 2012 par une adolescente américaine ont aussi été remontés et ont eu pour effet de mettre sa famille en difficulté, avec le boycott de l’établissement tenu par son père.

D’aucuns pourraient dire qu’il est au contraire important de pouvoir connaître ce qu’a dit quelqu’un sur les réseaux sociaux, afin de pouvoir savoir à quoi s’en tenir. Sans doute cette réflexion peut s’envisager pour les personnes majeures qui sont en outre des personnalités publiques. On pourrait juger normal, par exemple, que dans le cas d’une ou un politique, on puisse avoir accès à des prises de position passées, afin de documenter son évolution éventuelle sur tel ou tel sujet.

Une telle fonctionnalité, indéniablement, a des répercussions à plusieurs niveaux. Elle peut certes générer des bénéfices indéniables pour certains publics. On pense par exemple aux mineurs qui peuvent avoir des propos enflammés, reflétant la fougue de la jeunesse, mais vis-à-vis desquels ils s’en dissocient une fois adultes — les cas de Bilal Hassani et de l’adolescente américaine en témoignent. Mais elle soulève aussi la question du suivi de la parole publique, entre autres.

Les conséquences négatives pourraient toutefois être plus limitées qu’on ne le pense : dans la mesure où l’archivage ne se déclencherait — si le déploiement de l’option a vraiment lieu — qu’au bout de plusieurs dizaines de jours, cela laisse du temps aux médias et aux autres comptes sur Twitter de voir des propos tenus par des personnalités publiques, et de les traiter, pour en discuter ou en critiquer la teneur. Même si le tweet lui-même n’est plus visible, des traces resteront via les sites web d’actualité ou encore certaines captures d’écran.

Les implications sont potentiellement considérables, mais la portée exacte de l’outil va dépendre de la manière dont Twitter entend le concevoir. Ce pourrait être un juste milieu (d’autant qu’on peut imaginer qu’une fois hors-ligne, il serait possible de passer en revue dans le calme les vieux messages, pour voir ce que l’on veut garder ou non) avec l’autre option qui existe et qui est encore plus radicale : il existe des outils tiers qui permettent d’effacer en masse ses messages sur le site. Cette fois, ils ne sont plus juste cachés : ils sont définitivement effacés.

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