Instagram serait nocif pour certaines utilisatrices, notamment les plus jeunes. Et la plateforme en a parfaitement conscience, selon une étude et plusieurs documents internes à Facebook. « 32% des jeunes filles ont déclaré qu’Instagram les faisait se sentir encore plus mal dans leur peau », explique notamment une note de 2020. Un chiffre impressionnant, mais qui n’a rien de nouveau : dès 2019, un document avait circulé en interne, expliquant qu’Instagram donnait « une image négative d’elle même à une jeune fille sur trois ».
C’est une longue enquête du Wall Street Journal publiée le 14 septembre qui a pu mettre au jour ces documents. Dans le premier volet des Facebook Files, comme le journal a surnommé ses recherches, le Wall Street Journal avait notamment relevé le fait que tout le monde ne bénéficiait pas du même traitement sur Facebook ou Instagram. Les personnalités connues ont notamment droit à une modération plus souple.
Dans son nouvel article, le Wall Street Journal s’est cette fois penché sur le problème de la santé mentale des utilisateurs d’Instagram, particulièrement des plus jeunes. Et le résultat est glaçant par son ampleur — et par le fait que Facebook n’a pas pris de mesures adéquates pour luter contre tous les problèmes créés par Instagram, alors que le réseau social était au courant de leur existence.
Des chiffres alarmants
Toutes les données que le journal a pu se procurer viennent de nombreuses études, commandées par Facebook depuis trois ans. Elles permettent d’avoir une vision très complète sur le site et ses effets sur ses utilisateurs — mais leurs conclusions n’ont jamais été partagées. Et surtout, Facebook les a gardées secrètes, raconte le Wall Street Journal.
Il faut dire que les résultats de cette enquête sont particulièrement mauvais pour Facebook et Instagram, et les chiffres sans appel. « Le fait de se comparer aux autres femmes sur Instagram peut changer la façon dont les jeunes filles se voient », explique un document partagé en 2020 sur le service de messagerie interne de Facebook, et que le Wall Street Journal a pu consulter. « Les adolescents estiment qu’Instagram est responsable de l’augmentation du nombre de dépressions et d’une anxiété croissante », est-il écrit dans une autre note. Pire encore, 13 % des jeunes Britanniques qui ont eu des pensées suicidaires et 6 % des Américains estiment que ces dernières sont dues à Instagram.
Ce ne sont pas les seuls chiffres qui donnent le vertige. Dans une autre étude citée par le Wall Street Journal et réalisée auprès d’adolescents aux États-Unis et au Royaume-Uni, 40% des utilisateurs qui se trouvent « peu séduisants » estimeraient que ce ressenti est lié en partie à Instagram. Les documents mis à jour font aussi mention du sentiment d’addiction que beaucoup de jeunes ressentiraient. « Les adolescents n’aiment pas le nombre d’heures qu’ils passent sur Instagram », est-il notamment écrit sur un des documents consultés par le Wall Street Journal, « mais ils ont l’impression de devoir être présents malgré tout […]. Ils ne peuvent pas s’arrêter, même s’ils savent que c’est mauvais pour leur santé mentale ». Un comportement malheureusement largement renforcé l’année dernière par la pandémie de Covid et les confinements.
Facebook ne fait rien pour changer les choses
Il y a plus grave encore que ces chiffres impressionnants et que la corrélation supposée entre Instagram et mal-être chez les jeunes utilisateurs d’Instagram : le fait que Facebook était au courant, et aurait, pendant des années, minimisé ses effets nocifs.
L’hypocrisie de Mark Zuckerberg est également soulevée par le journal. Le CEO de Facebook a notamment déclaré en mars 2021 lors d’une audition avec des sénateurs américains que les recherches de la plateforme avaient seulement conclu que « la possibilité d’être connecté à d’autres gens peut avoir un impact positif sur la santé.»
Les documents du Wall Street Journal montrent également que les initiatives de Facebook pour lutter contre l’anxiété de ses utilisateurs ne sont pas du tout adéquates. Le fait de pouvoir cacher le nombre de likes reçus sur ces publications, une fonctionnalité disponible depuis mai 2021, était notamment décriée en interne, car elle n’aurait « rien changé au problème », selon une note présentée à Mark Zuckerberg.
Néanmoins, cette option a malgré tout été rendue disponible sur la plateforme, car des dirigeants de Facebook auraient expliqué au CEO que la mesure pourrait les faire bien voir.
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