49 voix pour, 4 voix contre et aucune abstention. Le Parlement a adopté définitivement, mercredi 29 septembre 2021, le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique, après un examen à l’Assemblée nationale et au Sénat — suivi d’une commission mixte paritaire pour déboucher sur un texte commun entre les deux chambres.
Derrière un nom obscur se cache un texte qui réorganise la lutte contre le piratage sur Internet. Parmi les chantiers qui sont ouverts figure l’installation d’une nouvelle entité, l’autorité de régulation de la communication audiovisuelle numérique (Arcom), fruit de la fusion entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi).
« Le piratage est toujours un pillage : pillage d’une œuvre et pillage des droits des créateurs. Nous créons les outils pour que ces pratiques cessent. Nous poursuivrons ce combat », s’est félicité Aurore Bergé, députée et rapporteuse du texte. L’intéressée s’est penchée dès 2018 sur ces problématiques, en remettant un rapport proposant des pistes pour l’avenir de la Hadopi et la lutte contre le piratage des œuvres culturelles.
De nouveaux objectifs contre le piratage
Cette refonte de la lutte anti-piratage conserve son mécanisme de riposte graduée, qui consiste à prévenir de façon graduelle les internautes que leur adresse IP a été vue en train de récupérer une œuvre culturelle piratée. À travers ce dispositif, la loi cherche à forcer le ou la titulaire de la ligne Internet à prendre des mesures pour empêcher qu’elle serve à ces fins, au cas où l’internaute assure n’avoir rien fait.
Alors que la Hadopi était limitée aux échanges survenant sur les réseaux pair-à-pair (P2P), comme BitTorrent ou eMule, l’Arcom doit pouvoir se déployer contre les sites de streaming illicites et les offres de télévision par Internet (IPTV) litigieuses. Autrement dit, le législateur souhaite ajuster l’arsenal pour tenir compte de l’évolution des usages : les internautes ont en effet délaissé le P2P pour le streaming ou le téléchargement direct (DDL).
Contre ces nouvelles pratiques, qui ont fleuri au cours des dix dernières années, il est prévu de se servir de listes noires adressées aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI), pour qu’ils bloquent les sites délictueux, et aux moteurs de recherche pour qu’ils les déréférencent. En parallèle, un dispositif de lutte contre les sites miroirs est prévu, pour contrer, ou du moins limiter, les efforts entrepris pour contourner ces mesures.
Le texte survient dans un contexte où, pourtant, l’offre légale s’est considérablement développée au cours de ces dix dernières années. Il suffit de voir l’étendue de l’offre en matière de jeux vidéo, SVOD ou musique. Mais paradoxalement, la multiplication, en particulier dans la SVOD, de plateformes pourrait finir par relancer le piratage, avec des internautes refusant de s’abonner à dix services en même temps.
Au-delà des œuvres culturelles, le piratage des compétitions sportives est aussi un axe sur lequel la nouvelle régulation entend se déployer. Et avec célérité : l’objectif est de pouvoir bloquer, déréférencer ou faire retirer des flux immédiatement ou presque. Contrairement à un film ou une série, une fois le match diffusé, il n’offre quasiment plus d’intérêt. Ce sujet a d’ailleurs fait l’objet d’un autre texte de loi.
Pour les internautes qui s’adonnent au piratage, les mailles du filet se resserrent un peu plus. Mais seront-elles assez fines pour tous les attraper ? Cela reste à voir : la Hadopi a pu pousser des internautes à délaisser le P2P au profit du DDL ou du streaming. L’Arcom pourrait bien aboutir à des changements de DNS en pagaille, à accroître l’usage des VPN et à changer de moteur de recherche.
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