Après l’intense polémique Tether, les stablecoins continuent d’être critiquées. Le Trésor américain juge que ces cryptomonnaies «stables », de plus en plus populaires, doivent être régulées bien plus fermement.

C’est un rapport sans appel que vient de livrer le département du Trésor, la réserve fédérale US et d’autres régulateurs américains sur les stablecoins. Selon eux, ces cryptomonnaies dites « stables » font courir un risque financier significatif aux États-Unis et doivent par conséquent être régulées très fermement. Mais pourquoi ces cryptomonnaies inquiètent-elles tant les US ?

Comme leur nom l’indique, les stablecoins ont pourtant une volatilité bien moins grande que celle des cryptomonnaies classiques, telles que le bitcoin ou l’ether. La valeur de ces crypto « stables » est adossée à un autre cours, souvent celui d’une monnaie fiduciaire (dollar, euro, etc.) ou à celui d’un métal (or, etc.). Le cours des stablecoins va donc varier, mais de manière normalement bien plus mesurée que celui de cours de cryptomonnaies classiques.

Les US s’inquiètent cependant de voir la place très importante qu’occupent désormais les stablecoins. Ces cryptomonnaies sont en effet de plus en plus utilisées, car elles fluidifient les processus d’achat et de vente de cryptomonnaies. Au lieu de convertir leurs cryptomonnaies en dollars ou en euros, les investisseurs peuvent faire le choix de les convertir en stablecoins adossés à ces monnaies pour mettre leurs gains « à l’abri ». Le processus est plus rapide et plus simple. Par ailleurs, cela évite aux investisseurs d’avoir à déclarer leurs plus et moins-values (ils ne devront le faire que lors de l’année où ils convertiront leurs stablecoins en monnaie fiduciaire).

Il y a désormais 69 milliards de Tether en circulation. // Source : Tether

Il y a désormais 69 milliards de Tether en circulation.

Source : Tether

La crainte de mouvements de panique

Ces avantages ont séduit et permis aux stablecoins de se développer très fortement : ce marché pèse désormais plus de 110 milliards d’euros. Mais cette croissance rapide inquiète les autorités américaines. Les stablecoins ne sont pour l’heure pas du tout régulés aussi strictement que peuvent l’être des institutions bancaires. Le Trésor US juge que si des stablecoins se trouvaient en difficulté, cela pourrait créer des dommages collatéraux importants.

Les autorités américaines s’inquiètent particulièrement du risque qu’un ou des émetteurs de stablecoins perdent la confiance des utilisateurs, conduisant ces derniers à vouloir les revendre en masse. « Si des émetteurs ne sont pas en capacité de racheter leurs stablecoins lorsque leurs clients en font la demande, ou si des utilisateurs se mettent à douteur de leur capacité à le faire, l’inquiétude pourrait conduire un nombre massif d’utilisateurs à vouloir vendre leurs stablecoins, ce qui pourrait nuire aux autres personnes et au système financier plus généralement », détaille ainsi le rapport. Les régulateurs américains redoutent notamment que de tels mouvements de panique se propagent d’un stablecoin à un autre et génèrent un effet domino problématique.

La polémique Tether en toile de fond

À l’évidence, l’affaire Tether était encore vivace dans les esprits des auteurs de ce rapport. Le Tether est le stablecoin le plus populaire du secteur (il y en a désormais 69 milliards en circulation). Cette célébrité a cependant récemment conduit l’agence américaine chargée de réguler les bourses de commerce (la CFTC) à se pencher d’un peu plus près sur la société qui l’émet afin de vérifier sa fiabilité. Et ce faisant, elle s’est aperçue que Tether avait communiqué de manière fallacieuse sur son fonctionnement. L’émetteur du Tether promettait aux utilisateurs que, pour chaque USD Tether en circulation, il disposait en réserve d’un dollar américain (USD) sur ses propres comptes bancaires. En réalité, a révélé la CFTC, les réserves de Tether n’étaient « pas garanties la plupart du temps ».

Dans son communiqué de presse, la CFTC précise ainsi que Tether détenait suffisamment de réserves fiduciaires pour garantir ses tokens pendant seulement 27,6 % du temps, sur la période de 26 mois étudiée entre 2016 et 2018. « Contrairement à ce qui était affirmé, Tether ne détenait pas la totalité des réserves de son token USDT en dollars américains : elle s’appuyait sur des entités non régulées et des tiers pour détenir une partie de ses réserves. Elle avait également une portion de sa réserve en commun avec Bitfinex (nldr : une plateforme de crypto trading) », révèle l’agence, précisant qu’une partie des réserves de Tether provenaient, par ailleurs, de produits financiers non fiduciaires.

Réguler les émetteurs de stablecoins comme des banques

Dans ce contexte tendu, les régulateurs américains réclament que les stablecoins soient régulés bien plus fermement qu’à l’heure actuelle. Ils vont d’ailleurs assez loin dans leur réflexion puisqu’ils demandent que les établissements autorisés à émettre des stablecoins soient encadrés de la même manière que des banques, avec l’obligation d’avoir un certain niveau de réserves et une supervision de la réserve fédérale des États-Unis (la FED).

Il n’est pas sûr que le Congrès américain se mette d’accord sur des mesures de ce type. Les régulateurs ont cependant une deuxième option dans leur manche : le conseil de supervision de stabilité financière du Trésor américain pourrait évaluer la menace que posent certains stablecoins — avec la mise en place de nouvelles règles le cas échéant. À noter que les autorités américaines suggèrent également de ne pas autoriser des géants de la tech à émettre des stablecoins. Comme le souligne Bloomberg, cette recommandation risque de contrarier Mark Zuckerberg, le PDG de Meta (Facebook, WhatsApp, etc.) envisageant en effet de lancer une crypto de type stablecoin baptisée Diem.

Découvrez les bonus

+ rapide, + pratique, + exclusif

Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.

Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci

Il y a une bonne raison de ne pas s'abonner à

Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.

Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :

  • 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
  • 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
  • 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.

Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Vous voulez tout savoir sur la mobilité de demain, des voitures électriques aux VAE ? Abonnez-vous dès maintenant à notre newsletter Watt Else !