Le Parlement se déchire sur le système de repentir, qui vise à être une incitation supplémentaire à la vaccination. Approuvé à l’Assemblée nationale, il a été rejeté au Sénat.

Pour augmenter encore le niveau de couverture vaccinal en France face à la propagation du coronavirus, faut-il instituer un système visant à « pardonner » aux personnes fraudant le pass sanitaire, si en échange elles se font vacciner ? Cette piste a été envisagée à l’Assemblée nationale, et votée. Mais le Sénat en a décidé autrement, en commission des lois.

Un amendement poussé par le sénateur Philippe Bas, par ailleurs président de ladite commission, a tué ce mécanisme de repentir le 10 janvier 2021. Adopté, il a supprimé les alinéas correspondants dans l’article 1er du projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique. C’est ce texte qui va changer le pass sanitaire en pass vaccinal.

Un système de repentir pour les fraudeurs au pass ?

Le gouvernement et la majorité présidentielle proposaient d’éteindre l’action publique contre les personnes coupables d’utiliser et de détenir un faux pass pour échapper aux restrictions prises à des fins de santé publique et pour forcer la main du public à se faire vacciner, pour limiter les conséquences du virus sur la santé en cas d’infection.

En clair, les fraudeurs et fraudeuses pouvaient espérer échapper aux amendes si et seulement si ils justifiaient avoir reçu une première dose de vaccin dans un délai de 30 jours à compter de la date de l’infraction. Ces personnes avaient donc un délai d’un mois pour trouver un créneau, bénéficier de l’injection d’un des vaccins valables dans l’Union européenne, et présenter le justificatif adéquat.

Le système fait penser indirectement au dispositif de repentir fiscal pour pousser les personnes en délicatesse avec les impôts de rentrer dans le rang. Les Échos disaient en 2019 que la cellule de régularisation des avoirs à l’étranger, installée après l’affaire Cahuzac et fermée fin 2017, a traité plus de 47 000 dossiers en 5 ans, ce qui a permis de récupérer plus de 10 milliards d’euros.

Source : Melvyn Dadure pour Numerama
Ce mécanisme vise à pousser davantage de personnes à la vaccination, en se montrant magnanime en cas de découverte d’un faux pass. // Source : Melvyn Dadure pour Numerama

Le Sénat rejette l’idée en commission

Mais pour Philippe Bas et ses collègues, le dispositif imaginé ici est inadmissible : il s’agit d’un « dévoiement du droit pénal » et cela « va à l’encontre tant du principe d’égalité devant la loi, selon lequel il n’est pas possible de traiter différemment des situations similaires – deux personnes ayant commis une infraction liée au passe sanitaire. »

Pour les membres de la chambre haute du Parlement, « il semble plus conforme aux principes de notre droit de publier une circulaire de politique pénale afin de demander au Parquet de ne pas poursuivre ou de classer sans suite les infractions lorsque leur découverte résulte de la demande d’une personne disposant d’un faux justificatif de vaccination de se faire réellement vacciner. »

On doute que le Sénat, en séance publique, voudra revenir à cette incitation à la vaccination. Mais le sujet pourrait revenir sur le tapis en commission mixte paritaire, qui sera mise en place pour gommer les différences entre les textes votés à l’Assemblée nationale et au Sénat. Les députés ayant le dernier mot, peut-être se décideront-ils finalement à réintroduire la mesure.

Selon les statistiques fournies dans l’application TousAntiCovid en date du 9 janvier, le taux de couverture vaccinale en France est de 77,5 % pour les personnes âgées de 5 ans et plus. Cette baisse par rapport aux statistiques précédentes s’explique justement par la prise en compte de la classe d’âge 5-11 ans, jusqu’à présent non prise en compte. Elle était d’environ 90 % juste avant.

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