Stadia a de nombreux défauts, mais la communication est très certainement son plus important. Lancé en 2019 par un Google à l’époque convaincu d’avoir développé la plate-forme vidéoludique du futur, le service de cloud-gaming a disparu des radars en quelques semaines. Google, connu pour son manque d’investissement envers certaines de ses divisions, a récidivé en oubliant complètement son service. Deux ans et demi après, qui pense à Stadia quand on lui parle de jeux vidéo ?
Pourtant, en tant qu’utilisateurs réguliers de Stadia, nous pouvons vous dire que le service mérite votre attention. Malgré ses airs de bêta au début, Stadia s’est progressivement transformé en un service de cloud-gaming très performant, si ce n’est le meilleur de l’industrie. Pire, il a même gagné des fonctions, comme un catalogue de jeux inclus, sans que personne n’en parle. Google, en oubliant Stadia, est en train d’enterrer un service qui a pourtant tout pour cartonner.
Faut-il un bon réseau pour Stadia ?
Abordons tout de suite cette question qui, à notre avis, vous est immédiatement venue en tête si vous n’avez pas récemment essayé Stadia. Pour rappel, le service permet de jouer à des jeux depuis n’importe quel écran (télé, ordinateur, téléphone…) grâce à votre connexion Internet. Ce sont les serveurs de Google qui font marcher le jeu, votre appareil se contente d’afficher les images et de transférer les instructions de la manette. Au début, nous avions notamment signalé quelques problèmes comme des pertes d’images. Où en sommes-nous aujourd’hui ?
Ce que le temps nous a appris est que Stadia dépend plus de la force du Wi-Fi que de la qualité de sa connexion. Être à 50 mètres d’une box fibrée provoque plus de bugs que lorsque l’on joue à 2-3 mètres d’un routeur relié en ADSL. La très grande majorité du temps, Stadia est aujourd’hui stable, y compris pour un jeu avec beaucoup de commandes comme FIFA 22 (on appuie beaucoup sur la manette). Disputer un match en ligne ne pose pas problème, on se croirait sur une console normale.
Seul dysfonctionnement, de temps en temps et pendant seulement quelques secondes, on peut passer d’une image HD à une image SD (ou avoir un très bref problème avec le son). Le jeu n’est toutefois pas interrompu. En ce qui concerne le streaming en 4G/5G, il est toujours aléatoire. Parfois très stable, parfois inutilisable, Stadia n’est pas encore fait pour les transports en commun.
Pour vous donner un exemple de notre utilisation de Stadia, nous l’avons beaucoup utilisé en déplacement. Puisque transporter une PS5 en soute n’est pas pratique, Stadia sur ordinateur est devenu notre compagnon pour les parties occasionnelles. Nous n’avons jamais eu l’impression d’utiliser une version dégradée des jeux (sauf au niveau du nombre de joueurs, il n’est parfois pas facile de trouver des adversaires sur Stadia).
Stadia vous offre 50 jeux
Au lancement de Stadia, son modèle économique avait été vivement critiqué. Gratuit ou payant pour jouer en 4K (Stadia Pro à 9,99 euros par mois), le service de cloud-gaming de Google vous forçait à acheter les jeux. Ajouter 50 euros pour la version virtuelle d’un jeu, sans assurance qu’elle fonctionnera bien, était forcément répulsif.
Conscient de ce problème, Google a décidé de transformer discrètement son offre Stadia Pro en une sorte de Xbox Game Pass, mais n’a jamais communiqué correctement dessus. Désormais, pour 9,99 euros par mois, vous avez accès à un catalogue de 50 jeux que vous n’avez pas besoin d’acheter. De quoi rendre Stadia beaucoup plus attrayant, d’autant plus que de nouveaux jeux arrivent chaque mois. L’offre étant sans engagement, il est possible d’y souscrire de temps en temps afin d’essayer de nouveaux jeux, puis de résilier. Comment se fait-il que Google ne mette pas plus en avant l’aspect « 50 jeux offerts » ?
Parmi les jeux offerts sur Stadia, on trouve notamment Life is Strange, Control, ARK, Hitman, Dragons ou Darksiders. S’il est évident que ce catalogue est moins riche que celui de Microsoft, il reste toutefois intéressant pour les néo-gamers. Stadia devrait revoir son modèle économique autour de cette offre afin d’attirer plus de personnes.
Les raisons d’un lancement raté
Si Stadia est aussi bon, comment expliquer qu’il ne décolle pas ? Au-delà du manque d’énergie de ses équipes marketing (ou de leur non-existence ?), il nous semble que son très mauvais lancement est l’origine de tout. Au bingo de tout ce qu’il ne faut pas faire, Stadia réussit presque un sans-faute :
- Les promesses du lancement n’ont pas été tenues. Stadia promettait notamment un temps de chargement instantané ou la possibilité de reprendre sa partie à l’endroit où on l’avait abandonnée la veille. Deux ans et demi après, ce n’est toujours pas possible. Un jeu sur Stadia charge dans un temps comparable à celui d’un jeu PS4.
- Lors de la présentation de Stadia, Google a aussi mis en avant beaucoup de fonctions intelligentes, comme la possibilité de demander à Google Assistant de l’aide dans un jeu. Il s’agissait en réalité d’un concept, un jeu sur Stadia est un jeu comme un autre.
- Stadia devait proposer des jeux exclusifs. Google a finalement renoncé à cette particularité.
- Au lancement, personne n’a compris comment fonctionnait Stadia. La vente d’un pack avec une manette et un Chromecast entretenait le flou quant au caractère 100% virtuel de la plate-forme. Une manette PS4 et un smartphone auraient du suffire, comme aujourd’hui.
- L’absence de compatibilité avec Android TV, jusqu’en juin 2021, était très bête. Encore aujourd’hui, trop peu de téléviseurs sont compatibles avec Stadia sans l’achat d’un Chromecast. Une catastrophe pour un service de cloud-gaming, qui ne devrait pas avoir besoin d’un équipement physique. Stadia est aussi arrivé tardivement sur les iPhone et iPad, alors qu’il y avait beaucoup de joueurs à aller chercher sur iOS.
- En plus de se lancer avec un pack à acheter, Stadia n’est arrivé qu’avec une formule payante. Il était impossible d’essayer le service facilement.
- Les jeux présents sur Stadia, de plutôt bonne qualité, ne sont pas forcément les plus populaires. Où sont les Fortnite, Rocket League ou Call of Duty ? Il a fallu attendre longtemps pour voir débarquer FIFA, alors qu’EA était dans les partenaires de Google.
En manquant de modestie, Google a créé la déception. Si Stadia avait été présenté comme un simple moyen d’accéder à ses jeux sans console, et non pas comme une révolution pour le jeu vidéo, il aurait été moins critiqué. Il n’est pas trop tard pour changer de message.
Quel est l’avenir de Stadia ?
Si nous devions tester Stadia en février 2022, nous lui mettrions une excellente note. Les performances du service sont au rendez-vous et la possibilité de jouer aussi facilement, sur n’importe quelle machine, est assez réjouissante. Un jeu AAA fonctionne aussi bien sur un Redmi Note de Xiaomi à 200 euros que sur une console, sans le bruit des ventilateurs.
Cependant, en février 2022, Stadia a deux ans et demi. Pourtant, on pourrait croire que le service est à ses débuts. L’arrivée d’un catalogue de titres inclus a changé la donne, mais il s’agit plus d’une correction que d’une nouveauté. Pour survivre dans le marché compétitif du jeu vidéo, Google doit de nouveau investir dans Stadia, de nouveau le promouvoir en tant que service important. Sans ça, Google va le tuer… et le regrettera quand le cloud-gaming sera de partout dans quelques années. L’arrivée de concurrents signés Nvidia, Amazon et Microsoft prouve que le concept est le bon.
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