Un moteur de recherche peut-il être neutre face à des sites web propageant de la désinformation ? Pour DuckDuckGo, la réponse est désormais non pour ce qui est de la propagande russe. Le fondateur du service, Gabriel Weinberg, a annoncé le 10 mars un changement de cap qui se traduira prochainement par un abaissement du classement de certains sites.
« Comme tant d’autres, je suis écœuré par l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la gigantesque crise humanitaire qu’elle continue de créer. Chez DuckDuckGo, nous avons déployé des mises à jour de recherche qui abaissent le classement des sites associés à la désinformation russe », dit-il. Les sites qui vont être affectés par ce déclassement ne sont pas renseignés.
À cela s’ajoute une autre mesure. En plus de la réduction de la visibilité des sites qui sont accusés de propagande, le moteur de recherche va afficher des modules et des encarts d’informations, en haut des résultats de recherche, là où se porte en priorité le regard. Le but est de « mettre en évidence les informations de qualité sur des sujets qui évoluent rapidement ».
Les moteurs de recherche effectuent nécessairement des discriminations sur la base de divers signaux pour ordonner les résultats d’une requête. Ces critères sont d’ordinaire d’ordre technique, en fonction de la manière dont la page est structurée, de l’usage de balises, des liens qui pointent de la page, etc. Mais le tri des résultats peut aussi se faire sur le fond.
Il peut d’ailleurs exister des obligations légales contraignant les moteurs à changer leur index : cela a pu être constaté récemment avec des sites comme Russia Today et Sputnik. Ces derniers ne sont pas juste déclassés : ils sont même déréférencés. DuckDuckGo n’y échappe pas, puisque le service ne semble plus retourner de résultats liés à ces sites.
« Chez DuckDuckGo, nous avons déployé des mises à jour de recherche qui abaissent le classement des sites associés à la désinformation russe
Gabriel Weinberg
La décision prise par DuckDuckGo a été accueillie avec froideur par une partie de sa communauté, qui y voit l’avancée de la censure : « DuckDuckGo, contrairement à ses promesses implicites du contraire, est maintenant dans le domaine de la censure », dit l’un. Gabriel Weinberg « applique une censure sur son outil qu’il vend comme libre », dit un autre.
Le changement d’approche de DuckDuckGo sur ce qui relève de la propagande russe parait insuffisant pour affecter durablement le trafic de DuckDuckGo, qui est en hausse régulière et dépasse désormais les 100 millions de requêtes par jour. Il fera peut-être partir certains internautes mécontents, mais les principaux autres moteurs (Google, Qwant, Bing, Yahoo) ne seront pas plus souples.
DuckDuckGo prend ses distances
DuckDuckGo étant un groupe privé, il a toute latitude pour choisir ce qu’il met ou non dans son index. Il peut le faire à sa discrétion, même si cela peut entrer en contradiction avec son discours, s’il va plus loin que ses obligations réglementaires ou judiciaires. La question qui se pose est de savoir si cela va créer un précédent : quid de la désinformation sur le covid ? Ou le climat ?
La décision de DuckDuckGo n’est peut-être pas tout à fait surprenante au regard de sa récente évolution. Comme le rappelait le site Protocol le 1er mars, DuckDuckGo a « mis en pause » son partenariat avec le moteur de recherche russe Yandex en raison de la guerre en Ukraine. Cela permettait d’injecter des résultats spécifiques pour les versions russe et turque de DuckDuckGo.
DuckDuckGo utilise des infos issues de plus de 400 sources. Elles « comprennent des centaines de sources verticales fournissant des réponses instantanées de niche, DuckDuckBot (notre robot d’exploration) et des sites d’origine collective (comme Wikipédia, stockés dans nos index de réponses) ». On y trouve aussi des moteurs, comme Bing, mais pas Google. Ni Yandex désormais.
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