En France, saviez-vous que Spotify est deux fois plus populaire qu’Apple Music ? A contrario, imaginiez-vous que WhatsApp et Messenger, malgré leur incroyable popularité en Europe, arrivent derrière iMessage dans la plupart des pays, dont la France ? Dans un fascinant rapport de 47 pages, le cabinet d’études « Analysis Group » dévoile les conclusions de son enquête sur l’économie des applications à travers le monde.
Si Apple est l’entreprise qui a commandé cette étude, ses conclusions ne caressent pas toujours la marque dans le sens du poil, ce qui nous laisse penser que le tout a été réalisé avec objectivité. Même si Analysis Group révèle les faiblesses des services Apple, la marque a tout de même décidé de mettre en avant l’enquête sur sa newsroom, sans doute pour prouver aux autorités que le modèle de son App Store ne l’avantage pas tant que ça.
Une méthodologie basée sur le temps passé
Avant de vous présenter certains des résultats présentés dans cette étude (que nous vous recommandons si l’économie numérique vous intéresse et que vous comprenez bien l’anglais), précisons que les données présentées ne concernent que les utilisateurs d’iPhone. Même si l’enquête parle un peu d’Android (on apprend notamment que 32 % des développeurs conçoivent des jeux sur iOS, contre 31 % sur Android), la plupart des chiffres intéressants ne concernent que les utilisateurs d’un appareil Apple.
Pour calculer les taux d’utilisation de chaque application, Analysis Group a décidé de ne pas prendre en compte leurs téléchargements. Seuls le temps passé chaque jour dans une application et le nombre d’utilisateurs quotidiens comptent dans sa méthodologie, qui repose la plupart du temps sur des estimations.
Des chiffres inédits sur les applications en France
Dans son enquête, Analysis Group ne se contente pas de dire à quel point l’App Store a rendu des milliers de développeurs riches. Le plus intéressant concerne l’utilisation des apps, avec un focus pays par pays, en prenant en compte les spécificités locales. Par exemple, en France, Deezer est l’exemple même d’un succès national. Très peu populaire ailleurs, l’application est autant utilisée qu’Apple Music ici. Analysis Group a fait l’effort de s’intéresser à toutes ces spécificités, ce qui rend son enquête plus pertinente.
Le streaming musical
Commençons justement par le streaming musical. Même si Apple Music est préinstallé sur des millions d’iPhone, Spotify est 1,6 fois plus utilisé que les applications d’Apple et Deezer chez nous. Apple Music ne représente que 22 % des utilisateurs hexagonaux de l’iPhone et n’est majoritaire dans quasiment aucun pays, à l’exception du Japon. Là-bas, pour une raison qui nous dépasse, 55 % des propriétaires d’iPhone l’utilisent. Dans tous les autres pays européens, Spotify est premier.
Les applications de navigation
Ce phénomène est encore plus important avec les applications de cartographie, et fait très mal à Apple. Même si son application Plans est préinstallée sur tous les iPhone, elle est largement moins utilisée que celles des concurrents.
2,2 millions de Français et Françaises utilisent Google Maps chaque jour, 1,3 million utilisent Waze et 1,2 million ont recours à Plans. On remarque que dans tous les pays où Google Maps existe, Apple est battu. Cette statistique montre qu’Apple Maps n’a jamais réussi à s’imposer et prouve qu’Apple ne ment pas quand il prétend que l’App Store n’avantage pas ses applications.
Le streaming vidéo
Autre secteur intéressant, le streaming vidéo. Même s’il est facile de deviner que Netflix est devant, nous n’aurions jamais imaginé une telle domination.
Dans tous les pays, sauf le Japon une nouvelle fois, Netflix écrase tout le monde. En France, 2,4 millions d’utilisateurs de l’iPhone l’utilisent tous les jours, contre 400 000 sur Amazon, 300 000 sur myCANAL, 170 000 sur Disney+ et, surprise, 70 000 sur Apple TV+. Dans tous les autres pays, à l’exception des États-Unis, Apple TV+ s’en sort beaucoup moins bien. Les Français sont-ils parmi les plus grands utilisateurs du service d’Apple ? Quoiqu’il en soit, la domination de Netflix est telle que la concurrence ne semble récupérer que des miettes.
Le cas étonnant d’iMessage
Enfin, c’est sans doute le cas qui nous a le plus étonné dans l’étude, iMessage est l’application de messagerie la plus utilisée par les utilisateurs français d’un iPhone (ils sont 13 millions à l’utiliser tous les jours). Si ce chiffre est sûrement déformé par l’utilisation des SMS, qui passent par la même application, l’avance nous semble quand même très grande face à WhatsApp (8,1 millions), Messenger (6 millions), Instagram (5,9 millions) et Snapchat (5,7 millions). Il n’y a qu’en Allemagne en Europe qu’iMessage est battu par WhatsApp.
Aux États-Unis, on remarque qu’iMessage a quasiment trois fois plus d’utilisateurs que Snapchat, deuxième application de messagerie la plus utilisée. Oui, vous avez bien lu. Là-bas, Snapchat détrône Messenger et Instagram, sans doute parce qu’il n’y a que les plus jeunes qui n’ont pas un iPhone.
Apple a de quoi défendre l’App Store
Si l’étude d’Analysis Group survole rapidement la question des 30 % de commission et du sideloading, il donne tout de même à Apple de nombreux arguments à faire valoir face aux autorités anticoncurrentielles qui l’accusent de favoriser ses propres services sur iPhone. Comme vous pouvez le voir dans l’image ci-dessous, il n’y a pas une catégorie dans lequel Apple domine dans le monde, à l’exception de la musique au Japon (55 %). Partout ailleurs, la concurrence réunie, ou seule, fait mieux que ses propres services.
Si certains bouts de l’étude peuvent faire sourire (Analysis Group dit que 99,99 % des apps de l’App Store ne sont pas faites par Apple, ce qui est logique au vu des 1,8 million d’apps présentes sur la plateforme), aucune étude n’a, à ce jour, donné autant de détails sur la fragmentation du marché des applications iOS. Même si Apple peut abuser de son pouvoir occasionnellement, il semblerait qu’il n’a pas le pouvoir que certains lui imaginent.
Seule critique que l’on peut omettre sur le contenu de l’enquête : pourquoi ne pas mentionner le cas des navigateurs web, de l’application Téléphone ou des applications pour payer avec son smartphone (Apple Pay), secteurs sur lesquels Apple est bien moins clément avec les développeurs tiers ? Ici, on doute que les apps tierces s’en sortent aussi bien.
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