Il y a la queue au stand de Solid. Les curieux se pressent pour voir le staff s’activer derrière le stand et essayer de suivre le rythme des commandes : depuis le matin, ils en ont reçu plus d’une cinquantaine. Solid est une entreprise unique en son genre : elle fait de l’impression de NFT. Et au salon du Paris NFT Day, c’est une compétence qui intéresse particulièrement.
Les NFT (pour non fungible token, ou jeton non échangeable) sont devenus en à peine un an un incroyable phénomène. Ces sortes de certificats d’authenticité inscrits dans la blockchain ont permis à un véritable marché de l’art de se développer : les NFT de certains artistes se vendent à plusieurs millions de dollars, et des collections de tokens s’arrachent à des prix astronomiques. Mais il n’y a pas que le milieu de l’art qui est intéressé par les NFT.
Depuis un an, toutes sortes d’entreprises ont profité de la popularité des jetons pour tenter de développer des produits destinés aux collectionneurs. Elles se sont réunies lors du Paris NFT Day, l’évènement français de la communauté crypto, et malgré le prix impressionnant des billets (200 euros pour les moins chers), collectionneurs et investisseurs étaient au rendez-vous.
« Si on doit fermer un jour, nos joueurs garderont tous leurs objets »
Arthur, l’un des co-fondateurs de Solid, a senti l’opportunité il y a un an, lorsque les chiffres des premières ventes de tokens se sont envolés. « On s’est dit qu’il y avait quelque chose à faire, pour permettre aux acheteurs de vraiment voir leurs NFT », explique-t-il entre deux commandes. Sur le stand, des impressions de Bored Ape Yacht Club (les NFT les plus connus actuellement) ou de cartes de footballeur Sorare permettent d’avoir un aperçu dans le réel des fichiers habituellement gardés seulement sur la blockchain.
Pour imprimer ses NFT, il faut tout d’abord prouver qu’on les possède bel et bien : il n’est pas question de montrer seulement une image sans certificat d’authenticité. Ensuite, l’impression se fait de manière classique, comme pour des fichiers jpeg traditionnels. On imprime sur papier le token, puis on le met sous presse avec une plaque d’aluminium, et le tour est joué. En tout, l’opération ne dure que quelques minutes, indique Arthur. Et pour les NFT animés ? « On s’arrange avec les propriétaires pour choisir quel passage ils veulent avoir », indique-t-il, comme une capture d’écran réalisée en regardant un film. Malgré un prix prohibitif (les impressions de 1m sur 1m coûtent 600 euros), le projet de Solid est un succès : les commandes sont nombreuses, au point où ils cherchent à recruter pour garder le rythme des impressions.
Le succès de Solid n’est pas unique : les entreprises réunies au Palais Brogniart ce 12 avril pour le Paris NFT Day sont la preuve que le secteur des crypto-monnaies et des NFT est particulièrement porteur, et que tout le monde veut un bout des fortunes en jeu. Que ce soient des projets portés par des artistes, ou par des géants des cryptos comme le portefeuille Metamask, la plateforme d’échange Binance, tous les stands de l’exposition sont pleins. En à peine un an, les jetons non échangeables sont passés de secteur niche à une industrie respectée qui lève des milliards de dollars.
« Les NFT, c’est la révolution », raconte, convaincu, Eryk, le fondateur de Legends of Elyseum, un jeu de cartes au fonctionnement très proche de Hearthstone — mais avec des non fungible tokens en plus. « Les cartes sont des NFT, les maps sont des NFT… beaucoup d’items du jeu peuvent être mintés (transformé en NFT, ndlr). C’est cet aspect qui rend notre jeu différent, parce que même si on doit fermer un jour, nos joueurs garderont tous leurs objets.»
Il n’est pas le seul à être persuadé que les jetons non échangeables sont plus que des images qu’on achète : tous les vendeurs et les exposants du NFT Day proposent des usages futuristiques aux tokens. Un stand propose de minter des vêtements de luxe afin de faire des défilés virtuels, les casinos Partouche veulent « créer une communauté » de joueurs grâce aux NFT, de très nombreux jeux vidéo vantent leur utilisation des jetons…. des tatoueurs veulent même amener leur art dans le métaverse.
Qui veut se faire tatouer un NFT ?
« Aujourd’hui, on propose aux fans de se faire tatouer des pièces uniques qui ont un certificat d’authenticité », explique Jérémie, qui tient le stand d’Ethernaal, une entreprise qui propose des tatouages NFT. « Mais demain, on aimerait pouvoir transférer ses tatouages sur les avatars de nos clients dans le métaverse. » Même de cloche du côté de Mélissandre, qui s’occupe du marketing d’une entreprise qui a lancé une collection de NFT — et qui aimerait, à terme, permettre à sa communauté de les utiliser dans un métaverse.
C’est la grande promesse des NFT : l’interopérabilité avec le métaverse. Les projets de mondes virtuels en 3D, dans lesquels les personnes pourraient évoluer grâce à des casques de réalité virtuelle sont au centre de toutes les attentions depuis l’annonce de Facebook. Et à terme, dans les métaverses, toutes sortes d’objets, de tenues ou même d’avatars pourraient être des NFT — et c’est là que réside leur intérêt. Beaucoup d’entreprises font le pari de proposer des NFT de produits qui ne sont pas encore disponibles, mais qui, dans le futur, pourraient être utilisés dans plusieurs métaverses, et être échangés à l’infini. Les métaverses en question n’existent pas encore, mais pour les entreprises, ce n’est pas grave : il faut se tenir prêt.
« La communauté NFT, c’est des utopistes »
Le seul stand à ne rien vendre lors de cette journée est aussi celui qui a connu le plus d’affluence, tout au long de la journée : celui loué par le groupe des propriétaires francophones de Bored Ape Yacht Club — une collection de NFT extrêmement populaire. Surnommé « French Ape Yacht Club », le groupe compte une soixantaine de personnes, qui combinent à eux tous près de 120 « Apes ».
Tous ont eu leur premier NFT il y a à peine un an, et beaucoup ont eu la chance d’acheter leur Ape lorsqu’ils ne coutaient « que » 1 000 euros — aujourd’hui, les BAYC s’arrachent pour des centaines de milliers d’euros. Aujourd’hui, plutôt que de les vendre, ils veulent les « faire fructifier », par exemple en créant une marque de vêtement, ou en vendant des goodies à l’effigie de leur singe — ils distribuent déjà des bières avec leur logo.
Surtout, tous croient fermement aux crypto-monnaies, la décentralisation, et le fait que les non fungible tokens vont véritablement révolutionner la notion de propriété, explique Frenchie. « Je crois que c’est ça qui rassemble la communauté des NFT : on est tous un peu utopistes.»
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