Le bitcoin est désormais un terme incontournable. La crypto-monnaie la plus connue au monde, officiellement reconnue comme devise au Salvador et en Centrafrique, s’échange à près de 30 000 dollars et sa blockchain est entretenue par un large réseau de particuliers et d’entreprises. Mais il n’en a toujours pas été ainsi.
Aux débuts de la crypto-monnaie, en 2009, seule une toute petite communauté de passionnés s’occupait de maintenir la blockchain et de miner les premiers bitcoins. Les précédents calculs estimaient que ce groupe était composé de près de 75 000 personnes, mais une nouvelle étude montre que seulement 64 personnes auraient vraiment activement participé aux débuts du bitcoin.
Une toute petite communauté
L’étude est signée par un groupe de chercheuses et chercheurs américains de l’université de Rice et du Baylor College of Medecine, et a été publiée par l’université de Cornell le 6 juin 2022. Intitulée « la coopération au sein d’un groupe d’anonymes a permis de protéger le bitcoin alors que la décentralisation connaissait des remous », l’étude revient sur les premières années de vie de la crypto-monnaie.
Les chercheurs ont étudié les transactions réalisées entre janvier 2009, lors de son lancement, et février 2011, date à laquelle le bitcoin a pour la première fois atteint le prix d’un dollar. Et ils ont découvert que pendant ces deux premières années, « la majorité du bitcoin a été miné par seulement 64 agents » — un nombre près de mille fois inférieur à ce qui était cru auparavant. En tout, 2 676 800 bitcoins ont été minés pendant cette période — ce qui représente aujourd’hui la somme de 76 milliards de dollars.
Ce nombre très faible de mineurs n’était pas un bon signal pour la santé de la blockchain — et était même très dangereux pour l’avenir du bitcoin. Le minage est l’acte qui permet de créer des unités de crypto-monnaies tout en validant des informations sur la blockchain : c’est une opération très importante, au cœur du dispositif des crypto-monnaies. C’est aussi celle qui permet de garantir l’inviolabilité de la blockchain : plus de personnes essayent de devenir validateurs, plus les calculs à résoudre sont durs, et moins il y a de chance pour qu’un acteur mal intentionné n’arrive à falsifier des informations ou des transactions.
Peu de mineurs = moins de sécurité
Or, pendant ces deux premières années, le faible nombre de personnes impliquées dans le projet bitcoin aurait permis de falsifier les données de la blockchain, et aurait permis de déclencher des « 51% attack », écrivent les auteurs. Comme peu de mineurs étaient actifs, à plusieurs reprises, un seul acteur contrôlait la majorité du hashrate (ou capacité de calcul) du réseau. Pendant ces moments-là, ce mineur aurait pu dépenser 2 fois le même bitcoin ou voler les bitcoins d’autres utilisateurs.
« Étonnamment, nous nous sommes rendu compte que les hackeurs potentiels ont, à chaque fois, choisi de coopérer », écrivent les auteurs. Les premiers mineurs ont toujours choisi d’agir de manière « altruiste », et de maintenir l’intégrité du système — et c’est ce qui a permis à l’expérience bitcoin de continuer.
L’étude souligne également un autre fait : le bitcoin a toujours connu des problèmes de décentralisation et la situation n’est pas très différente aujourd’hui. Une étude parue en décembre 2021 montrait que 10 % des mineurs contrôlaient 90 % des capacités de minage, et que seulement les 50 plus gros mineurs avaient 50% des capacités mondiales de minage. Ce problème se retrouve au niveau de la possession des bitcoins : 0,01 % des propriétaires possèdent un quart de tous les bitcoins. La décentralisation n’est pas encore tout à fait là.
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