La même semaine, deux projets de voitures solaires se trouvent confrontés à des décisions importantes pour leur avenir. De quoi susciter toujours plus de doutes autour de la viabilité de ces développements.

Utiliser l’eau, l’air ou le soleil comme sources inépuisables et gratuites d’énergie a toujours fait rêver les inventeurs au fil des siècles. Cependant, dompter ces éléments, pour en faire une solution viable de mobilité, est loin d’être aussi évident. Les deux projets européens qui se sont lancés sur le créneau de la voiture électrique recouverte de panneaux solaires, Lightyear et Sono Motors, font face à des difficultés en ce début d’année 2023. Une situation qui les incite à revoir leur stratégie de développement.

Passer du prototype et des belles promesses à la production est une tâche bien plus ardue que prévu. D’ailleurs, sur les nombreuses startups qui ont voulu se lancer sur le marché de la voiture électrique ces 5 dernières années, beaucoup se trouvent confrontés à ces mêmes difficultés de financement. Par exemple, Byton ou Faraday Future, pour parler de celles que l’on pouvait annoncer comme des « Tesla Killers ». Rares sont ceux qui, comme Rivian, Lucid ou Fisker, ont réussi à passer l’étape de la livraison de leurs modèles malgré de nombreuses difficultés.

Sono Motors poursuit ses appels au financement

Le projet de la Sion de Sono Motors est une voiture électrique familiale et abordable (moins de 30 000 €) recouverte de cellules photovoltaïques. Derrière une promesse d’un véhicule pouvant rouler plusieurs dizaines de kilomètres par semaine gratuitement grâce au soleil, l’entreprise peine à convaincre les investisseurs. Ils sont pourtant nécessaires pour pouvoir entamer la phase de production avec les fonds minimum requis.

Différentes couches de la carosserie de la Sion // Source : Sono Motors
Différentes couches de la carosserie de la Sion. // Source : Sono Motors

En attendant de trouver des investisseurs solides, Sono Motors a lancé une campagne de financement participatif nommée #SaveSION en décembre 2022 pour récolter plus de 100 millions d’euros de la part de particuliers. Alors que la campagne arrivait à son terme le 26 janvier, Sono Motors n’avait même pas atteint 50 % de l’objectif fixé. Les fondateurs ont pris de la décision de prolonger la campagne de financement participatif jusqu’au 28 février, dans l’espoir de récolter les fonds nécessaires, soit l’équivalent de 3 500 Sion pleinement payées.

Sono Motors a déjà à plusieurs reprises fait appel à la bonne volonté des particuliers et des premiers supporteurs du projet. On ne peut pas dire que la marque ne suscite pas l’intérêt du public. Elle a quand même réussi à obtenir des réservations pour 44 000 voitures. Néanmoins, la route est encore longue et l’entreprise dépense sans compter pour continuer le développement du produit et sa communication. Même si l’entreprise atteignait l’objectif de sa campagne de financement et terminait le développement du véhicule, il faudrait rapidement d’autres fonds pour produire les véhicules, les livrer et assurer le service après-vente. Autant dire que l’horizon semble encore bien gris pour le projet.

Le modèle haut de gamme Lightyear 0 abandonné au profit du Lightyear 2

À la différence de Sono Motors, Lightyear a réussi à convaincre des investisseurs, mais son changement de stratégie de ce début 2023 pourrait quand même soulever des questions.

Lightyear 0 vue arrière // Source : Lightyear
Lightyear 0, vue arrière. // Source : Lightyear

Avec son premier concept, puis son premier véhicule Lightyear 0, la marque a fait connaître ses ambitions et son projet à grande échelle. En voulant commercialiser son premier véhicule solaire sur un positionnement très haut de gamme, à plus de 250 000 € pour seulement 1 000 exemplaires, le projet était probablement un peu trop ambitieux pour un véhicule, qui aurait peiné à convaincre par ses performances.

Lightyear vient donc d’annoncer le 24 janvier qu’elle abandonnait ce premier modèle, Lightyear 0, pour se concentrer sur le développement de son second projet, Lightyear 2. Ce modèle aux ambitions plus modestes, mais surtout à un tarif bien plus attractif de 40 000 €, a déjà reçu pas loin de 60 000 réservations. Il promet jusqu’à 800 km d’autonomie, dont une partie est réalisée grâce aux panneaux solaires implantés sur le véhicule.

Premières images de la Lightyear 2   // Source : Lightyear
Lightyear 2. // Source : Lightyear

Le changement peut sembler prudent sur le papier. Pour autant, le problème de la rentabilité va rapidement se poser. Un modèle abordable séduira les acheteurs, mais les marges faibles souvent dégagées par ces produits ne permettent pas toujours à un constructeur automobile de survivre. Tesla est d’ailleurs un très bon exemple en la matière. Si le constructeur américain n’avait pas débuté avec des modèles haut de gamme, il n’aurait probablement pas pu répondre à la demande de modèles plus accessibles demandés par le grand public. Lightyear, en décidant se concentrer sur un modèle performant, mais abordable, prend un risque financier, qui peut se montrer payant ou au contraire, conduire le projet à l’échec.

Si votre batterie est vide, soleil ou pas, vous n’avancerez pas

Ces deux marques, et d’autres, parlent de voitures solaires, mais cette dénomination est finalement faussée. C’est un élément de langage qui tient plus de l’argument marketing que de la réalité. Il s’agit avant tout de véhicules électriques à petites capacités de batterie avec des prolongateurs à énergie solaire. Les panneaux solaires, selon la zone géographique, la saison et les lieux de circulation, sont là en guise d’appoint en énergie plus ou moins important.

Si le discours affirmant que ces modèles peuvent couvrir les besoins hebdomadaires des clients, avec l’énergie solaire gratuite, est parfois vrai, le système est quand même plus à apparenter à une motorisation hybride. Si votre batterie est vide, soleil ou pas, vous n’avancerez pas. Avec une batterie électrique vide, selon Challenges, aucun de ces modèles ne peut suffisamment produire de courant en plein soleil pour faire bouger le véhicule.

Certains constructeurs automobiles intègrent déjà le solaire comme un complément d’énergie pour leur véhicule. Toyota propose déjà cette solution depuis plusieurs années sur la Prius rechargeable, Fisker l’intègre aussi sur son SUV électrique Ocean. Ces modèles intègrent bien moins de cellules photovoltaïques que les projets de Sono Motors ou Lightyear. Il faudrait des surfaces bien plus grandes que des voitures pour réellement pouvoir rouler concrètement au solaire, à moins de circuler uniquement dans l’Outback australien sous un soleil de plomb.

La voiture solaire est-elle une utopie en Europe ?

En l’état actuel des développements technologiques, il ne fait aucun doute que promouvoir la mobilité à l’énergie solaire est une utopie, ou du moins une promesse marketing peu fiable. La moindre zone d’ombre ferait baisser les rendements d’un modèle reposant sur le solaire. Imaginez alors rouler en ville dans ces conditions.

Il n’est cependant pas inintéressant que des entreprises souhaitent compenser une batterie électrique de plus petite taille par l’ajout de panneaux solaires sur une voiture électrique. Cependant, il est faux de croire que l’on pourra couvrir les besoins de circulation d’une voiture que par le biais de l’énergie solaire.

Pour rouler plus concrètement à l’énergie solaire, il vaut mieux avoir un domicile équipé de panneaux solaires performants qui servent à recharger votre voiture électrique au quotidien.

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