Les voitures télécommandées ont certainement bercé l’enfance de nombre d’entre vous. Dans le cas de l’entreprise Elmo, les enfants ont bien grandi et les voitures guidées à distance ne sont plus des jouets, mais un vrai service de mobilité en Estonie. Elmo a présenté, au salon Autonomy Paris les 22 et 23 mars, sa solution technologique, avec des démonstrations où l’on pouvait conduire, depuis le stand, la voiture située à l’extérieur du bâtiment.
On pourrait imaginer le service Elmo comme une solution pour que les chauffeurs puissent télétravailler en « téléconduisant » depuis chez eux – un argument utile en ces périodes de grèves – mais la réalité est un peu plus sérieuse. Elmo se situe technologiquement avant la conduite autonome, avec une solution plus facile à mettre en œuvre, puisqu’elle repose sur les compétences d’un conducteur humain.
Comment ça fonctionne ?
Elmo est une entreprise estonienne qui dispose d’une flotte de véhicules électriques en autopartage. Parmi les limites des services d’autopartage, il y a le fait que les véhicules doivent se situer dans la zone où ils sont utiles pour répondre à la demande. Sauf que, parfois, les véhicules sont déposés là où cela arrange un client, mais pas forcément les suivants. Dans ces situations, la société dépêche une équipe avec un chauffeur qui va ramener le véhicule dans une zone plus utile.
La startup a ainsi développé une brique technologique qui lui permet de téléconduire à distance via une communication 4G avec le véhicule. Plutôt que de mobiliser plusieurs personnes pour aller chercher des véhicules dispatchés dans la ville et les déposer au bon endroit, le conducteur reste dans l’entreprise et prend le contrôle à distance du véhicule.
Là où la frontière entre la réalité et le jeu vidéo est mince, c’est que l’entreprise utilise une installation qui ressemble aux simulateurs de conduite que l’on peut installer chez soi pour jouer — des écrans, un siège baquet, un volant et des pédales. Sauf que cette installation ne commande pas un véhicule dans un monde virtuel, mais bien un véhicule qui évolue sur des routes ouvertes. Il s’agit de Nissan Leaf pour le moment. Impossible pour les conducteurs d’imiter une partie de Grand Theft Auto, ce serait la fin du projet.
Les usages possibles de cette brique technologique
Elmo a déjà équipé cinq de ses voitures électriques avec cette technologie. Une vingtaine de véhicules sont prévus pour venir renforcer la flotte. L’entreprise utilise ces voitures pour proposer un service en plus pour les utilisateurs d’Elmo. Le client peut commander un véhicule pour qu’il soit disponible devant chez lui, au moment où il en a besoin.
À distance, le conducteur d’Elmo va donc procéder au préacheminement du véhicule à l’adresse indiquée, sans avoir à quitter le siège de la société. Une fois la voiture arrivée à destination, c’est le client qui prend le volant et conduit comme pour n’importe quelle autre voiture de location. C’est un gain de temps pour l’entreprise et un service vraiment pratique pour le client final. En revanche, il ne s’agit pas d’une solution de robotaxis, le véhicule n’étant pas autonome. Elmo n’a pas vocation à conduire des clients, mais seulement les véhicules à vide.
L’autopartage n’est pas le seul environnement où cette conduite à distance pourrait avoir un intérêt. La responsable pour la France d’Elmo nous a expliqué que le système peut s’adapter à tous les véhicules où la présence d’un humain à bord n’est pas nécessaire. Elle a pris l’exemple de certains véhicules d’intervention sur autoroutes, notamment les véhicules avec les flèches lumineuses qui sont positionnés pour dévier le trafic vers les autres voies en cas de travaux ou d’accident. Dans ces véhicules, la présence physique d’un chauffeur n’a pas forcément de valeur ajoutée, ils pourraient tout aussi bien être conduits à distance, assurant ainsi la sécurité du conducteur.
Elmo cherche en tout cas à développer des partenariats dans toute l’Europe. L’entreprise vise autant les constructeurs de véhicules pour pouvoir faciliter l’intégration des modules Elmo, que les sociétés de services qui pourraient être intéressées par cette solution.
Les limites du système
La première limite pour Elmo est de l’ordre réglementaire. L’entreprise a obtenu une autorisation officielle de mise en circulation de ses voitures sur la voie publique en Estonie, elle cherche désormais à l’obtenir dans les autres pays d’Europe. Ce n’est pas encore fait.
La seconde limite concerne la connexion avec le véhicule. La ville doit être correctement couverte en 4G, puisqu’il ne faut pas que le conducteur perde le signal de connexion avec la voiture qu’il conduit. La responsable Elmo a indiqué que les villes, où le service est implanté, sont cartographiées. En cas de zone blanche connue, le véhicule peut être amené à faire un détour pour éviter de perdre cette connexion.
Enfin, il sera probablement nécessaire pour Elmo d’avoir des chauffeurs locaux pour les villes où la solution sera déployée. Il est difficile pour un conducteur habitué à rouler en Estonie, avec des règles de circulation propres au pays, de prendre ensuite la main à distance sur un véhicule basé à Paris, à Rome ou à Londres.
Elmo a quand même trouvé le moyen de lever un des défauts des services d’autopartage : celui de se retrouver sans véhicule à proximité quand on en a besoin. C’est finalement assez malin comme démarche. Il reste à voir comment le service va réussir à s’implanter dans d’autres pays, comme la France.
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